Le problème Lapin
Un lapin réjouissant et éveilleur
De
Frédéric Ferrer
Avec
Frédéric Ferrer et Hélène Schwartz
Notre recommandation
5/5
Infos & réservation
Théâtre du Rond-Point
2 bis, avenue Franklin D. Roosevelt
75008
Paris
01 44 95 98 21
Jusqu’au 27 janvier 2024. Du mardi au vendredi, 19h30 - Samedi, 18h30
7 et 8 février 2024 : Centre Culturel André Malraux – Scène nationale / Vandœuvre-lès-Nancy (54) 19 avril 2024 : Le Manège, Scène nationale transfrontalière / Maubeuge (59) 16 mai 2024 : Les Quinconces L’espal – Scène nationale / Le Mans (72)
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Thème
- C’est une conférence consacrée à l’oryctolagus cuniculus, cet animal qui « déborde, divise, hystérise.» Comme son objet, le propos chemine sans plan, au gré des galeries d’un terrier de questions, et déborde sans arrêt du cadre des questions auxquelles il est censé répondre. • Prononcée à deux avec la complicité malicieuse d’Hélène Schwartz, la conférence fournit des réponses rapides et des développements plus ou moins digressifs à une trentaine de questions – soit deux minutes par question !
- On apprend ainsi une foultitude de choses anecdotiques ou fondamentales, comme par exemple que :
- le lapin a six millions d’années ;
- cette espèce invasive (et qui ronge tout le temps) n’aime pas les carottes, mais a détruit de nombreux écosystèmes (pauvre chou des îles Kerguelen…) ;
- il peut s’accoupler vingt fois en trente minutes !
- il possède trois paires d’incisives (dont l’une ne sert à rien !)
- - il est « à l’origine des mathématiques modernes » ;
- Ou encore qu’un de ses représentants oublié de l’histoire a été envoyé dans l’espace en 1959 par les Russes et enfin que, devenu « l’ennemi de notre espèce », il est victime, un peu partout dans le monde, de véritables campagnes d’extermination qui s’apparentent à une guerre biologique.
Points forts
- Mêlant érudition, humour et fantaisie le spectacle bénéficie d’une mise en scène inventive, qui voit la scène initiale de la conférence se décomposer progressivement au gré de digressions hilarantes : l’invasion de lapins synthétiques et la projection d’images déconcertantes rendent palpables les nombreux débordements du lapin.
- Les deux protagonistes se révèlent être d’excellents comédiens, caricaturant à peine le fonctionnement des conférences académiques, et donnant un exemple réjouissant de ce que peut-être une conférence gesticulée.
Quelques réserves
Aucune, sauf si l’on ne s’intéresse ni au lapin, ni à l’avenir du vivant sur terre…
Encore un mot...
- Le lapin, oryctolagus cuniculus, joue ici à la fois le rôle de signe - celui de la mauvaise santé de l’écosystème Terre - et le rôle de marqueur - celui de l’appauvrissement du vivant et de l’extinction de masse qui est en cours, en montrant le rôle prépondérant joué par l’humain dans cette entreprise de perturbation irréversible. Il est une entrée inattendue et cocasse pour examiner les manières humaines de conquérir la planète et interroger ses effets.
- En faisant l’histoire des origines et de l’avenir du lapin commun ou lapin de garenne, les deux compères invitent aussi à « penser lapin », en écho aux travaux récents des anthropologues, des écologues et même des historiens, qui se penchent désormais sur l’histoire des vivants non humains et tâchent de comprendre ce que peut vouloir dire “habiter“ pour un oiseau ou pour un poulpe.
- La restitution de cette (en)quête ne cache pas ses racines, celles d’une démarche scientifique dont elle se joue en mettant en scène la fausse rivalité des conférenciers, leur manière concurrentielle d’occuper l’espace visuel et sonore pour parler de ce qui leur tient à cœur.
Une phrase
- « Tous les lapins du monde courent plus vite qu’Usan Bolt (…) Si on invitait les non humains aux JO, on ne gagnerait jamais. »
L'auteur
• Avec ce septième volet, l’ex-géographe, metteur en scène et comédien, Frédéric Ferrer complète son Atlas de l’anthropocène - cycle de vraies-fausses conférences - entamé en 2010.
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