Un fil à la patte
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Thème
Noceur invétéré, Fernand de Bois d’Enghien a décidé de mettre fin à sa vie de garçon en épousant la fille de la baronne Duverger. Mais avant, il lui faut rompre avec sa maîtresse, Lucette Gautier, une chanteuse de café-concert, et surtout oser le lui annoncer. Car Bois d’Enghien n’est pas très courageux et Lucette très attachée à lui. De petites lâchetés en malentendus, de coïncidences en gros mensonges, les participants à ce mariage ne vont pas être à la noce !
Points forts
1- Si cette version d’« Un fil à la patte » est une réussite totale, c’est à Christophe Lidon qu’elle le doit en premier. Contrairement à beaucoup de metteurs en scène persuadés que Feydeau doit se jouer dans la précipitation, l’énervement, l’affolement même, lui laisse le temps à ses comédiens de faire exister leur personnage, de donner leurs scènes, d’installer clairement les situations, tout en respectant bien sûr un tempo soutenu. Jamais il ne cherche à perdre le spectateur dans une vaine tornade. Au contraire il semble animé par un souci constant de clarté. En conséquence, on a rarement entendu Feydeau comme ici, et rarement autant ri !
2- Lorsqu’on évoque Feydeau, on pense immédiatement ”comique de situation”, et l’on a bien raison. Immense vaudevilliste, il n’a pas son pareil pour mener ses personnages là où ils ne doivent pas aller et leur faire rencontrer ceux qu’ils ne doivent pas croiser. Mais son pouvoir comique, c’est aussi la moquerie potache (ici, le monsieur à la mauvaise haleine), les gags à répétition, l’humour absurde, les réflexions saugrenues, les personnages hauts en couleur ou confits de défauts… Quelle variété dans les armes du rire !
3- Le parti pris visuel du spectacle est à la fois simple, joli et ingénieux. Des éléments de décor noirs s’adaptent aux différents lieux des trois actes, complétés par des vidéos astucieuses (bravo au réalisateur Léonard, déjà remarqué cette saison pour ses apports à « Ramsès II » aux Bouffes Parisiens et au « Lauréat », ici même au Montparnasse). L’action a été transposée dans les années 50: un piano, quelques meubles et les accessoires indispensables, de splendides bouquets de fleurs, des costumes sombres pour ces messieurs, et des tenues colorées et pimpantes pour ces dames… et pour le général sud-américain.
4- Sur scène, ils sont neuf comédiens mais se démènent comme quarante. D’ailleurs certains jouent plusieurs rôles sans qu’on les reconnaisse. Tous ont une personnalité bien marquée, une grande énergie et campent très finement leur personnage, à tel point que cette pièce de troupe paraît ne réunir que des rôles principaux.
Quelques réserves
Je n'en vois aucun. La salle est même climatisée !
Encore un mot...
Un Feydeau monté avec beaucoup de doigté. Très drôle, joli, enlevé, merveilleusement interprété, ce spectacle est idéal pour l’été… et les autres saisons.
Une phrase
La Baronne (à sa fille, sur le point de se marier) : Et la maternité, qu'est-ce que tu en fais ?
Viviane : Ah ! Oui, la maternité, ça c'est gentil ! ... mais... qu'est-ce que le mari a à faire là-dedans ?
La Baronne : Comment "ce qu'il a à faire" ?
Viviane : (très logique) Mais dame ! Est-ce qu'il n'y a pas un tas de demoiselles qui ont des enfants et un tas de femmes mariées qui n'en ont pas !... Par conséquent, si c'était le mari... n'est-ce pas ?...
L'auteur
Prince du rire et maître du vaudeville, Georges Feydeau, né en 1862, est devenu un classique. Ses grandes pièces sont régulièrement jouées en France et à l’étranger: « L'Hôtel du libre échange », « Le Dindon », « La Dame de chez Maxim », « La Main passe », « Occupe-toi d'Amélie ».
Derrière une légèreté apparente, son regard sur les êtres s’avère plutôt sombre. Ses personnages principaux cherchent toujours à s’épanouir sexuellement, tout en faisant mine de respecter les codes stricts de la société bourgeoise. Les rires et les quiproquos naissent de ce conflit.
À la fin de sa vie, Feydeau quitte son épouse et s’installe au Grand Hôtel Terminus, un palace situé près de la gare Saint-Lazare. Il n’écrit plus que des pièces courtes, en un acte, dans lesquelles il fustige la vie conjugale, « On purge bébé », « Mais n’te promène donc pas toute nue ! », « Feu la mère de madame ».
Atteint de troubles psychiques, il est interné dans une maison de santé et meurt en juin 1921, à l’âge de 58 ans.
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