Kvetch
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Thème
C’est peut-être le mensonge qui est au cœur de cette histoire, ou plutôt le décalage entre ce que nous pensons, vivons, éprouvons dans notre for intérieur, et ce que nous en laissons voir à l’extérieur.
Dans cette comédie satirique, des petits-bourgeois banals - Frank, le mari, Donna, la femme, Hal, l’ami du mari, la belle-mère, Georges, le collègue du mari - ont des comportements d’ « animaux sociaux », ils disent ou font des choses aimables ou convenues. En même temps, ils « balancent » tout ce qu’ils ont dans la tête (et dans le corps) de manière violente et crue. Les deux faces des personnages se font écho, et l’inavouable apparaît derrière l’hypocrisie des rôles.
Points forts
- Au-delà des mots, c’est une pièce d’une grande profondeur psychologique. Les situations sont très bien campées et tristement réelles. On sort de ce spectacle avec une vraie question : pourquoi avons-nous peur d’être nous-mêmes ? Peut-être parce que nous connaissons la réponse : nous finirions tous à l’asile d’aliénés !
- La langue de Berkoff est un mélange baroque d’argot, de langage ordurier et de pure poésie : elle explose d’érotisme, de cruauté et de lyrisme.
- Un rôle-clé donné au corps, comme si le langage du corps était plus apte à exprimer tout ce qui est enfoui, tout ce qui est interdit. La mise en scène de Sophie Lecarpentier est très physique donc, véritable marathon pour les comédiens !
- Le comique est présent aussi bien lorsque les personnages sont engoncés dans leurs peurs de ne pas être conformes que lorsqu’ils se défoulent et laissent libre cours à tous les fantasmes.
- Quatre comédiens hors pair, dont l’un, Julien Saada, joue aussi un rôle de femme, ce qui évidemment ajoute au comique. Le rôle de Frank est particulièrement bien assumé par Fabrice Cals.
Quelques réserves
- On pourrait être choqué par la trivialité de certaines scènes : il faut savoir que la pièce a pour objet de nous secouer, donc natures prudes s’abstenir !
- On ne comprend pas bien la nécessité du violon alto qui intervient entre les mots…
Encore un mot...
La pièce pourrait s’appeler Les coulisses de l’âme humaine . Ces coulisses, les plus grands auteurs de théâtre les ont explorées - Shakespeare, Marivaux, Tchékhov et tant d’autres, mais ici Berkoff joue dans la cour des grands !
Une phrase
« Je voudrais finir de kvetcher », dit Frank. On comprend que « kvetcher » signifie être brutalement confronté à la dichotomie entre son monde intérieur et sa manifestation extérieure.
L'auteur
Né à Londres en 1937, Steven Berkoff joue avec différentes compagnies avant de fonder, en 1968, le London Theatre Group (LTG) dont la première production est une adaptation d’une nouvelle de Kafka. A partir de 1975, Berkoff non seulement écrit pour le théâtre (notamment West, Greek, Decadence ) mais adapte et met en scène des œuvres telles que La Métamorphose et Le Procès de Kafka, Agamemnon d’après Eschyle, La Chute de la Maison Usher d’Edgar Poe, des pièces de Shakespeare ou d’Oscar Wilde, qui sont montées et jouées dans de nombreux pays. Sa dernière production, Religion et Anarchie, s’est jouée à Londres jusqu’en 2013.
Parallèlement à son travail de dramaturge et de scénariste, sa carrière d’acteur a commencé en 1958; il a joué dans une soixantaine de films aussi divers que Orange Mécanique, Barry Lyndon, Octopussy, Le Flic de Beverley Hills, Rambo ou Absolute Beginners…
Il a écrit Kvetch en 1986.
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