Opus Coeur
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Thème
A Gloucester, petit port du Massachusetts, un vieil homme à l’approche de la mort recrute une femme de ménage et garde-malade. Lui, était professeur de musicologie, érudit. C'est un célibataire endurci. Elle, jeune veuve, amère, doit travailler; sa vie n’est qu’une succession d’échecs. Cela se passe mal entre eux et les reproches sourdent en permanence et à tout propos. Ils se connaissent en fait, mais ne se l’avouent pas : leurs vies se sont croisées à de multiples reprises. Petit à petit, ils s’apprivoisent, les fils se dénouent…et les larmes coulent.
Points forts
- Les acteurs donnent un poids et une vérité incroyable au texte. La performance de Marcel Maréchal vaut le déplacement : on le voit, vieux, une vieillesse sans fard presque caricaturale, avec le visage lourd et les poches sous les yeux, et on craint pour lui que, tel Molière, il ne meurt vraiment en scène ! Son plaisir à jouer, son authenticité dans le personnage du vieux bougon, acariâtre et tendre à la fois, occupe toute la scène.
Nathalie Newman existe en face de lui, c’est une prouesse. Et si l’actrice s’installe dans son personnage avec quelque brusquerie au départ, c’est tout en finesse qu’elle poursuit, pour finir dans la tendresse.
- Le scénario est bien construit autour de deux destins qui se croisent et se décroisent par tous les bouts. Les malentendus entre eux sont permanents. Peu à peu, on retrouve le fil de deux vies que tout semblait séparer.
- Le temps qui passe est parfaitement rendu par le jeu des acteurs qui entrent et sortent fréquemment de l’unique décor – l’intérieur du professeur, avec son fauteuil, sa musique et sa cuisine. Des détails signalent chaque moment du quotidien, chaque saison : la robe de chambre du professeur, le repassage, les confitures sur la table de la cuisine,…
- Le coup de la radio locale! C'est un peu un troisième personnage qui rythme la pièce et la vie du professeur. Elle nous fait apercevoir un peu de l'extérieur: le froid d'un bord de mer venteux. Sa programmation, exclusivement classique, conforte le vieux musicologue. Mais, comme lui, l'animateur est vieux, seul et mal aimé; malgré ses appels au secours, il va s'éteindre et sa radio classique aussi.
- Caroline Darnay signe une mise en scène sobre et efficace.
Quelques réserves
Je n'en vois pas
Encore un mot...
Une fois de plus, la rencontre de deux solitudes ! Elles s’affrontent durement, presque méchamment, avant de découvrir tous les liens cachés que leurs vies recèlent. L’égoïsme, la prétention de l’un, l’échec et le mal être de l’autre les ont poussés à l’isolement. Autant de temps perdus pour la confiance, la reconnaissance, la transmission ou l’affection qui ne sont redécouvertes qu’au dernier moment, presque trop tard. Une leçon de vie?
Une phrase
« Si l’homme que je suis rencontrait l’homme que j’étais, il y aurait une belle bagarre ! ».
C’est bien évidemment une parole énoncée par le vieux professeur à la fin du spectacle.
L'auteur
Israël Horowitz est un dramaturge américain, né en 1939, dont les nombreuses oeuvres, plus de soixante-dix, sont jouées dans le monde entier (« John a disparu », « Trois semaines après le paradis », « Très chère Mathilde »…). Son ton est incisif, à la fois tendre et cruel; et son humour, noir. « Israël Horovitz est à la fois réaliste et sentimental. Je vous laisse donc imaginer à quel point il peut être féroce. » a dit de lui Eugène Ionesco.
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