Kelly Rivière : An irish story

Du talent et du fond
De
Kelly Rivière
Collaboration artistique: Jalie Barcilon, David Jungman, Suzanne Marrot, Sarah Siré
Avec
Kelly Rivière
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Théâtre de Belleville
94 rue du Faubourg du Temple
75011
Paris
01.48.06.72.34
Le mercredi, jeudi, vendredi, samedi à 19 h ; le dimanche à 20 h 30 - durée 1 h25 sans entracte Jusqu'au 30 juin Relâche le 5 juin: en tournée, ce jour-là, au Festival Traverse à Azay-le-Brulé (79)

Thème

Kelly, née en France, est la petite-fille d'un Irlandais, Peter, qui a quitté le sud de l'Irlande pour s'exiler et vivre misérablement, à Londres dans les années 50, où la vie est difficile tant les Irlandais sont méprisés ("No Black, No Irish, no Dogs" lit-on à l'entrée des HLM). Et un beau jour, dans les années 70, sans raison apparente, il a disparu, plantant là, dans un minable deux pièces à peine chauffé faute de "penny", sa femme Margaret et leurs six enfants.  Pourquoi ? Où a-t-il trouvé refuge ? Est-il encore en vie ?

Kelly, des années plus tard, veut comprendre et, de 16 ans à l'âge adulte, va s'acharner à obtenir des réponses. Sa mère et sa grand-mère sont murées dans le silence. 

Cette quête de ses origines lui fournira l'occasion de rencontrer une multitude de personnages hauts en couleurs. Au fil des générations, elle nous entraîne en Irlande du Sud où tout reste apparemment immuable, les pubs, le whisky, la danse,  la musique, le poids de la religion, le chômage, la pauvreté et le mutisme des familles avec leurs secrets et leurs non-dits.

Points forts

  • Kelly Rivière s'est inspirée de son histoire personnelle ("ce texte je le portais en moi depuis plus de quinze ans" dit-elle) et c'est avec un réel talent d'auteur qu'elle a transposé la réalité familiale en pièce de théâtre. Voilà pour le côté écriture : une vraie réussite.
  • Pour le côté jeu scénique, aussi, il faut saluer son talent. Kelly Rivière (qui s'appelle Kelly Ruisseau dans le texte, appréciez la transposition) est une excellente comédienne, sachant jouer de tous les registres : le mime, les expressions du visage, la souplesse du corps, l'imitation des accents, la modulation de la voix, l'alternance du comique et du tragique.
  • Deux thèmes portent la réflexion : l'exil et la disparition ; la manière de les aborder n'est jamais pesante. 
  • On rit beaucoup, l'humour est là, tout au long de la pièce (la scène de son accouchement par une sage-femme irlandaise est inénarrable). On est aussi émus par la misère quotidienne de ces familles.   
  • Le décor : sur un simple fil tendu, des photographies de paysages et de visages suffisent à évoquer les multiples facettes de l'Irlande.

Quelques réserves

  • Parfois, on s'accroche pour ne pas se perdre dans les générations et dans les personnages tant Kelly change de rôle à toute vitesse !  Combien en incarne-t-elle, à elle seule ? Impossible à compter.

Encore un mot...

Ce spectacle qui tient autant du théâtre que du One Man Show, est bilingue, ce n'est pas si fréquent, ce qu'apprécieront les nombreux anglophones de Paris, la seconde partie étant presque entièrement en anglais (avec l'accent irlandais).  C'est donc aussi à un voyage dans les langues auquel nous sommes conviés, tant la manière de parler est révélatrice d'un pays, d'une origine, d'un milieu social. 

Un spectacle original à ne pas manquer, si l'on peut.

Une phrase

Ou plutôt trois:

  • "Si j'arrête de le chercher, c'est comme s'il avait vraiment disparu pour toujours".
  • "Les hommes finissent toujours par partir"
  • Extrait d'une interview : "Lorsqu'une personne disparaît, elle n'est pas morte, elle est « comme » morte. Ce « comme » fait toute la différence, car il nourrit l'espoir. L'espoir que cette personne soit encore vivante. Je n'ai pas connu ce grand-père, mais j'ai vu l'empreinte qu'il a laissée sur ma famille".

L'auteur

Kelly Rivière, on l'a compris, est franco-irlandaise, née en 1979 à Lyon, d'un père français (dont la famille est du Midi, précision importante dans la pièce) et d'une mère anglaise. Parfaitement bilingue, elle a traduit plusieurs pièces de l'anglais en français, publiées par les éditions Actes-Sud Papiers. Elle s'est formée au Conservatoire de Lyon en danse classique et contemporaine et au Cours Florent pour le théâtre. Elle a intégré plusieurs compagnies avant de jouer en solo et avec un musicien Just like a Woman, mis en scène par Jalie Barcilon.

Commentaires

Boskowitz Alexandre
mar 29/10/2019 - 12:14

"One girl show" exceptionnel par la richesse de son contenu et le jeu de Kelley Rivière. Malgré le plurilinguisme régional, on comprend tout, au long du spectacle. Et quelle belle présence scénique de l'actrice!

Je serais heureux de voir les spectacles suivants.

michel MARACHE
jeu 10/11/2022 - 11:43

Je viens d'assister à la pièce à l'evryman de Cork. Standing ovation pour un véritable feu d'artifice de talents. Bravo.
Où peut-on trouver le livre
Merci mille fois pour ce petit bijou

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