LE MENTEUR
Durée : 1h45
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Thème
- Roueries, duplicité, mensonges à tout va. Père, ami, valet, promises, tous et toutes sont victimes de cet emberlificoteur de Dorante, qui souffre plus d’une pathologie incurable que de la pure méchanceté. • Dorante ? Ce jeune dandy à la taille bien prise et plutôt bien de sa personne débarque de sa province où il poursuivait ses études, bien résolu à profiter des plaisirs de la capitale. Suivi de Cliton, son fidèle valet, notre galant rencontre deux jeunes femmes peu farouches dans les jardins des Tuileries. Il s’empresse de vouloir séduire les coquettes, Clarice et Lucrèce. Mais à laquelle s’adresse-t-il vraiment quand il raconte ses faits d’arme imaginaires, puis en feint d’organiser des fêtes somptueuses et extravagantes pour leurs beaux yeux ?
- Or voici que le père de Dorante veut le marier. Que nenni ! Notre Don Juan caresse d’autres projets, et préfère papillonner en embrouillant tout le monde. Entretemps, Dorante avait dû livrer un duel à son compagnon d’université, Alcippe, rival malheureux, qui lui dispute le cœur de la belle Clarice pour se dégager d’une situation amoureuse compromettante. • D’où quiproquos, confusions, engrenages inextricables, imbroglios diaboliques sur un ton de légèreté, de liberté retrouvée et d’insouciance (on est, licence historique et adaptation“ baroque“ du metteur en scène, juste après la Révolution, sous l’ère approximative d’un Directoire libéral, voire enclin au libertinage).
Points forts
- La narration par Dorante, joignant le geste à la parole, de ses fausses gloires militaires constitue un grand moment épique, digne de Matamore et de Cyrano de Bergerac • La magie du verbe et l’écriture virtuose: l’élégance et le rythme d’alexandrins ciselés qui font mouche tant dans la bouche de Dorante, perpétuel énervé, que de Géronte son très digne père toujours bienveillant .
- La prestation magistrale d’Alexandre Bierry dans la peau d’un Dorante à la fois goguenard et survolté, étonnant dans sa gestuelle et ses grimaces, et dont la ridicule grandiloquence touche au sublime. Son infortuné ami, Alcippe, est quant à lui empreint d’une poésie touchante tant sa naïveté fait peine à voir et à entendre. Leurs jeux pourraient faire penser avec émotion à une certaine confrontation entre un Fabrice Lucchini humilié et un Lambert Wilson arrogant et sûr de lui se disputant les rôles dans Le Misanthrope (scène du film Alceste à bicyclette).
- Géronte, le père bienveillant joué par Serge Noël, désespéré par l’inconstance de son fils, assure une présence remarquable. On en vient à penser à certains passages du Cid.
Quelques réserves
• Parfois le spectateur s’y perd aussi, notamment quand les deux coquettes échangent leurs rôles et leurs aspects apparaissant à la fenêtre dans une sorte de clair- obscur, à demi cachées, qui par son éventail, qui par un chapeau. Ajoutant à la confusion une servante vient s’intercaler et passe des messages. À son tour Dorante est berné…et nous aussi ; c’est un tout petit peu laborieux et longuet.
Encore un mot...
- On l’aura compris, Marion Bierry a voulu, avec ce Menteur, moderniser, voire dépoussiérer par petites touches la comédie de Corneille. Un exemple parmi d’autres : l’insertion de temps en temps de chansonnettes aux refrains bien connus des années 1950, poussées par les rôles titres eux-mêmes, ainsi Mon cœur fait boum de Charles Trenet, qui fonctionne parfaitement ici.
- Mais rendons à Corneille ce qui lui appartient : avec ce Menteur, écrit après Le Cid et dans la foulée de L’Illusion comique, l’auteur des grandes tragédies classiques du grand siècle montre qu’il possède indubitablement la fibre comique. Du reste, n’a-t-on pas avancé qu’il avait pu être lui-même le Ghostwriter (pour écrire comme il convient aujourd’hui !) d’un certain Jean Baptiste Poquelin ? Il l’a en tout cas fortement inspiré avec cette pièce, et montre une aptitude à la comédie qui nourrit un légitime soupçon... Il est tout aussi vrai que Le Menteur (1644) reprend quelques envolées du Cid (1637).
Une phrase
Dorante à Cliton [Au début dans le jardin des Tuileries] : « Mais puisque nous voici devant les Tuileries / le pays du beau monde et des galanteries / Dis-moi, me trouves-tu bien fait en cavalier / ne vois-tu rien en moi qui sente l’écolier ? »
L'auteur
On ne présente plus Pierre Corneille (1606-1684), dit “le Grand Corneille“, auteur d’une trentaine de tragédies, sans compter quelques comédies, dont Le Menteur. L’hôte du théâtre du Marais (de l’époque), grand concurrent de l’illustre et monopolistique Hôtel de Bourgogne, y créa Le Cid, Cinna, Polyeucte, Horace, l’Illusion comique et Le Menteur parmi d’autres. Toutes des pièces à succès, sauf peut-être sa dernière, Tite et Bérénice, que l’on compara à son désavantage à la Bérénice de Jean Racine, lequel prit la relève. Le thème de l’honneur et du devoir confrontés aux feux de l’amour plonge le héros de Corneille dans le fameux dilemme cornélien.
Commentaires
Je viens de voir ce spectacle, le rôle principal est joué avec beaucoup d'énergie, quelques idées de mise en scène comme un tableau animé par contre le côté "style révolution des costumes ne m'a pas séduit" et globalement la pièce de Corneille reste une tragi-comédie un peu confuse.
Excellent ! Rythmé et joyeux ! À ne pas manquer !!!!
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