Le Cavalier Seul
A voir, pour retrouver ou découvrir l'humour aussi corrosif que décalé d'Audiberti.
Infos & réservation
Thème
La grande aventure de Mirtus, chevalier quittant le pays d'Oc pour s'engager dans les Croisades. Incommensurable bavard, truculent, chaleureux, trousseur et expéditif, en chemin il séduit 12 femmes et occis 15 hommes, avant de se rendre compte à Jérusalem qu'il n'a pas le courage d'offrir sa vie pour sauver un innocent.
Points forts
1 Avant tout la truculence, la liberté de ton d'Audiberti, cette manière qu'il a de jouer avec les mots et les images, semant les formules à la pelle. Exemples : "La femme est la mère de l'homme, ainsi l'homme couche avec sa mère"; "Occidental est le devoir,oriental est le destin"; "Dieu vient à l'homme par les femmes" etc, etc...
2 La mise en scène très simple, réalisée par l'une des plus belles figures du théâtre français de ces cinquante dernières années, Marcel Maréchal. Dans l'univers du théâtre contemporain, c'est probablement lui qui a le mieux intériorisé l'oeuvre d'Audiberti, et de cette pièce en particulier, qu'il créa en 1963 et avec laquelle il n'a cessé d'entretenir un fervent compagnonnage.
3 Une distribution unanimement excellente. Ils et elles s'amusent beaucoup; malheureusement, parfois, plus que nous.
4 Vous vivrez un moment très fort, grâce à la performance d'Emmanuel Dechartre, bouleversant d'intensité dramatique, de force maîtrisée, dans le rôle de Dieu, venant dire sa lassitude aux hommes : "Ne me mêlez plus à vos histoires".
Quelques réserves
Il y en a malheureusement plusieurs :
1 La deuxième partie, au milieu de la pièce, le séjour à Byzance, n'en finit pas, si tant il est qu'elle est commencé...
2 La charge contre la religion chrétienne, même si elle est le plus souvent exprimée au second degré, est tellement lourde qu'elle ressemble à une charge de tank dans un champs de confettis. La dernière image étant, de ce point de vue, la plus agressive, ce qui n'arrange pas les choses.
3 Pareil avec le portrait à charge de l'Occident dans ses rapports avec l'Orient. Je sais bien que les Croisades ne furent pas une promenade de santé, mais les choses furent-elles vraiment aussi simples, pour ne pas dire simplistes ?
Encore un mot...
1 Vous aurez compris qu'à mon avis cette oeuvre d'Audiberti est à déguster littérairement, avec pour seul objectif de s'amuser, sans attacher nécessairement de l'importance à ses à priori politiques et philosophiques.
2 Ce n'est pas, de mon point de vue, l'oeuvre d'Audiberti qui mérite le plus le commentaire que Claude Nougaro faisait à son sujet, le présentant, avec le sens poétique qui le caractérisait, comme une "parcelle lumineuse enlevée à la Divinité et emprisonnée ici-bas".
3 Dans le panthéon audibertien, cette pièce me paraît se situer à un niveau nettement au-dessous de celui du " Mal court", dont on a pu voir l'année dernière une admirable version, présentée au Théâtre de Poche-Montparnasse, dans une mise en scène de Stéphanie Tesson; Marcel Maréchal faisant partie d'une très brillante distribution avec, entre autres, Julie Delarme et Jean-Paul Farré.
L'auteur
Né en 1899, mort en en 1965, Jacques Audiberti est un écrivain protéiforme, aux talents multiples : poète, romancier, dramaturge, essayiste mais aussi critique de cinéma, peintre et grand amateur de science et de science-fiction. Sous une forme souvent burlesque,son oeuvre aborde les grandes interrogations de la condition humaine , dont celle que suscite l'existence du mal.
"Le Cavalier seul" constitue l'une de ses trois principales pièces, avec "Le Mal court" et "Quoat-Quoat".
Ajouter un commentaire