Histoire du soldat
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Thème
Un jeune soldat, à la fin de la guerre 1914-1918, rentre chez lui pour une permission, mais il rencontre le diable et après quelques hésitations, accepte de lui vendre son violon, c'est-à-dire son âme, contre un livre qui prédit l'avenir et le rendra très riche. Il gagne en effet la richesse, mais il ne maîtrise plus le temps, ses amis et sa fiancée ne le voient plus. Il est désespérément seul. Il essaie alors d'échapper au pouvoir du diable, il veut lui rendre son argent avec le livre, mais c'est trop tard, on n'échappe pas au diable qui, à la fin, l'emmène en enfer.
Points forts
1) Le thème est poignant: c'est l'éternel mythe de Faust, qui se présente ici sous la forme d'un violon, symbolique de l'âme. La naïveté, puis la lutte désespérée du soldat pour échapper à l'emprise du diable, est émouvante. Le visage de l'acteur représente bien cette candeur du jeune soldat, puis son désespoir, son regain d'espoir quand arrive la princesse, et de nouveau le désespoir, car le diable ne lâche pas prise.
2) L'acteur qui joue le diable, Licino da Silva, est excellent: rouerie, méchanceté, vivacité. Il joue la tentation permanente, et le lecteur, un sorte de descendant du choeur dans les tragédies antiques, ne parvient pas à éveiller la méfiance du jeune soldat.
3) La mise en scène, simple, est remarquable, car elle permet de montrer les voyages du soldat dans un cadre restreint. Il se déplace à la suite du diable, du lecteur, de la princesse, avant d'être aspiré par l'enfer.
4) La musique joue un grand rôle, d'abord par le violon, puis par l'orchestre, qui donne un côté à la fois dramatique et comique à ce conte. Stravinsky donne une profondeur, dramatique et comique aussi.
5) La troisième dimension, c'est la danse. La princesse réveillée non de son sommeil mais de son mutisme et de son apathie, se met à danser pour lui, pour elle, et avec lui. C'est un dernier espoir avant la chute finale.
Quelques réserves
1) Je ne vois pas vraiment de point faible. Le tout est est de croire au conte et au mythe: le livre, c'est la connaissance, le violon, c'est l'âme. Il faut entrer dans le jeu, dans un monde irréel, et se laisser emporter par la musique, la danse et les mimiques du diable. Les spectateurs enfants s'amusent, les grands rient et réfléchissent, s'ils acceptent de rentrer dans cet univers de fantaisie.
2) Il me semble que la personnalité du lecteur, qui devient finalement l'auteur, est un peu difficile à percevoir.
Encore un mot...
C'est un petit chef d'oeuvre qu'on peut regarder en s'amusant, en pensant et en tremblant.
Une phrase
"Il ne faut pas vouloir ajouter à ce qu'on a ce qu'on avait, on ne peut pas être à la fois qui on est et qui on était. On n'a pas le droit de tout avoir, c'est défendu. Un bonheur est tout le bonheur; deux, c'est comme s'ils n'existaient plus." Le lecteur.
L'auteur
- Charles-Ferdinand Ramuz, né à Lausanne en 1878, enseigne puis devient précepteur en Allemagne. Il vient souvent à Paris et publie ses premiers textes en 1903. Il y développe les thèmes de la solitude et de l'homme face à la nature. il retourne en Suisse et il fonde les "Cahiers vaudois" et son style devient plus personnel. En 1915, il rencontre Igor Stravinsky et de leur amitié naît "Histoire du soldat". Il atteint sa maturité en 1934 avec "Derborescence", puis il se plonge dans ses souvenirs, "Paris", "Notes d'un Vaudois". il meurt en 1947 à Lausanne.
- Igor Stravinsky, né en 1882, rencontre Serge de Diaghilev qui lui fait réaliser un ballet, "L'oiseau de feu" en 1910; puis viennent "Petrouchka" et "Le Sacre du printemps" en 1913. Il part en Suisse à cause de la guerre, et il rencontre Ramuz. Puis il s'installe en France et il compose pour piano, quatuor, septuor et octuor et il crée de nombreux ballets, tels que "Pulcinella" ou "Le baiser de la fée". Il part en 1939 pour les Etats-unis où il crée de nouveaux ballets et produit des oeuvres très diverses: il explore le champ des possibles musicaux. Il meurt à New York en 1971.
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