Tenir debout

Difficile équilibre
De
Suzanne de Baecque
Mise en scène
Suzanne de Baecque
Avec
Suzanne de Baecque et Raphaëlle Rousseau, en alternance avec India de Almeida.
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Théâtre du Rond Point
2 bis avenue Franklin D Roosevelt
75008
Paris
01 44 95 98 21
Jusqu’au 6 octobre 2024. A 19h30 ; Samedi 18h30 ; Dimanche 15h30.
6-8 novembre, La comédie de Béthune (62) 12-13 novembre, Le Sorano, Toulouse (31) 18-21 novembre : Comédie de Colmar- CDN Grand Est Alsace (68) 18-20 décembre, La Criée – Théâtre National de Marseille (13) 14 janvier 2025, Théâtre d’Arles (13) 16 janvier

Thème

  • Suzanne, 24 ans, prépare des concours pour devenir comédienne lorsque son beau-père, frappé par un appel à concourir pour l’élection de Miss Poitou Charentes, lui fait remarquer que si elle échoue, elle pourra toujours tenter cette compétition-ci… 

  • Cette remarque semble à Suzanne témoigner d’un double mépris : pour les comédiennes assimilées à leur seule qualité plastique et pour les candidates victimes une fois de plus du « mépris de classe. » 

  • Pourtant quelques années plus tard, son école de théâtre l’invite à un atelier de recherche appelé « Croquis de voyage » et qui prend la forme d’un voyage ou d’une immersion d’un mois en solitaire d’où sera tiré un projet personnel et artistique quelle qu’en soit la forme : écriture, théâtre, danse vidéo. 

  • Suzanne décide alors de concourir au titre de Miss Poitou-Charentes, entrant ainsi dans les coulisses d’une formation et d’une élection très particulière. Elle y rencontre une série de jeunes filles, des Chloé, des Chiara, des Lauraline et des Lolita qui se racontent.

Points forts

  • On n’oubliera pas le rire cascadant et frais de l’autrice- comédienne, sa grâce de fausse nunuche et encore moins ces portraits de jeunes filles rendues à leur profondeur. Les comédiennes ont beaucoup d’énergie et de charme et ne se font pas de cadeaux.

  • C’est plutôt drôle, original et surprenant, le texte ne sombrant jamais dans ce qui pourraient être les conventions de la dénonciation et, en outre, parfaitement rythmé et éclairé.

Quelques réserves

  • Evidemment, la question initiale interrogeait les conditions dans lesquelles l’expansion du féminisme - dans une société qui bouscule les assignations de genre et les codes sociaux qu’elles supposent - peut coexister aujourd’hui avec le maintien de ces manifestations étranges que sont les concours de beauté, exclusivement féminins. 

  • Le ton est d’emblée donné par la séquence vidéo qui, en ouverture, montre en gros plan le visage de Suzanne préparé et comme confisqué pour la séance de sélection. Shampouinée, brossée, bouclée, séchée, poudrée, maquillée, apprêtée, elle est encore plus brutalement “réifiée“que ces magnifiques chevaux du centre équestre dans lequel se déroule le concours, et que l’on voit passer entre deux plans. 

  • Mais le mélange des genres rend ce spectacle non pas dérangeant mais vaguement inconfortable. Comme si l’autrice avait peiné à coudre ensemble les différents sketchs qu’elle propose, les paillettes et les douleurs, la folle espérance que suscitent ces concours et le terne des vies ordinaires, l’ironie et la gravité, le loufoque et l’anodin. Est-il possible de placer sous un projecteur de théâtre une jeune fille de 24 ans atteinte d’un cancer et d’ironiser sur le sort des Miss de province ?

  • Peut-être justement parce que le conflit entre le rêve et la brutalité du dressage des miss est un peu lourdement suggéré, peut-être aussi parce que la pièce semble un peu décousue, un peu bancale, entre vidéo et accessoires, lumière et fumée, grimaces et pitreries. En tout cas, Tenir debout n’emporte pas totalement la conviction.

Encore un mot...

  • Se mettre en scène en tant qu’actrice de sa propre aventure est un défi que se lancent périodiquement les protagonistes du théâtre moderne. Un théâtre vérité qui joue sur l’intimité, n’exclue ni la fantaisie, ni la profondeur, ni la rencontre des autres, et se donne la liberté de parler de soi et de faire parler les autres. 

Une phrase

  • « On nous a appris à marcher, on nous a appris à sourire, on nous a appris à défiler, on nous a appris à regarder le jury. J’ai fait les gestes, j’y arrivais pas. »

  • « Oui, y’a malheureusement des gros pervers qui regardent Miss France. »

  • « T’as tellement plus de voix quand t’es miss quelque chose. »

L'auteur

  • Formée au théâtre, Suzanne de Baecque a travaillé à plusieurs reprises au cours de sa formation sous la direction d’Alain Françon. Après sa sortie de l’école, elle a interprété Lisette dans La Seconde Surprise de l’amour de Marivaux, mis en scène par Alain Françon en novembre 2021 à l’Odéon et a remporté pour ce spectacle le Prix Jean-Jacques Lerrant de la Révélation théâtrale du Syndicat de la Critique. 

  • En 2023, elle était à l'affiche d'Un chapeau de paille d'Italie d'Eugène Labiche, monté par Alain Françon, au Théâtre de la Porte Saint-Martin.

  • On l’a vue également à la télévision et au cinéma, notamment dans la Jeanne du Barry de Maïwenn.

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