Le CV de Dieu
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Thème
« Dieu passe un entretien d’embauche » : l’évènement est inédit. Avec audace et dérision, la pièce revisite le thème du procès intenté à « Dieu » pour les innombrables incohérences du monde. Là où tant de fois, « les hommes se sont rêvés à la place de Dieu », le spectacle nous offre « un Dieu désireux de prendre place chez les hommes ». Cet improbable irruption de « Monsieur Dieu » offre un cadre savoureux à des échanges caustiques.
C’est sur un « diable » que Dieu apporte les lourds coffres contenant son impressionnant C.V. La pièce déroule un sketch sans longueur, rythmé par les nuits et les jours que « Dieu » passe sur la terre. Au cours de son entretien, les grandes questions essentielles sont abordées : « où est Dieu ? un pied au ciel, un pied à terre. Quelle est sa famille ? un fils unique, vraiment unique ! »
A mesure que l’entretien se déroule, « Monsieur Dieu » est dévoilé dans la beauté de ses œuvres, la gratuité de sa création mais aussi dans l’absurdité des situations auxquelles les hommes doivent faire face. Le personnage de Dieu s’explique, se défend et critique de manière très à propos l’incohérence des hommes. Dans ce texte écrit en 1995, l’auteur interrogeait déjà au sujet du continent de déchets plastiques qui souille les océans et fait dire à Dieu : « Dans quel état est la mer ? N’avez-vous pas honte ? »
Ce personnage de Dieu, émouvant dans son costume lumineux, épuisé par l’éternité, ne sera finalement pas retenu pour le poste. « Pour les hommes je ne compte pas » se désole Monsieur Dieu, se plaignant du mauvais procès que lui intente l’humanité. « Pourquoi la mer est-elle salée ? Pourquoi les ouragans ? Dieu est-il fiable ? » Monsieur Dieu exprime sa honte du Sahel et des souffrances humaines, mais n’est-il pas un coupable idéal ? Lui-même se plaint du Pape qui a sa signature. En ces temps où la question de Dieu s’impose dans la société, où l’Eglise catholique est lourdement questionnée, que l’on soit croyant ou athée, chacun retrouve sur scène, des questions essentielles : « pourquoi les hommes ne peuvent-ils se passer de Dieu ? »
Alternant les remarques très fines et les poncifs, le dialogue entre le divin candidat à l’embauche et le très humain responsable des ressources humaines, renvoie le spectateur à sa propre manière d’affronter l’énigme du sens de la vie, à comprendre pourquoi « l’homme est impossible à contenter ? » Pourquoi l’injonction « aimez-vous les uns les autres », est-elle devenue « armez-vous… » ? Avec cynisme, l’auteur offre ses propres réponses : « Pourquoi n’a-t-on qu’une seule vie ? Parce que si l’on pas compris lors de la première, on ne comprendrait pas davantage lors d’une seconde vie ! Pourquoi doit-on vieillir ? Pour être dégouté de la vie avant de la perdre définitivement, ce qui rend la perte moins pénible. »
L’entretien d’embauche se termine sur l’amertume de Dieu devant l’ingratitude des hommes, à laquelle le chef des ressources humaines oppose une ultime et touchante question en forme de reproche : « Dieu ! On ne te voit jamais ! Comment te joindre ? »
Points forts
- Un excellent duo d’acteurs, une belle mise en scène, un spectacle très bien rythmé.
- Une critique mordante des habitudes religieuses catholiques, car il s’agit essentiellement du Dieu, « Père, Fils et Saint-Esprit », interrogé avec humour.
- La dérision sauve l’urgence des questions et s’offre comme un chemin pour les affronter.
Quelques réserves
Même sur le mode de l’improbable et dérisoire personnification de Dieu, le texte véhicule une représentation assez limitée du rapport à Dieu et trahit des projections assez infantiles. Sont-elles celles de l’auteur ou celles de son époque?
Encore un mot...
Lorsque Dieu ne croit plus en Dieu, il se tourne vers les hommes dans l’espoir de trouver auprès d’eux, une activité qui le sorte de sa morne solitude. « Monsieur Dieu » passe un entretien d’embauche et son C.V est naturellement examiné avec stupeur par un responsable de ressources humaines. Il s’en suit une série de questions désopilantes auxquelles « Dieu » se doit de répondre.
L'auteur
Jean-Louis Fournier est un écrivain et humoriste français, grand complice de Pierre Desproges dont il partage l’humour caustique. Né en 1938, il est l’auteur de romans dont, Poète et Paysan en 2010, Veuf en 2011 et La servante du Seigneur en 2013.
Jean-Louis Fournier a écrit et joué au Théâtre du Rond-Point, deux pièces inspirées de ses écrits, Tout enfant abandonné sera détruit, en novembre 2011 et Mon dernier cheveu noir, en novembre 2012. Il fut également réalisateur de télévision et créateur, entre autres, de La Noiraude et d'Antivol, l'oiseau qui avait le vertige.
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