La Tempete

Pauvre Shakespeare, pauvres acteurs!
De
William Shakespeare
Texte français de Jean-Claude Carrière
Mise en scène
Robert Carsen
Avec
Thierry Hancisse, Jérôme Pouly, Michel Vuillermoz, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Serge Bagdassarian, Hervé Pierre, Gilles David, Stéphane Varupenne, Georgia Scalliet, Benjamin Lavernhe, Noam Morgensztern, Christophe Montenez, Matthieu Astre, Robin Goupi
Notre recommandation
2/5

Infos & réservation

Comédie Française: Salle Richelieu
Place Colette
75001
Paris
0144581515
Jusqu' au 21 mai, en alternance

Thème

Prospéro, duc de Milan, a été destitué par son frère, Antonio, qui s’est débarrassé de lui en le lançant sur une mer déchaînée avec sa petite fille Miranda. Tous deux ont trouvé refuge sur une île déserte. 

Prospero, qui a beaucoup étudié, détient des pouvoirs magiques qui lui ont permis, durant ces douze années passées, d’éduquer sa fille et de devenir le maître d’esprits comme d’éléments naturels ; ainsi, il détient à sa merci Ariel, esprit de l’air et du souffle de vie, et Caliban, qui le déteste et symbolise les violence de la terre. 

La pièce commence tandis qu’Ariel a provoqué le naufrage des ennemis de Prospero. Ces derniers sont désormais à la merci de sa vengeance. Prospéro va les séparer, afin de les affoler, puis il leur fera subir de multiples épreuves quasi initiatiques. Ceux qui l’avaient trahis seront alors démasqués, mais Prospero fera preuve de clémence. Il se réconciliera avec son frère et mariera sa fille avec Ferdinand, le fils du duc de Milan. Enfin, magnanime, il libérera Ariel et Caliban et renoncera à la magie.

Points forts

1- L’adaptation de Jean-Claude Carrière, à la fois fluide, claire et poétique, qui permet d’entendre le magnifique texte de Shakespeare. 

2- Michel Vuillermoz, qui joue Prospéro, a la carrure du personnage, sa force, sa violence et son humanité, en dépit du contexte des costumes et des décors. 

3- Le couple formé par Loïc Corbery et Georgia Scalliet offre au public quelques scènes où amour et tendresse deviennent crédibles et touchants, dans la froideur ambiante du spectacle. 

4- Comme souvent chez Shakespeare, il y a heureusement des personnages truculents que l’on ne peut manipuler sans changer le texte. Ici le bouffon et le majordome sont interprétés avec bonheur par Hervé Pierre et Jérôme Pouly. Leurs scènes font aussi partie des plus réussies. Il faut signaler une intéressante prestation de Christophe Montenez dans le rôle magique d’Ariel.

Quelques réserves

1- La pièce commence dans cube en perspective beige ou gris qui réduit l’espace. Au centre, depuis un lit d’hôpital médicalisé, surgissent des bip-bip dont le rythme est inquiétant. Prospero y repose. Miranda, vêtue d’une longue chemise blanche, va aider son père à sortir de ce lit. Le metteur en scène a choisi de placer Prospero dans ce qui pourrait être un hôpital psychiatrique, de façon à ce que  toute l’histoire féérique écrite par Shakespeare, se déroule dans la tête du pauvre Prospero. Il faut faire du nouveau, n’est-ce pas ? Il semble hélas que ce soit à la mode sur les scènes nationales...  

2 – Dans cette vision, plus que discutable, Prospero, personnage central de la pièce ultime de Shakespeare, Prospero le magicien aux multiples pouvoirs, va déambuler pendant l’essentiel de la représentation en pyjamas ! Son ombre portée s’agrandit et si l’on en croit le programme, une part de sa magie s’exprime ainsi. Cette conception n’incite guère le comédien à libérer toute la mesure, voire la démesure dont il est capable. Les naufragés, tous en complets vestons avec des valises à la main, arrivent en rang comme dans une publicité pour malletier chic. Ils ouvrent et ferment ces valises sauvées de ce naufrage. Au fond de ce cube en perspective, une mer grise lance les vagues furieuses de cette fameuse tempête. 

Tout va se dérouler dans des couleurs froides, y comprises les belles interventions des déesses, que le metteur en scène n’a pas osé supprimer, toutes trois très bien interprétées par Elsa Lepoivre, en projection. 

Le personnage de Caliban, si important, passe lui aussi un peu à la trappe, n’ayant rien des attributs d’une sorte de génie malfaisant, investi des forces brutales de la terre. 

Encore un mot...

Quel dommage ! Il y a une sorte de naufrage du spectacle provoqué par la vision intellectualisée à l’extrême du metteur en scène, qui a laissé le scénographe aller trop loin semble-t-il. Ils disposaient pourtant d’une œuvre magnifique et d’une troupe hors pair. Jusqu’où acceptera-t-on d’aller vers ce type de novations qui mettent des chef-d’œuvres en péril ?

L'auteur

William Shakespeare (1564-1616) est l’auteur de plus de trente cinq pièces, souvent classées selon leur genre, historique, comédies, tragédies, tragi-comédies, dont "La Tempête", qui semble être son œuvre ultime.

La Tempête, présentée pour la première fois en 1611, a été jouée le 14 février 1613 à « l’occasion du mariage de la fille du roi Jacques 1er avec l’Électeur palatin – union qui fait écho à celle de Miranda et Ferdinand – et clôt d’une certaine manière l’ère élisabéthaine. » 

Shakespeare fut de son temps un grand auteur populaire et demeure l’un des plus grands dramaturges et poètes de langue anglaise.

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