La Locandiera
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Thème
Nous sommes dans ne auberge florentine dont a hérité Mirandolina qui la dirige avec une belle maestria, faisant succomber à son charme tous ses pensionnaires ou presque. Certes, elle est demeurée vertueuse, sachant que son père lui a conseillé d'épouser Fabrizio, son fidèle valet. Deux aristocrates tournent autour d'elle, l'un de réelle noblesse mais de grande précarité (Michel Vuillermoz), l'autre qui a acheté son titre mais qui dépense sans compter et lui offre de somptueux cadeaux. C'est l'arrivée d'un chevalier séduisant, qui affiche une misogynie agressive, qui va mettre en danger ce bel équilibre, difficilement maintenu en une époque où changer de classe sociale était inenvisageable. L'ombre de Manon Lescaut plane sur la pièce.
Points forts
1 – Merci à Alain Françon d'avoir opté pour une mise en scène qui situe la pièce dans son contexte d'écriture, ce qui ne fait que renforcer l'aspect très moderne du propos de Goldoni. Merci encore à lui, d'avoir opté pour une élégance générale dans l'expression, qui fait paraître la pièce plus grave, mais plus réelle aussi et d'autant plus touchante.
2 – Une distribution excellente, avec Florence Viala, intelligente, brillante, voire manipulatrice, quand elle se lancera le défi de rendre amoureux d'elle ce chevalier si hostile au beau sexe. Chez Marivaux le bonheur est possible, car les serviteurs déguisés s’avèrent être des maîtres, et leur amour peut aboutir. Ici, l'amour qui les prend à son piège, devra céder le pas face à l'ordre social. On nous a parfois fait accroire que Mirandolina était une sorte de « Madame sans gêne ». Que nenni ! C'est une Mirandolina forte mais blessée, qui se réfugiera dans un mariage conforme aux volontés de son père, pour échapper à cet amour qu'elle a déclenché et auquel elle a succombé.
3 – Le Comte et le Marquis sont remarquables de finesse et d’ingéniosité dans ces rôles si différents, où le vrai gentilhomme, en définitive, n'est pas celui que l'on pouvait croire (excellents Hervé Pierre et Michel Vuillermoz) Les deux comédiennes qui jouent les grandes dames marquent bien cette différence spirituelle qui les éloigne de la personnalité si rare de Mirandolina. Stéphane Varupenne campe avec ardeur ce chevalier qui devient presque fou en constatant à quel point cette personne d’un sexe qu’il exècre, lui ressemble et lui devient chère. Son valet, interprété par Noam Morgensztern, tombe aussi amoureux de la belle, avec une grande drôlerie ; quant à Fabrizio ( excellent Laurent Stocker), le valet de l’auberge, il n’est pas dupe de l’amour de Mirandolina pour le chevalier, mais accepte avec esprit et une certaine grandeur de la sauver en l’épousant.
Quelques réserves
Je n'en vois vraiment pas.
Encore un mot...
C'est toujours la même Locandiera et pourtant on a l'impression étrange de la découvrir sous l'éclairage plus grave que nous en offre Alain Françon, avec sa direction d'acteurs si fine et si subtile. Goldoni n'est pas aussi misogyne qu'on le dit. Il met en évidence la trajectoire d’une femme libre, intelligente, courageuse, mais qui sait qu'il y a des barrières sociales qui sont infranchissables pour elle, en plein 18ème siècle.
L'auteur
Carlo Goldoni (1707-1793) est l’auteur de plus de deux cents pièces, qui transforment en véritable théâtre l’ancienne commedia dell’arte. Engagé d’abord au Teatro Sant’Angelo, il y écrira plusieurs de ses pièces les plus célèbres, puis rejoindra le Teatro san Luca, où il sera moins bien considéré.
Exilé à Paris, il deviendra précepteur d’italien et mourra dans l’oubli et la misère.
C’est l’un des auteurs italiens les plus joués en France. La Locandiera est sa pièce la plus connue.
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