La Femme rompue
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Thème
Une femme brisée par le chagrin et l’incompréhension, après des ruptures conjugales et le suicide de sa fille, se retrouve seule un soir de réveillon, alors que les autres jouissent aveuglement de leur confort affectif et social. Dans un violent monologue elle laisse libre cours à sa douleur et à sa révolte, à son désespoir et à son refus d’accepter l’idée du bonheur que nous impose le monde.
Simone de Beauvoir résumait ainsi la situation : « J’ai choisi un cas extrême. Une femme qui se sait responsable du suicide de sa fille et que tout son entourage condamne […]. Pour récuser le jugement d’autrui, elle enveloppe dans sa haine le monde entier. Je voulais qu’à travers ce plaidoyer truqué le lecteur aperçût son vrai visage. »
Points forts
- Un texte magnifique, au vitriol, vibrant, haché, feu d’artifice d’une femme au bout du rouleau qui dégueule de partout sa rage et son désespoir. Elle crie son manque d’amour sans aucun esprit d’analyse. Elle se veut vraie, franche, droite ! Ca passe ou ça casse, et ça casse de partout.
- Une écriture qui sonne le glas, qui interpelle, qui résonne. Un monologue sans coupure, saccadé, il y a trop à dire. La digue de sa vie lâche, se brise contre le malheur.
- Josiane Balasko, dont la diction semble frigorifiée au début, se livre mieux dans la seconde partie où elle monte d’un ton et fait siennes, l’ironie cynique et la folle haine de cette femme emportée par la cruauté des souvenirs qui l’emprisonnent. . . . Un monologue tragique et dense.
Quelques réserves
- Une mise en scène qui se veut épurée et moderne, peut-être pour faire écho au style dépouillé et concis du texte : un canapé orange très sobre dans une pièce tendue de noir…. juste un jeu de lumière à l’intensité variable pour accompagner la voix. On aurait aimé un lit défait, un intérieur plus vivant, désordonné, image d’un désarroi. Des tons heurtés, une lumière crue plus en accord avec l’outrance des propos.
- Une interprétation en demie-teinte. Josiane Balasko joue une partition trop intimiste pour ce monologue intense qui ne demande qu’à éclater, enfler et prendre toute sa démesure.
- On entend et ressent plus les plaintes et les jérémiades d’une femme dans le déni et l’analyse à bon compte qu’un vrai cri de souffrance sans fin.
Encore un mot...
- Un texte magnifique, par moment très cru, qui hurle une haine viscérale des autres et du monde. « Cette petite bonne femmes franche, intrépide et intègre » reste dure et solitaire et ne s’abandonne jamais au registre de l’émotion.
- Mais Josiane Balasko n'est pas mise en situation de donner sa pleine mesure.
Une phrase
- « Quelle chierie leurs fêtes; c’est déjà assez moche les autres jours ! »
- « Quand j’y repense je me dis que si on avait su m’aimer j’aurai été la tendresse même. Les fumiers ils m’ont sciée ils se foutent du tiers et du quart, chacun peut crever dans son coin, les maris cocufier leurs femmes, les mères branler leurs gosses, pas d’histoire, bouche cousue; ça m’écoeure cette prudence et qu’on n’ait pas le courage de ses opinions. »
- « Il dansait avec Nina sexe à sexe. Ele étalait ses gros seins, elle puait le parfum mais on sentait en dessous une odeur de bidet et lui qui se trémoussait, il bandait comme un cerf. »
L'auteur
Née en 1908 dans un milieu bourgeois et conventionnel, Simone de Beauvoir est une intellectuelle de gauche, philosophe et romancière.
Grande figure du féminisme et de l’existentialisme elle fut la compagne de Jean-Paul Sartre.
Elle écrit en 1949 un livre qui fait scandale, mais considéré comme ‘ la bible du féminisme, ‘ le Deuxième sexe ‘, souvent résumé à une seule phrase : « on ne nait pas femme on le devient ».
Elle reçoit le prix Goncourt avec les Mandarins, en 1954, et commence ses mémoires: en 1958, ‘Mémoire d’une jeune fille rangée,’ 1960, ’Force de l’âge’ et 1963‘ Force des choses’
Parmi les trois nouvelles qui composent La Femme rompue , il y a ce Monologue, écrit en 1967.
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