Un chapeau de paille d'Italie
Chorégraphies : Emma Kate
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Thème
Fadinard n’aurait pas dû s’attarder du côté du Bois de Vincennes le matin de ses noces car son cheval en a profité pour croquer le joli chapeau de paille d’une dame en train de folâtrer avec son jeune et soldatesque amant. Ces deux-là débarquent donc chez Fadinard pour exiger qu’il leur rapporte un chapeau identique avant que le mari trompé ne puisse découvrir la disparition de l’accessoire de mode et par là-même l’adultère.
Et voici comment une broutille bouleverse tous les beaux plans du futur marié qui craint de devenir lui-même la cible du mari ou encore d’éveiller la défiance de son futur beau-père, pépiniériste provincial et conformiste qui doit arriver d’un moment à l’autre.
Fadinard s’en va donc parcourir Paris en tous sens, de boutiques de modistes en salons mondains, entrainant toute la noce dans sa quête trépidante d’un nouveau chapeau.
A l’issue de ses péripéties hilarantes, parviendra-t-il au but ? Réussira-t-il à retrouver l’objet qui toujours se dérobe, pour enfin devenir l’heureux époux de la candide et ravissante Hélène ?
Points forts
Cette pièce de Labiche, créée en 1851, est un classique indémodable, fleuron de la comédie parisienne, où tout (intrigue, répliques, langue, composition…) est parfaitement ciselé pour amuser et en même temps pourfendre la société bourgeoise du XIXe siècle.
Et ce classique n’a pas pris une ride. Bien plus, il est ici actualisé, tonifié et illuminé par Alain Françon à la mise en scène, Feu !Chatterton à la musique, Emma Kate à la composition chorégraphique, et par des comédiens et comédiennes en pleine forme, avec une mention spéciale pour Vincent Dedienne et Suzanne de Baecque tout en énergie et finesse.
L’art du vaudeville est ici à son sommet, rythmé, tourbillonnant même, entre répliques alertes et retournements de situation jubilatoires.
La mise en scène sait parfaitement mettre en valeur, d’une façon facétieuse, tout ce qu’une comédie de mœurs, peut contenir de critique sociale. Ainsi, entre un fiancé espiègle mais aussi bien menteur, un officier tour à tour séducteur et menaçant, un beau-père qui tient autant du rogue maquignon que du bourgeois conventionnel, un aristocrate rêveur mais incapable de renoncer à ses privilèges ou encore un mari trompé aussi revêche que geignard, c’est bien tout un bataillon de spécimens de masculinité médiocres, ridicules ou lamentables que ce spectacle fait défiler avec une virevoltante causticité. Mais loin de tout esprit de système, la mise en scène a laissé de la place à d’autres formes de masculinité, moins normées et plus amènes.
Et si les personnages féminins composés par Labiche révèlent bien des clichés misogynes de son époque (et qui ont la vie dure), entre l’épouse adultère et hystérique ou la fiancée nigaude à force d’ingénuité, ces personnages finissent par évoluer : le parti pris scénique, comme le jeu des actrices, leur permettent de dévoiler la cruauté de l’ordre familial bourgeois : « Papa vous m’avez sacrifiée ! » s’exclame la jeune Hélène enfin dessillée sur certaines fonctions du mariage conventionnel.
Le rythme du spectacle et le plaisir enthousiaste des spectateurs tiennent enfin à la place électrisante qu’y tient la musique : elle est partout bienvenue, tantôt à la façon de l’opéra comique réactualisé, tantôt en hommage coloré et chorégraphié à la comédie musicale hollywoodienne, ou encore en rejoignant le genre de l’opéra rock (avec un joyeux clin d’œil à Starmania)
Quelques réserves
Aucune.
Encore un mot...
Quel coktail tonique, merveilleusement bien goupillé, que cette comédie du mariage, relevée d’un caustique soupçon d’adultère comme il sied au vaudeville, corsé par une trépidante course au MacGuffin, et réhaussé d’une bonne dose (jamais indigeste) de critique sociale.
Une phrase
« Etes vous bien sûre que mon cheval n’était pas dans son droit en mangeant votre chapeau ? »
« Vous êtes vous trouvé un fois en relation avec un porc-épic, car tel est mon beau-père »
« Comme l’amour rend ingénieux ! »
L'auteur
Eugène Labiche (1815-1888) fut le fer de lance de la comédie et du vaudeville au XIXe siècle. Auteur prolixe (plus de 175 pièces à son actif) et très en vogue à une époque où le théâtre est aussi un genre populaire prisé, il était à la fois un représentant du monde bourgeois auquel il appartenait et qu’il savait distraire, et un pourfendeur satirique de ses travers. Il fut élu à l’Académie française en 1880.
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