Le silence de Molière
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Thème
La vie d'Esprit-Madeleine Poquelin, fille unique de Molière, demeure discrète et mystérieuse. Pourquoi n'a-t-elle pas embrassé la carrière du théâtre ? Pourquoi ne l'entend-t-on pas défendre publiquement son père contre les diffamations qui le poursuivent après sa mort ? Interrogée par un jeune acteur, Esprit-Madeleine nous livre ses souvenirs de petite fille écrasée par l'activité de la troupe, sa douleur de voir son père se tuer à la tâche, sa frustration de ne ressentir aucun goût pour un théâtre qui détruit ou corrompt les siens, son aspiration à une vie calme et réglée... Plus spectatrice qu'actrice, elle se définit comme un personnage non réalisé.
Points forts
- Un texte très bien écrit, qui retrace avec délicatesse le destin d'une femme très peu connue, effeuillant un à un les secrets de sa vie de recluse. On découvre aussi le Molière bien réel, un acharné du travail, persécuté, souffrant, malheureux en ménage, et aveugle au mal être de sa fille.
- La comédienne Ariane Ascaride est réellement pénétrée par son personnage, et lui confère un subtil mélange de gravité, d'amertume et d'intégrité. Elle est toujours juste, digne dans sa souffrance, jamais ridicule.
- Le décor épuré, tout en ombre et lumière, servi par une mise en scène sobre, crée parfois des tableaux d'une grande beauté.
Quelques réserves
- Cette pièce sombre et psychologique est aux antipodes de l’atmosphère des pièces de Molière : il ne faut pas espérer y trouver la verve, le divertissement et la critique sociale qui imprègne son œuvre.
- Entre la résignation agressive et l’éclat de la souffrance, il y a peu de modulation dans le ton général de la pièce, et ce malgré le dialogue conflictuel mis en place pour faire parler le personnage d’Esprit-Madeleine. Si on avance chronologiquement, on ne sort jamais de cette gravité quasi monacale, sous-tendue par la colère, qui caractérise le personnage.
Encore un mot...
La confession d’une héritière oubliée par l’Histoire : la fille unique de Molière, qui a mystérieusement tourné le dos au théâtre. Entre souvenirs poignants et constat d’échec, elle exprime son incapacité à forger sa propre vie, qui la tient à l’écart du monde.
Le spectacle est servi par un beau texte et une comédienne habitée mais il reste, dans cette atmosphère monacale, assez monocorde.
Une phrase
- « Je me rendis compte que le théâtre comique était en substance essentiellement cruel et abjecte »
- « Je suis un personnage non réalisé. »
L'auteur
Giovanni Macchia est un écrivain et essayiste italien du XXe siècle, spécialiste de la littérature française, qu'il enseigna longtemps en Italie. Réputé pour ses analyses d'une grande finesse, il a notamment publié sur Proust, Baudelaire, et sur les écrivains révolutionnaires. En 2000, un an avant sa mort, l'Académie française lui a décerné le Grand Prix de la Francophonie.
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