L’Ingénu
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Thème
« L’Ingénu » est un conte philosophique, publié en 1767, adapté pour la scène. Le héros, un jeune Huron, débarque en Basse-Bretagne et se révèle être le neveu du Prieur de Notre Dame et de sa sœur, Mademoiselle de Kerkabon. Il va être baptisé et aura pour marraine Mademoiselle de Saint Yves, dont il tombe follement amoureux, un sentiment qu’elle partage. Il est adulé par la bonne société locale, il découvre avec étonnement les mœurs, les habitudes et les règles de la société française, ce qui permet à Voltaire de critiquer les institutions et la manière de vivre et de se comporter des Français.
Après de folles aventures, il se retrouve à Versailles où il se heurte à la Cour et au Roi, en cherchant à obtenir le droit d’épouser sa marraine, Mademoiselle de Saint-Yves. Sa franchise le conduit à La Bastille, où il partage la cellule d’un janséniste, qui lui apprend la philosophie, la littérature et les sciences. Mademoiselle Saint-Yves parvient à le délivrer, au prix de sa vertu. Ils retournent tous en Basse-Bretagne, mais étouffée par le remords, elle meurt, au grand désespoir de ses proches. Et le Huron parvient, tant bien que mal, à surmonter sa tristesse par le commandement d’un régiment.
Points forts
* C’est une magnifique adaptation d’un conte philosophique : avec quelques coupures nécessaires pour la transposition au théâtre, elle respecte la belle langue du XVIIIème siècle et préserve le sens de l’œuvre.
* Le jeu de l’acteur, Thomas Willaime, est remarquable : seul en scène pendant 1h15, il varie le ton, éclaire le texte par des mimiques adaptées, il endosse le rôle de tous les personnages avec un sens incroyable du mime ; c’est un vrai caméléon !
* La mise en scène, très simple, sur une scène vide autour d’une chaise, fait apparaître les différents personnages dans des positions diverses.
* Le héros, habillé d’une chemise blanche au début, et noire à la fin, à partir de son séjour à la Bastille, entraîne le spectateur dans ses aventures incroyables en les rendant crédibles.
* La musique marque le rythme de l’histoire avec ses moments de calme et d’accélérations.
Quelques réserves
Je vois bien peu de points faibles dans ce texte magnifique. La seule remarque que l’on pourrait faire est qu’il faut accepter l’adaptation de ce conte en pièce de théâtre pour l’apprécier. J’ai été frappée de voir une classe de 3ème, qui sans doute ne comprenait pas toutes les subtilités du texte, écouter l’acteur dans un silence impressionnant et à la fin applaudir à tout rompre.
Encore un mot...
C’est un spectacle remarquable, c’est un enchantement de l’esprit, un regard ironique et
cruel sur la société, la Cour, le Roi, la bourgeoisie de province, sa bêtise et son hypocrisie, la religion, le jansénisme, l’intolérance... Le procédé littéraire cher au XVIIème siècle de faire critiquer la société, les institutions, la religion…par un naïf est efficace ici encore : Montesquieu l’avait déjà utilisé avec succès dans les Lettres Persanes, avec ses deux Persans qui découvrent la France et s’étonnent de tout ce qu’ils voient. C’est aussi un moyen d’éviter la censure.
Une phrase
« Quel est donc cet homme charmant qui favorise avec tant de bonté les garçons et les filles dans leurs amours ? Je veux aller lui parler tout à l’heure.
On lui expliqua ce que c’était que le pape. Et l’ingénu fut encore plus étonné qu’auparavant. Il n’y a pas un mot de tout cela dans votre livre, mon cher oncle. J’ai voyagé, je connais la mer. Nous sommes ici sur la côte de l’océan. Et je quitterai Mademoiselle de Saint Yves pour demander la permission de l’aimer à un homme qui demeure vers la Méditerranée, à quatre cents lieues d’ici, et dont je n’entends point la langue ? Cela est d’un ridicule incompréhensible.»
L'auteur
Voltaire (1694-1778), grand philosophe du XVIIIème siècle, est l’auteur de nombreuses œuvres de genres variés : des pièces de théâtre comme Zaïre, une épopée (La Henriade), des contes, comme Candide, Zadig et L’Ingénu (1767), des essais historiques (Le siècle de Louis XIV), des œuvres philosophiques et critiques (Lettres Philosophiques), dictionnaire philosophique). Il mena aussi des campagnes contre l’intolérance (Calas, Sirven…). Il combattit contre l’absolutisme, la religion, l’intolérance, comme L’Ingénu et se retrouva à la Bastille, comme son héros.
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