Réparer les vivants
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Thème
Julien, un jeune surfeur de dix-neuf ans, est victime d’un accident de la route et déclaré mort cérébral. Ses parents, anéantis par le chagrin, acceptent que certains de ses organes soient prélevés et transplantés, notamment son cœur dont on suit la trajectoire de cette petite ville de Normandie à Paris où il est greffé à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière dans la poitrine d’une femme d’une cinquantaine d’années, atteinte d’une myocardite. Le tout en une journée.
Points forts
1) Comment ne pas être harponné par cette aventure médicale, l’histoire de ce cœur qui va, hyper réaliste et toujours clairement expliquée ? Le texte de Maylis de Kerangal est avant tout un excellent reportage, palpitant et très bien documenté.
2) Dans cette histoire, où il est question de mort et de résurrection, de générosité, de dévouement et de haute technicité médicale, les personnages nombreux sont bien dessinés et le suspens omniprésent, puisqu’il s’agit d’un compte à rebours, en 24 heures chrono. Dans la salle, chaque spectateur ne peut s’empêcher de se projeter sur la scène et de s’identifier à Julien et à ses parents : Et si tout cela m’arrivait ? Si c’était mon corps, si c’était mon fils, accepterais-je de la même manière ce don d’organes ? Ici la scène et la salle ne font qu’un, comme au meilleur théâtre. L’explication sans doute du silence religieux dans lequel se déroule la représentation.
3) Emmanuel Noblet signe une bonne adaptation. Evidemment il a surtout travaillé avec une paire de ciseaux pour élaguer le roman et garder le fil narratif. Mais il a su aussi préserver la moelle humaine, quantité de détails, l’esprit du livre, son rythme rapide.
4) Seul sur la scène, il est à la fois le narrateur et l’interprète de certains personnages qu’il ébauche d’un trait sûr. Parfois il répond à des voix enregistrées. Le spectateur suit aisément, il n’est jamais perdu. Sur le plateau, un surf, un drap, deux ou trois chaises, de la titraille et des images projetées, un peu de musique, trois fois rien. Mais surtout, au centre, un grand acteur qui vous embarque et vous entraine et vous laisse bouleversé lorsque les lumières se rallument.
5) Que ce texte, écrit au départ pour être imprimé, transite au final par la voix, le corps et... le cœur d’un acteur lui confère une émotion dont il semblait volontairement dépourvu. Pas de pathos dans ce roman, mais forcément un filtre humain, sensible et palpable, sur la scène.
Quelques réserves
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Encore un mot...
Le comédien Emmanuel Noblet, une révélation, s’est emparé de « Réparer les vivants », le passionnant et bouleversant roman de Maylis de Kerangal sur le don d’organes. Il en donne un seul-en-scène étincelant et haletant. Un bel acteur dans un texte qui questionne intimement les spectateurs.
Une phrase
L’équipe de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Claire, la receveuse :
« On a un cœur. Un cœur compatible. Une équipe part immédiatement prélever. Venez maintenant. La transplantation aura lieu cette nuit. Vous entrerez au bloc à minuit. »
L'auteur
Née en 1967, Maylis de Kerangal est une romancière française, originaire du Havre. Son premier livre Je marche sous un ciel de traîne est publié en 2000. Suivront notamment La Vie voyageuse, Corniche Kennedy, Naissance d’un pont…
Grand succès public et critique, son roman Réparer les vivants (2014) a reçu pas moins de dix prix littéraires ! Il est devenu un film de Katell Quillévéré, au cinéma le 2 novembre, avec Tahar Rahim, Emmanuelle Seigner et Alice Taglioni, et a déjà été adapté pour le théâtre par Sylvain Maurice avec Vincent Dissez (voir notre critique du 14/12/2015).
Le titre est une réplique empruntée à Tchekhov dans Platonov : « Il faut enterrer les morts et réparer les vivants ».
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