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Thème
Dans un palace à Munich, Richard, un journaliste américain, ancien combattant, et son cameraman d’origine juive, Franck, rencontrent la veuve d’Amon Göth, le commandant du camp de concentration de Plaszow, d’où ont été sauvés les déportés de la liste de Schindler.
Qui est cette femme : une criminelle, une victime, un monstre ? Richard et Franck se divisent sur la question.
Après quarante ans d’anonymat, Irène Kalder va livrer sa vérité.
Points forts
Une mise en scène minimaliste, qui laisse toute la place aux comédiens, et propose une composition glaçante de Caroline Darnay
- Le spectacle parfait pour une réflexion sur le “devoir de mémoire“ aux jeunes générations, mais pas seulement, puisque Caroline Darnay s’approprie le paradoxe posé par Diderot dans une de ces comédies - « Est-il bon, est-il méchant ? » - l’incise, le décortique et l’analyse autour de ce personnage trouble d’Irène Kalder, compagne du « boucher d’Hitler. »
Quelques réserves
Pas vu.
Encore un mot...
Surnommée « l’ange de Plaszow », celle qui vécut à côté du camp rappelle par bien des aspects le personnage de la femme de Rudolf Höss dans La zone d’intérêt. La question du déni est ici posée avec force, subtilité, sans concession.
Caroline Darnay nous rend tangibles diverses problématiques, dans une interprétation remarquable qui nous laisse circonspect, parfois gêné, mais qui résonnent dans notre présent saturé de conflits :
jusqu’où l’amour peut-il conduire, justifier, pardonner, accepter ?
la guerre peut-elle tout justifier ?
qu’est-ce qui fait de vous un bourreau, un héros de guerre, ou encore un témoin collatéral ?
Une phrase
Richard : « Tout le monde va parler de Schindler ! Il a sauvé plus d’un millier de personnes, il est reconnu comme héros par le peuple juif, ça fait des années que Spielberg essaie de faire un film sur lui, il n’a pas besoin de nous ! On a fait notre boulot au sujet de Schindler ! Maintenant, il faut raconter l’histoire de cette femme !
Franck : Pourquoi ?
Richard : Parce qu’elle est là aujourd’hui ! Parce qu’elle a une vision unique de la situation… Et parce qu’elle a sauvé des vies, elle aussi !
Franck : Arrête, tu es dingue ! Tu ne peux pas les comparer ! (Après un coup d’œil vers l’endroit où est Irène) Ne me dis pas que tu crois ses salades sur “l’Ange de Plaszow“ !
Richard : Tu n’y crois pas, toi ? Tout ce qu’elle a dit est confirmé par les témoignages des survivants. Elle n’a pas essayé de mentir, elle a juste répondu à nos questions. Tout est vrai, tout correspond, elle a aidé des gens là-bas ; elle vivait avec un des plus grands criminels du régime nazi et elle a réellement aidé des gens !
Franck : Elle ne vivait pas avec lui en faisant de la résistance par derrière : elle était dingue de ce type ! Elle recevait des officiers SS chez elle tous les jours.
Richard : Ce n’est pas ce qu’elle dit.
[Pendant qu’il parle, Irène se rapproche d’eux sans bruit et les écoute]
Franck : C’est des salades, ce qu’elle dit ! »
[…]
Richard : « Quelle était votre opinion personnelle sur les Juifs, quand vous viviez à la villa avec… Mony ?
Irène : J’étais triste pour eux. Je leur disais “J’aimerais que ce soit différent. J’aimerais que vous soyez tous libres. Mais je ne peux rien faire !“ Qu’est-ce que j’aurais pu faire ?
Richard : À quel moment avez-vous commencé à les aider quand même ? (Irène ne répond pas) Qu’est-ce qui vous a décidée à agir ? C’était une personne ? Un événement particulier ?...
Irène, réfléchit un moment puis se lève : Ce n’est pas comme ça que ça se passe. Vous en faites quelque chose d’héroïque, comme si un jour on se réveille et on se dit “Aujourd’hui, je vais aider !“ ... Ce n’est pas comme ça.
Richard : Comment est-ce ? D’aider des Juifs ?
Irène : On n’aide pas des Juifs. On aide des gens. (Un temps) Un jour, le docteur Gross vient à la maison pour soigner Mony, et je lui offre un café, et puis les frères Rösner viennent un soir jouer de la musique, ils sont très maigres alors je leur dis d’aller manger quelque chose à la cuisine, et puis Helen demande de mettre ses sœurs sur la liste… j’ai peur au début, je ne veux pas mais elle insiste alors je le fais… »
[…]
Richard : Et quand Göth a battu Liesiek, vous l’avez protégé et pris le coup à sa place. Vous avez pris de plus en plus de risques.
Irène, secouant la tête tristement : Cette époque… quelle folie… (Elle retourne s’asseoir sur le fauteuil). »
L'auteur
Comédienne, metteuse en scène, autrice et chorégraphe, Caroline Darnay a été formée à la danse au Studio Paris Centre à Paris, ainsi qu’au Broadway Dance Center et à l’Alvin Ailey’s American Dance Center à New York. Au théâtre, elle est l’élève de Jean-Laurent Cochet, chez qui elle enseigne depuis 2010.
Elle a joué et/ou mis en scène des pièces de Molière, Shakespeare, Ionesco, Marivaux, Dumas père et fils, Horovitz, Maupassant et Florence Camoin. Caroline Darnay a également interprété plusieurs rôles à la télévision, travaillant au cinéma avec Olivier Assayas, Mario Monicelli et Lars Blumers.
- Elle a mis en scène Alexis Moncorgé dans Amok (Molière de la Révélation Masculine), qu’elle retrouve en 2023 dans Eldorado 1528
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