Gutentag, Madame Merkel

Une leçon d’Histoire drôle et bien documentée
De
Anna Fournier
Durée : 1h 20
Mise en scène
Anna Fournier assistée de Marie Sambourg
Avec
Anna Fournier
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Théâtre La Pépinière
2, rue Louis le Grand
75002
Paris
01 42 61 44 16
Jusqu'au 4 janvier, du jeudi au samedi et du 12 janvier au 27 avril, du dimanche au mardi

Thème

  • D’emblée, elle impose son personnage : mains jointes en triangle posées sur le ventre, voix douce, veste colorée. Anna Fournier incarne Angela Merkel, et on y croit.

  • Premier séisme avec le surgissement de “l’Histoire en marche“ : la chute du mur de Berlin en novembre 1989, dont Angela est une spectatrice un peu distraite, voire innocente, car ce jour-là, la future chancelière n’était pas à cheval sur le mur à casser des parpaings, mais au sauna !

  • Dès lors, les événements s’enchaînent rapidement : réunification allemande, poste de ministre, puis un mauvais scandale qui déboulonne la statue du commandeur Helmut Kohl. S’ensuit un coup de poignard de Merkel à son mentor, et voici enfin le pouvoir convoité et la revanche de “la gamine“ (das Mädchen) raillée à ses débuts par Kohl et qui tout à coup remporte la victoire sur tous ces mâles dominants de la vieille famille politique de la CDU. 

  • Pourtant Angela dort mal : début d'un cauchemar, lorsque Helmut Kohl figure moderne de  Jules César, reproche à Angela Merkel- Brutus son ingratitude. Combat sanglant, terrible, mais soudain  Angela se reveille à  côté de son mari Joachim Sauer qui dort paisiblement... 

  • Premiers pas  ensuite sur la scène internationale : relookée par sa conseillère en communication, l’ex petite provinciale mal fagotée abandonne sa coupe de cheveux au bol, trouve son style et sa posture : langsam, lentement, mais sûrement... Pragmatique et réfléchie, la méthode empirique d’ une physicienne de formation. 

  • Croquis savoureux également de ses rendez-vous diplomatiques : un Poutine madré ou glacial qui terrorise la chancelière en promenant son labrador autour d’elle. Puis galerie également des présidents français : Sarkozy en ludion agité, Hollande en neuneu vaguement inspiré, Macron si jeune et déjà vieux “ un petit garçon perdu qui aime bien faire des bêtises. “

  • Bref, une leçon d’ histoire très documentée au cours de laquelle Anna Fournier rend hommage au  franco-allemand en une pluie de confettis.

Points forts

  • Avec talent et tendresse, Anna Fournier peint une Angela Merkel profondément humaine, peu dogmatique, loin des clichés sur l’Allemagne “impériale“ véhiculés encore dans certains milieux politiques français. Un portrait nuancé, drôle,  enlevé, mais qui ne gomme pas les zones d’ ombre du caractère de Merkel, qualifiée par un magazine américain “ de femme la plus puissante du monde.” Dureté tranchante de la chancelière lors d’un coup de fil à son homologue grec Alexis Tsipras. Ja natürlich, les potions amères de la troika européenne (commission européenne, FMI et UE) largement inspirées par l’ Allemagne,  seront ingurgitées jusqu'au bout  par le malade grec, qu’elles vont asphyxier. Mais il faut que chacun fasse ses devoirs à la maison martèle alors Berlin. 

  • De belles trouvailles scéniques: un récit onirique et une séquence digne de Charlie Chaplin dans son film Le Dictateur, ainsi à Minsk, lorsque jour et nuit Merkel et Hollande tentent d'arracher à Poutine un cessez-le-feu dans le Donbass. Ce dernier (et là on quitte la vérité historique) va proposer à ses deux partenaires de jouer le sort de l’Ukraine dans une vraie partie d’ échecs. Un jeu à  plusieurs coups, arrosé par quelques verres de vodka. A qui perd gagne… 

  • Une bande- son qui égrène les grands événements de l' actualité de l’ époque et confère au personnage de Merkel une véracité et une épaisseur profondes. 

Quelques réserves

  • Ne chicanons pas sur quelques détails historiques, car tenir en haleine son auditoire (de  nombreux lycéens étaient présents ce soir-là) en une heure et vingt cinq  minutes est une prouesse. 

Encore un mot...

  • Journaliste spécialisé sur l’Union Européenne, j’ai rencontré à maintes reprises Angela Merkel à Bruxelles et à Berlin. La chancelière pouvait se montrer parfois pince-sans- rire : ainsi, lors d’ un sommet européen au cours duquel Jacques Chirac essayait laborieusement et longuement de convaincre Merkel,que le nucléaire français devait être classé dans la catégorie des énergies renouvelables, elle avait ouvert sa  mâchoire de crocodile et laissé tomber ces mots : ” Nein Jacques, le nucléaire ne figure pas  dans les renouvelables.”

Une phrase

  • Angela (à Nicolas Sarkozy)  : « Franchement, vous êtes gonflés, hein ! Les Anglais et les Français vous passez votre temps à nous critiquer, nous les Allemands,  parce qu’on est meilleurs que vous. Mais vous n’avez qu’ à vous aussi, faire des voitures de qualité, au lieu de vendre des fromages qui puent et du thé en sachets. Bon, je te fais rire, c’est déjà ça Nicolas, nous allons faire front commun contre Poutine et nous obtiendrons satisfaction, je te le promets. Mais reste calme, hein. Bon…. Qu’ est- ce que tu dis ? On est quoi? Merkozy ? Ah oui , c’est drôle ! Allez, bis bald, Nicolas. » [puis, à part] Je ne comprends jamais ses blagues… »

L'auteur

  • Anna Fourniert a suivi l’enseignement du Conservatoire National Supérieur d’ Art Dramatique de Paris. Elle a joué dans Berliner Mauer et dans le Cabaret Europe avec l’ équipe du Birgit Ensemble. 

  • En 2019,  elle monte sa propre compagnie, Les Oiseaux de Minerve, co-dirigée avec Marie Sambourg. Sa pièce sur Madame Merkel a été créé en 2020 et jouée pour la première fois dans le off à Avignon.

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