Miracle en Alabama

Le pouvoir miraculeux des mots
De
William Gibson
Mise en scène
Pierre Val assistée de Sonia Sariel
Avec
Valérie Alane, Julien Crampon, Stéphanie Hédin, Marie-Christine Robert, Pierre Val, et en alternance pour le rôle d’Helen, Lillas Mekki ou Clara Brice
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Théâtre La Bruyère
5, rue La Bruyère
75009
Paris
0148747699
Du mardi au samedi à 21h, le samedi à 14h30.

Thème

C’est l'histoire vraie d’Helen Keller, la fille d’une famille sudiste, devenue sourde, muette et aveugle à l’âge de deux ans. Malgré les efforts désespérés mais souvent maladroits de ses parents, elle est devenue une sorte d’enfant sauvage, vivant comme une espèce de petit animal capricieux et coléreux entre son demi-frère et sa petite soeur. Avant de se résoudre à la mettre dans un asile, sa mère insiste pour faire venir une institutrice de Boston. Celle-ci comprend et veut faire comprendre aux parents que la jeune fille doit apprendre le langage: c’est par là que passe son éducation. Et elle doit mettre les mots en rapport avec les choses. Helen doit intégrer des règles, dures au premier abord, mais celles-ci vont lui permettre de cohabiter avec les autres en constituant une vraie famille. Et la gouvernante, Annie Sullivan, une nordiste, finit par gagner son pari: par la mémorisation de signes de ses mains, Helen met en relation les mots avec les objets et elle prononce son premier mot, « eau ».

Points forts

1) Le plus remarquable est le jeu incroyable du personnage d’Helen (le soir où j'y étais, c'était Clara Brice qui jouait le rôle): elle exprime ses sentiments par des gestes, des grimaces, tout est saccadé et inattendu chez elle, elle se traîne par terre, elle mord et se montre d'une incroyable brutalité. Et elle fait apparaître une lueur d’esprit, qui grandit peu à peu.

2) La gouvernante sait traduire aussi une volonté de fer en même temps qu’une profonde souffrance.

3) Les parents jouent tout en nuances: un mélange d’obstination et de véritable amour chez le père, une tendresse désespérée chez la mère.

4) Au-delà du langage, c’est la question de l’éducation et des difficultés de sa mise en oeuvre dans une famille qui est peinte ici.

5) La peinture d’une famille sudiste se dégage par petites touches. La mise en scène, avec cette table qui symbolise la famille, accentue cet aspect.

Quelques réserves

Ils sont peu nombreux dans cette très bonne pièce.

1) Peut-être la mise en scène est-elle un peu simple, dans la manière de faire alterner le salon familial et la petite maison voisine dans laquelle la gouvernante éduque Helen. Mais c’est aussi un moyen de souligner les deux positions sur l’éducation.

2) Le jeu de James, le fils, m’a semblé parfois un peu excessif, mais c’est aussi le propre de la jeunesse...

Encore un mot...

Sur un sujet austère, c’est une réflexion passionnante sur le rôle du langage dans la construction de la personnalité, qui tient le spectateur en haleine tout au long de la pièce: on espère que la gouvernante va réussir à sortir Helen de son état sauvage pour en faire une personne à part entière. Et l’humour n’est pas absent de cette quête du langage.

L'auteur

William Gibson, né en 1948 à Conway, en Caroline du Sud, est romancier et nouvelliste. C’est un écrivain américain de science-fiction et l’un des leaders du mouvement cyberpunk. Entre d’autres nombreuses oeuves, il a écrit «"Neuromancien"» en 1984  et « La Machine à différences en 1990. Au départ, « Miracle en Alabama » est  un roman, adapté au cinéma et au théâtre.
 

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