WELFARE
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Thème
- Décembre 1973 à New York, une journée (de l’ouverture à la fermeture) dans un Centre d’aide sociale d’urgence, hébergé le temps des fêtes de fin d’année dans le gymnase d’une école municipale. Dans ce refuge républicain aux couleurs de l’enfance, on attend son tour… Les sans-abris, apatrides, travailleurs, mères célibataires et démunis se succèdent.
- Les heures passent. Un monde de résistance prend vie. Sur cette île marginale, l’époque et les frontières n’existent plus, seuls les humains sont collectivement en action. Cette terre d’asile abrite un monde imaginaire qui s’invente à chaque récit. Le vrai et le faux ne font que se jouer l’un de l’autre et cette comédie humaine devient le tréteau d’un théâtre où les femmes et les hommes luttent avec force et courage pour la refondation d’une démocratie.
Points forts
- Un réalisme qui gifle. Nous sommes transportés au cœur des réalités et des tourments que notre société inflige aux plus fragiles. Tous ceux qui fréquentent ce centre d’aide ont décroché de la vie et errent tels des naufragés en quête d’un radeau de survie au milieu d’un système bureaucratique aux règles souvent absconses.
- Une interprétation collective parfaitement maîtrisée. Dans ce tableau de chair et de vie, tous jouent leur partition avec plus ou moins d’honnêteté. D’un côté ceux qui sont là pour aider, trouver des solutions, véritables héros du quotidien, qui tentent de gérer un service public en mal de moyens, de l’autre ceux à qui on doit secours et assistance et qui luttent pour juste vivre. Dans ce spectacle, pas de bourreaux ni de victimes, mais une juste et honnête peinture d’un monde fracturé, servie par une distribution époustouflante d’authenticité.
- Une mise en scène comme toujours dépouillée, laissant la plus grande place à ses comédiens dans une direction où texte et improvisation se fondent dans un réalisme poignant. Une dramaturgie que seule la vie est capable d’inventer.
Quelques réserves
Aucune.
Encore un mot...
- Un coup de cœur est toujours le signe d’une vitalité extrême d’un théâtre qui ne cesse de se réinventer et de questionner la société dans laquelle il baigne. Julie Deliquet et tout son collectif fait résonner un cri déchirant d’humanité.
- Toute notre démocratie est là, qui hurle avec ses violences, ses contradictions, tous ses maux qu’on n’imagine pas, calfeutrés au chaud de notre confort.
- Une magnifique écoute règne sur ce plateau incandescent de douleur et d’espoir. Des questions surgissent : « Que faisons-nous des “autres“ aujourd’hui ? L’Etat est-il toujours à la hauteur de ses ambitions ? »
- Sortons de notre zone de confort et laissons-nous gifler par la force d’un théâtre démocratique, politique mais social, incarné, émouvant, profondément humain. Brecht, Hugo, Tchekhov planent, bienveillants, sur ce spectacle.
Une phrase
L’appariteur : « Bien, on ca commencer, on va vous recevoir selon votre ordre d’arrivée, je vous demande de bien préparer vos dossiers avec tous les papiers nécessaires.
La responsable : Oui, c’est de l’argent de l’Etat que nous vous donnons, alors oui, nous avons besoin de papiers officiels, nous avons besoin de preuves. Oui on ne peut pas se contenter de croire ce que vous affirmez madame.
La femme enceinte : Eh bien, ne me croyez pas ! »
[…]
L’officier de sécurité : Vous trouvez ça juste de voler alors ?
Le vieil homme : Non mais excusez moi monsieur, mais moi , j’emploie pas le mot “juste“.
L’officier de sécurité : Mais si vous m’avez dit …
Le vieil homme : Non pas du tout… moi j’emploie pas le mot “juste“, j’emploie le mot “nécessaire“.»
L'auteur
- Réalisateur très prolifique, mais aussi scénariste, producteur, monteur, preneur de son, voire interprète de ses films, Frederic Wiseman s'attache principalement à brosser un tableau critique de la société et des institutions américaines.
- Metteuse en scène française, fondatrice du Collectif In Vitro, Julie Deliquet est la directrice du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis depuis mars 2020. Elle met également en scène des spectacles pour la Comédie Française : Fanny et Alexandre , Vania, Jean-Baptiste, Madeleine, Armande et les autres...
- Welfare a été le choix ambitieux et courageux de Tiago Rodrigues, pour l’ouverture du dernier Festival d’Avignon, une volonté farouche d’un théâtre qui témoigne, d’un théâtre engagé, d’une volonté artistique d’une grande honnêteté.
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