La Conversation
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Thème
On connaît l'argument de "LA CONVERSATION", l'avant-dernier livre de Jean d'Ormesson, qui a été adapté au théâtre avec la célérité de Bonaparte au Pont d'Arcole: un soir de l'hiver 1803-1804, Bonaparte, Premier Consul, s'entretient avec Cambacérès, Second Consul. Le futur Napoléon explique au grand juriste-administrateur à quel point le système du Consulat à vie lui paraît bancal. Et conclut à la nécessité d'instaurer un Empire, qu'il conçoit déjà comme conquérant et glorieux.
Points forts
- Ce spectacle exprime excellemment ce qui caractérise 1) Jean d'Ormesson 2) Son oeuvre: la finesse, l'humour, la culture, le respect gourmand de la complexité des êtres et des choses. Voilà une "CONVERSATION" qui pourrait, de toute évidence, porter comme sous-titre: "Au plaisir de l'intelligence".
- Le Bonaparte de Jean d'Ormesson n'est pas une figure abstraite. C'est un être vif, nerveux, impatient,véhément,d'une énergie contrainte ou libérée, et même parfois violemment libérée. Mais aussi, manipulateur, malicieux, drôle à l'occasion. Et, surtout, prodigieusement intelligent, visionnaire, en osmose avec l'Histoire, habité par la certitude d'avoir un destin grandiose. Jean d'Ormesson le peint comme rêvant déjà, en 1804, d'avoir le monde à ses pieds, quitte à faire la guerre à tous ou presque. La mégalomanie est là, creuset de l'inéluctable échec final.
- La performance de maxime d'Aboville est exceptionnelle. il nous avait déjà impressionnés par son interprétation du "JOURNAL D'UN CURÉ DE CAMPAGNE", de Bernanos. Mais là, il est sidérant de vérité. Il réussit à donner vie à l'intériorité du texte. C'est le meilleur Bonaparte que j'ai vu au théâtre ou au cinéma. Du grand art: l'acteur, ce démiurge qui a parfois le don de ressusciter la vie...
Quelques réserves
Une seule et petite réserve: sans doute les deux protagonistes de cette "CONVERSATION", Bonaparte et Cambacérès, s'expriment-ils en pensant un peu trop au livre de Jean d'Ormesson; s'obligeant à rappeler toute une série de faits et de références qui devaient, probablement, s'imposer d'emblée entre eux sans qu'il fût besoin de les mentionner expressément, à titre pédagogique ou simplement informatif.
Au moins, cela nous met-il de plein pied avec la trame de cet échange, comme si nous étions plus cultivés, voire plus intelligents...
Encore un mot...
Reste la grande question: le "Petit Corse" occuperait-il une telle place dans le firmament universel des Grands Hommes si nous ne l'avions connu qu'à travers Bonaparte?
Ne sont-ce pas aussi ses échecs et la fin incantatoire à Saint Hélène qui l'ont hissé dans les mémoires au rang de César et d'Alexandre? Echecs curieusement en symbiose, comme l'exprime admirablement Jean-Marie Rouart dans son livre, "NAPOLÉON OU LA DESTINÉE", avec la part très sombre de la personnalité de l'Aigle, jusqu'à la tentation et à la tentative de suicide, bien avant la chute vertigineuse.
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