Les méritants
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Thème
- “L’apocalypse zombie“ a eu lieu et un nouvel ordre social est en train de s’inventer. La société est dès lors coupée en deux, avec d’un côté les survivants retranchés derrière les barricades, et de l’autre les “zombies“, les « sous-vivants », peut-être nos doubles monstrueux. Les premiers sont en haut de l’échelle sociale, alors que la cohorte des seconds pédale pour éclairer les premiers.
- Jusqu’au jour où le zombie Clairvius parvient à passer de l’autre côté, à intégrer le Comité Central dirigé par les humains. Mais si un zombie réussit, gagnant ses galons de cadre sup’, qu’est ce qui empêche les autres d’y arriver ? Les zombies méritants sont-ils les bienvenus, ou bien l’ascenseur social serait-il légèrement enrayé ?
Points forts
- L’originalité du propos : une fois de plus, la plume de Julien Guyomard frappe juste. Dans cette fable aux allures allégoriques et fantastiques, il s’empare d’un sujet de société grave pour le questionner et s’en moquer avec intelligence et l’analyser avec une précision chirurgicale.
- Ce propos politique est traité sous le prisme de la farce, avec un rythme enlevé, un jeu jubilatoire de la part de tous les comédiens.
- Dans une mise en scène et une direction d’acteurs rigoureuse, nous voilà plongés au cœur de notre société, qui exalte la réussite sociale sous couvert d’égalité des chances et qui pourtant renvoie chacun à ses propres limites.
- Un décor ingénieux et des effets spéciaux “aux petits oignons“.
Quelques réserves
Je n’en ai pas trouvé.
Encore un mot...
- La méritocratie qui envahit toutes les sphères de notre société est mise à mal dans cette dystopie délirante, traitée avec humour et férocité et qui nous pose les questions suivantes : qu’est-ce que l’égalité du point de vue de nos origines sociales ? Qu’est-ce qui rend légitime notre système et notre organisation du travail ?
- A travers le rire, nous voici amenés à grincer des dents, et à éprouver parfois un sentiment de malaise devant nos idées reçues douillettement installé dans notre petit confort. Bref, on ne ressort pas indemne de ce spectacle et c’est la toute sa force. Les méritants a l’énergie de la comédie, l’inconfort du drame, la folie de la farce et la puissance d’un théâtre engagé.
- La question qui se pose à l’issue du spectacle est bien celle de savoir si nous sommes nous aussi des « méritants » ! Ayons donc faim de justice et d’équité, comme ces « zombies » qui nous ressemblent beaucoup trop, et soyons vigilants !
- Courez dévorer ce spectacle, vous en ressortirez rassasiés d’humanité !
Une phrase
MARIE : « Je les voyais pas comme ça…
CHANTAL : Et donc, ils parlent ?
RAIMI : Ah mais oui, c’est vraiment comme si…
SAM : Quand on les regarde comme ça, on pourrait se dire que… Alors qu’en fait, ils sont très…
JEAN : Même de près… c’est troublant.
CHANTAL : Pas l’air agressif en tout cas.
SAM : Pas du tout ! Des crèmes !
RAIMI : Faudrait faire une sorte d’inventaire.
MARIE : … De recensement.
RAIMI : Oui voilà. Pour s’y retrouver…
SAM : Surtout s’ils doivent emménager, ça fait du monde…
CHARLES : Les morts bouffent les vivants, vous pensez pas que ça va poser un problème de mixité ? »
[…]
CLAIRVIUS : « Bonjour, je suis ravi d’être avec vous aujourd’hui. Si nous vous avons sollicités, c’est que depuis mon entrée au comité, j’œuvre pour une cause qui me tient particulièrement à cœur, celle des zombis. Oui je dis les zombies car c’est avec ce mot que oous avons été accueillis. Et c’est la réalité que nous avons vécue. Nous nous sommes mis au travail. Nous avons enduré. Puis nous avons fini par souffrir de ce mot. De ce qu’il transportait avec lui . Le zombie, c’est le sous-vivants. Celui qui met sa force de travail au service de celui qui le commande. Ce mot nous a tous conduits vers une impasse.(…) ce cri de détresse nous l’avons entendu. Pour nous il est essentiel que chaque citoyen , quel qu’il soit, trouve sa place. (…) Ces temps-là sont révolus. Nous avons décidé , en concertation avec le comité, de rayer définitivement ces mots de notre vocabulaire. (…) Nous sommes le fruit de notre effort, nous sommes c que nous voudrons être, ce que nous méritons de devenir. Nous sommes des méritants. »
L'auteur
- Auteur et metteur en scène, Julien Guyomard se forme au Conservatoire du 5ème arrondissement de Paris avec Bruno Wacrenier. Il crée dans la foulée sa compagnie, Scena Nostra, pour mettre en scène ses propres textes. Il écrit Car ceci est mon vin, les Egéries et l’Ordalie des petites gens, pièce éditée dans le recueil Prises d’auteur à l’Avant-scène Théâtre.
- Parallèlement, Guyomard initie des projets avec des enfants atteints de handicaps, des jeunes de quartiers populaires ou encore des détenus en établissement pénitentiaire. Son travail se développe alors hors les murs des théâtres (missions locales, accueil de jour pour SDF, maisons d’arrêt, collèges et lycées…).
- En 2012, il écrit et crée Naissance. En 2017, il est associé à la Comédie de Valence et au théâtre L’Avant-Seine de Colombes. Il crée alors Syndrome U, pièce d’anticipation, puis Les brèves du futur, fictions courtes d’anticipation.
- Avec Elodie Vom Hofe, codirectrice de la compagnie, ils inventent le Festival Immersion, consistant à commander à un groupe d’artistes l’écriture et la créations de fictions courtes, inspirées d’expériences immersives auprès d’habitants d’un territoire donné.
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