L’Ombre de Stella
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Thème
Tandis que la grande Stella Marco, au soir de sa vie, se momifie dans la chambre à côté, Mylène Janvier, sa secrétaire particulière et amie de toujours, enregistre au salon ses souvenirs sur magnétophone, à la demande d’un éditeur qui compte publier une biographie de l’actrice mythique des années quarante et suivantes.
Stimulée par une bouteille de champagne dont le niveau descend assez vite – quand on a passé l’âge du sexe, les bulles, dit-elle, ça remplace –, Mylène, entre humour et dépit, se dévoile : on lui a volé sa vie. Sa carrière de comédienne, ses ambitions, ses amours se sont dissipées dans l’ombre de la flamboyante et ambitieuse Stella.
Points forts
- Pierre Barillet dresse un portrait sensible de cette femme manipulée mais lucide et drôle, partagée entre l’amour et la haine de l’enfant gâtée qui la domine. Voilà qui est déjà bien vu. Mais ce qui rajoute du sel à l’affaire, c’est le récit éclairant que fait Mylène du milieu du cinéma et du théâtre pendant les années d’Occupation, et ce qu’il en advint après la Libération. Dans les compromissions petites et grandes, dans les flirts déplacés, dans l’ambiguïté des attitudes, on reconnaitra en Stella quelques actrices de l’époque : Corinne Luchaire, Marie Bell, Alice Cocéa…
- Et puis, il y a le texte, évidemment, remarquablement dit par Denis d’Arcangelo ! On se régale à chaque tirade de ce monologue magistral, où le bon mot, la pointe juste, le portrait enlevé se succèdent à un rythme effréné. Créateur de l’inénarrable Madame Raymonde, l’acteur travesti est fait pour le rôle. Jacqueline Maillan – paix à son âme – n’aurait pas fait mieux.
Quelques réserves
Le coup de théâtre final, dont on ne vous dira rien, est desservi par une bande son qui, à cet instant crucial, devient cacophonique. Surprenant car, par ailleurs, la mise en scène de Thierry Harcourt, sobre, colle à l’action.
Encore un mot...
A ceux qui se diraient “Bah, le vaudeville, c’est ringard”, hé bien “l’Ombre de Stella” les détrompera sûrement.
Une phrase
« Au verso de la photo, il y avait écrit : “Typhon sur Macao, 1937, Stella Marco” et un point d’interrogation. C’était moi, le point d’interrogation. »
L'auteur
On ne présente plus Pierre Barillet qui, avec Jean-Pierre Grédy, régna sur le théâtre de boulevard parisien quelque quarante années durant ! Le tandem Barillet et Grédy offrit leurs meilleurs rôles à des monstres sacrés comme Sophie Desmarets et Jacqueline Maillan.
Barillet a écrit seul “l’Ombre de Stella”, d’où, peut-être, le ton parfois grave de la pièce, un peu inattendu chez ce maître de la comédie de divertissement.
Sur la période de l’Occupation et les années d’après-guerre, l’auteur sait de quoi il parle – il avait 20 ans au début des années 1940. Profitez de l’occasion pour relire, sur le sujet, son “Quatre années sans relâche” (Fallois, 2001), ça vous changera du prêt-à-penser facile sur ce sujet délicat.
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