Perrichon voyage toujours
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Thème
En vacances à Saint Barthélémy, puis à son retour à Paris, Monsieur Perrichon, qui a fait fortune dans les revêtements de sol, et qui est aussi prétentieux que primaire, ne se rend pas compte que deux jeunes ambitieux cherchent à se le mettre dans leur poche, pour pouvoir courtiser sa fille. Lui, il a une obsession: publier un livre racontant sa vie et sa vision du monde.
Points forts
1 Aucun temps mort. On ne sent pas le temps passer.
2 Sibleyras sait admirablement créer une atmosphère de complicité avec les spectateurs, laissant bien comprendre qu'il ne se prend pas au sérieux et que son but premier est simplement de nous faire rire.
3 Une nouvelle fois, il affiche une maîtrise de vieux briscard de la comédie de boulevard, dont il applique à merveille les règles d'or: personnages hors normes, situations extravagantes, réactions allant à l'encontre du bon sens commun,etc...
Et toujours à la fin, savoir retomber sur ses pieds, avec une issue heureuse, quelle qu'en soit l'invraisemblance.
4 Mais, en même temps, et c'est ce qui fait souvent la différence entre les bonnes et les très bonnes comédies de boulevard, il sait surfer sur l'air du temps et en dénoncer, mine de rien, les travers. Et là, on est vraiment servi, avec une profession de foi aussi limitée que pontifiante sur l'alter-mondialisme et le développement durable...
5 Tout cela est mis en valeur par une mise en scène très pro, avec ce qu'il faut de second degré dans la direction d'acteurs.
6 A souligner la performance de deux d'entre eux:
- Jean-Luc Porraz, dans le rôle d'un juge d'instruction auquel une call girl du net a fait perdre la tête.
- et, surtout, dans le rôle de Perrichon, Gilles Gaston-Dreyfus: il n'a pas son pareil pour débiter à longueur de temps, avec une extrême solennité, les banalités les plus plates, ou les plus creuses, à votre choix. Un exemple, sa dédicace sur le livre d'or de l'hôtel: "Le ciel, la mer: que l'homme est minuscule devant l'imensité majuscule". Immensité écrit avec un seul m; faute d'orthographe qu'il voudra, par la suite, déguiser en "licence poétique"...
7 Gilles Gaston-Dreyfus nous offre, en prime, un grand morceau de bravoure: son récit d'un prétendu sauvetage lors d'une plongée sous-marine. Il y a du Tartarin de Tarascon dans cette interprétation là...
Quelques réserves
Il y en a un ou deux, mais ils ont si peu d'ampleur qu'ils ne méritent pas qu'on les évoque. Je vous laisse les deviner, si vous avez la bonne idée d'y aller...
Encore un mot...
Qui seront trois:
1 Gérald Sibleyras est bien modeste en s'appuyant sur Labiche dans l'énoncé du titre et la présentation de sa pièce: elle se suffit à elle-même, sans avoir besoin de béquilles même si, effectivement, Sibleyras a pu s'inspirer du maître, avec Feydeau, du théâtre de boulevard d'avant 1914.
2 Avec cette pièce, Gérald Sibleyras confirme qu'il est, sans doute, avec Eric Assous, le meilleur auteur français de comédie, aujourd'hui, qu'on les qualifie ou non de boulevard.
3 Il y a eu, depuis septembre, à l'affiche, tellement de pièces prétentieuses, frôlant le ridicule, voire la nullité, que ça fait vraiment plaisir de voir s'exprimer un humour tout simple, capable de toucher aussi bien les Normaliens que les titulaires de l'ancien BEPC ou équivalent...
Une phrase
La vie à Saint Barth:
"On se baigne, on se sèche, et une fois qu'on est sec, on se rebaigne"...
L'auteur
Gérald Sibleyras est l'une des figures les plus attachantes et les plus fécondes du théâtre français d'aujourd'hui, à la fois en tant qu'adaptateur ("Des Fleurs pour Algernon", c'est lui) et en tant q'auteur de comédies pleines de subtilité et de finesse, comme ces deux pièces qu'il a écrites avec Jean Dell, "Un Petit jeu sans conséquence" et "Une heure et demie plus tard".
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