La vie est une fête
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Thème
- La troupe Les Chiens de Navarre nous emmène d’entrée à l’Assemblée Nationale, vociférant, pour finir après force Xanax dans un asile psychiatrique et de toute urgence car la société est malade, très malade.
- Tout le monde s’écharpe dans les tribunes sur le thème de la retraite à 72 ans (Une autre fois ce sera sur les agressions sexuelles ou le racisme ou autres) ! Le Président de la Chambre (comme on disait…), du haut de son perchoir, a bien du mal à ramener le calme. Les mots d’oiseaux volent, et on va en venir aux mains, pardon, au vote (on en appelle au public) : bref, les gens sont fous ! Comme dirait notre Grand Argentier : « Il n’y a pas débat », juste des cris, des aboiements. La meute est déchainée, mais ce n’était qu’un prologue, une mise en bouche en quelque sorte. Deux députés sont enfermés à l’asile dans un état de déliquescence définitive.
- On voit ensuite une jeune femme suicidaire en mal d’amour en consultation très ambiguë - qui est le malade en fait ? - puis une pauvre jeune femme qui se trouve trop grosse reçue d’abord comme une reine dans un cabinet de chirurgie esthétique (séquence désopilante avec la professionnelle). La femme complètement défigurée terminera, les seins pendant et claudiquant, à l’asile elle aussi, et mettra dix ans à payer les honoraires... Autre séquence jubilatoire : l’ex-cadre sup associé dans une startup qu’il a eu la mauvaise idée de monter avec deux jeune loups à roulettes, lesquels vont s’empresser de le licencier (« Finis les boomers ! »). Et puis aussi le CRS et le SDF qui s’embrassent sur la bouche après s’être écharpés, ou encore la scène du test gynéco…. Et hop, allons voir du côté des blouses blanches, nous aussi ! On a tous le droit d’asile. Grinçant et étourdissant.
Points forts
- On peut se moquer de tout avec cette troupe totalement déjantée, et en particulier de toutes les petites tares ou travers de la société d’aujourd’hui : l’obsession du corps et du paraître, les dérives sexuelles, les agressions de toutes sortes, la violence et la délinquance, la politique et les phrases (ou gestes !) inappropriées… Nos dépressions collectives sont provoquées insidieusement par l’état du monde. Si nous n’y prenons pas garde par un lâcher prise éphémère mais régulier, nous allons tous devenir fous. La démonstration en est faite. Il faut réagir.
- Ce spectacle est fort et brillant grâce à la spontanéité des huit ou dix interprètes qui « ne jouent pas la comédie » (ndlr). Les textes sont d’ailleurs souvent improvisés.
- N’allons pas croire toutefois que ce spectacle hilarant manque de tendresse ni d’émotion. A la toute fin, un homme désabusé et une femme déprimée se retrouvent par terre au pied de la machine à café : « elle est cassée comme nous » soupire-t-elle. « On y va ? » dit l’autre, secourable. Et ils repartent en avant, ayant foi dans leur destin, la main dans la main
Quelques réserves
On pourra regretter que dans ce délire existentiel une sorte d’émeute interminable, commentée en direct au micro par un fonctionnaire casqué (!), occupe la scène sans vainqueurs ni vaincus dans le sang, la boue et pire encore, sans autre accompagnement que le bruit des sirènes ? Une bavure ?
Encore un mot...
« Certes nous souffrons à cause de papa et maman, mais nous souffrons aussi à cause de l’état du monde. Le service des urgences psychiatrique est l’un des rares endroits à recevoir quiconque à toute heure, sans exception d’âge, de sexe, de pays. Un lieu de vie extrêmement palpable pour une sortie de route. Un sas d’humanité. Il n’y a rien de plus humain que la folie. » (Jean-Christophe Meurisse)
Une phrase
« Un Valium et au lit ! »
L'auteur
- Encore un Breton, et non des moindres. Jean-Christophe Meurisse est né à Vannes en 1975 et y a grandi. Il poursuivra ses études à la fac de lettres de Rennes où il découvrira le théâtre. Il s’investit dans le théâtre d’improvisation et crée la troupe des Chiens de Navarre.
- Dès ses premières œuvres il rencontre le succès avec Une Raclette, joué partout, notamment à la Rose des Vents, au Centre Pompidou et aux Bouffes du Nord, puis Les Danseurs ont apprécié la qualité du parquet (œuvre chorégraphique), ou encore La Peste, c’est Camus, mais la grippe est-ce Pagnol ?.
- Jean Christophe Meurisse a réalisé deux longs métrages, Apnée (2016) et Oranges sanguines (2021), tous deux présentés au Festival de Cannes. J.C. Meurisse a été fait chevalier des Arts et des Lettres
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