La trilogie new-yorkaise

Une adaptation ambitieuse du roman mi-policier mi-métaphysique de Paul Auster. Une plongée intéressante dans l’œuvre de l’auteur, mais qui reste parfois à la surface de sa quête d’identité.
De
Paul Auster
3h45 (y compris 2 entractes de 15 minutes)
Mise en scène
Igor Mendjisky
Avec
Gabriel Dufay, Pascal Greggory, Rafaela Jirkovsky, Ophélia Kolb, Igor Mendjisky, Thibault Perrenoud, Lahcen Razzougui et Félicien Juttner
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Théâtre de la Ville
31 rue des Abbesses
7
Paris
01 42 74 22 77
Du 14 au 30 novembre, du mardi au samedi à 19h30, le dimanche à 15h
Le 18 octobre 2024 au Parvis - Scène nationale de Tarbes-Pyrénées
Le 7 novembre 2024 au Théâtre Edwige Feuillère à Vesoul
Du 3 au 4 décembre 2024 au Théâtre Sénart - Scène nationale
Le 6 décembre 2024 à l’Espace Marcel Carné à Saint-Michel-sur-Orge
Le 10 décembre 2024 au Théâtre de Meudon

Thème

  • La Trilogie new-yorkaise nous propose trois histoires distinctes, qui ont en commun de se dérouler dans Big Apple et de mettre en scène des personnages contraints de changer d’identité :

    • Dans Cité de verre, un auteur de roman policier, Quinn, devient le détective Paul Auster, à la suite d’une erreur téléphonique ;
    • Dans Revenants, un détective est engagé par un mystérieux client pour surveiller un homme qui passe ses journées chez lui, à écrire ;
    • Dans La chambre dérobée, un auteur, Fanshawe, disparaît et charge son ami d’enfance de publier son œuvre. Celui-ci va alors prendre possession de la vie de Fanshawe.
  • La Trilogie new-yorkaise prend des allures de quête métaphysique à travers la ville qui se transforme en échiquier sur lequel Paul Auster fait bouger ses pions avec brio.

Points forts

  • New-York est un personnage essentiel de la Trilogie. Devant un fond de décor symbolisé par un emblématique immeuble new-yorkais rouge brique, la scène est quasiment vide. Il n’est jamais aisé de représenter au théâtre l’univers imaginé par un auteur. Mendjisky choisit le contraste entre l’imposant building et l’espace déserté qui s’étale devant lui, métaphore de ce monde qui semble investi par des personnages fantômes en quête d’eux-mêmes.
  • C’est dans cet espace / temps que les personnages de la Trilogie vont évoluer et se débattre : l’histoire démarre comme un polar à la Chandler, avant de devenir une fresque métaphysique qui enfièvre tous les personnages. Mais il est aussi question du travail d’écrivain avec une profonde réflexion teintée d’autodérision sur le processus de l’écriture et les questionnements qu’il suscite.
  • Si les trois récits prennent au début de l’histoire la forme de thrillers assez classiques, la quête est moins la recherche du coupable ou l’énigme à résoudre, que la quête de soi, avec pour chacun ses zones d’ombres, sa solitude et la difficulté à trouver sa place.
     
  • La mise en scène reste classique et ne recherche pas l’originalité à tout prix. Les comédiens – Pascal Greggory et Ophélia Kolb en tête, déjà vus et appréciés au théâtre comme au cinéma ou la télévision – sont excellents. 
     

Quelques réserves

  • Si la pièce réussit à ne pas se perdre dans le labyrinthe de ces différentes histoires, elle ne nous emporte pas plus aussi loin que le livre, et c’est bien là le problème. Au-delà de la qualité bien réelle de l’adaptation qui est fidèle à “l’œuvre“, elle ne suffit pas toujours pour passer du livre à la scène. Comme s’il ne restait du récit que la partie immergée, l’histoire, un récit que la narration ne réussit pas à sublimer.

  • On n’est pas facilement touché profondément par les déambulations de personnages qui manquent par trop d’épaisseur pour nous émouvoir. On reste souvent à la surface du voyage intérieur auquel le livre nous invite.

Encore un mot...

  • La Trilogie new-yorkaise est la première œuvre écrite par Paul Auster, dont les trois histoires distinctes sont parues séparément en 1985 et 1986, avant d’être éditées dans un seul volume.

  • Ce livre ouvrit les portes de la littérature et une reconnaissance internationale à Paul Auster.

  • La sortie de la pièce intervient quelques mois après la disparition de l’écrivain, le 30 avril dernier. Par l’intermédiaire de son éditrice française chez Actes Sud, Claire David, Paul Auster et Igor Mendjisky, ont échangé sur le projet et l’écrivain a finalement accepté que Mendjisky adapte son roman en lui laissant carte blanche. L’écrivain a ainsi pu lire, en septembre 2022, un brouillon de ce qui deviendra cette adaptation théâtrale.

Une phrase

  • Voici d’ailleurs la seconde conversation téléphonique entre Igor Mendjisky et Claire David, après que le premier est envoyé une lettre à Paul Auster lui demandant l’autorisation d’adapter La trilogie new-yorkaise :

Igor : « Allo ?
- Claire : Igor, c’est Claire David.
- Igor : Bonjour Claire. 
- Claire : écoute, Paul a lu, il est très intrigué par ton courrier. Il aimerait en savoir plus.
- Igor : C’est-à-dire ?
- Claire : Il aimerait savoir comment tu vas t’y prendre. Est-ce que cela sera une adaptation fidèle ou inspirée, est ce que tu seras plus dans l’humeur que dans les mots ? Il aimerait que tu lui dresses une sorte de traitement. Pourquoi la trilogie plus qu’un autre roman ?
Igor : D’accord. Cela va me prendre du temps. Penses-tu qu’il peut y avoir un “oui“ au bout du tunnel ?
Claire : Oui. Il ne m’aurait pas répondu si vite. Je te dis, il est intrigué. Bons devoirs de vacances ! »

L'auteur

  • Paul Auster naît le 3 février 1947 à Newark, dans le New Jersey, dans une famille d’origine juive polonaise, et disparaît le 30 avril 2024 à Brooklyn, là où il a toujours vécu avec sa compagne, la romancière et essayiste Siri Hustvedt.

  • Très francophile (il a commencé à traduire des poètes français), il est l’auteur d’une œuvre magnifique, à la fois très diversifiée et traversée par des thèmes récurrents et quasi obsessionnels, comme la dépossession (thématique centrale de La Trilogie new-yorkaise), le hasard et la contingence.

  • Il s’est toujours questionné sur le processus de création littéraire et le rapport entre l’auteur et son œuvre.
  • Chroniques publiées sur Culture-Tops :

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