FANNY ET ALEXANDRE
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Thème
Chez Bergman, il y a souvent une lanterne magique qui anime des personnages plus ou moins fantomatiques, il y a aussi des rêves ou des cauchemars d’enfants, des personnages complexes, des vies faites d’espoirs déçus et de renoncements, parfois une omniprésence de pères absents, souvent d’une terreur religieuse, de la frénésie d’amour qui peut surprendre les femmes et les conduire à l’irrémédiable… il y a tant de choses chez Bergman ; mais il y a presque toujours le Théâtre.
Points forts
1 - C’est une pièce chorale avec la troupe de la Comédie -Française, dans un vaste décor, souvent beau et poétique, parfois sombre et oppressant. Les lieux de vie alternent avec les lieux de Théâtre ; le théâtre hante la vie de cette famille complexe, qui le confond parfois avec la réalité. Héléna (Dominique Blanc, excellente) règne en matriarche autoritaire sur ce petit monde de vieux enfants, souvent tout autant déboussolés que les plus jeunes.
2- Julie Deliquet a jonglé entre trois œuvres pour créer ce rendez-vous rare, construit entre le film, la série télévisée, et le roman éponyme du grand auteur suédois. C’est une vasque fresque où la réalité se conjugue avec la fiction théâtrale. Le moment où le père ( Denis Podalydès, excellent et émouvant) répète la scène du spectre d’Hamlet, m’a particulièrement touchée, dans cette séquence miroir, dramatique, qui annonce la seconde partie, beaucoup plus sombre et dure.
3- La découverte de ce personnage obscur et brutal, que la jeune veuve (très belle Elsa Lepoivre) a épousé. Cet évêque, sombre, dangereux et machiavélique est magistralement interprété par Thierry Hancisse, dont la présence devient presque séduisante, en dépit de l’horreur de ses propos.
4 – Tout s'achèvera comme une boucle, revenant sur la joie festive du début de la pièce, grâce au Théâtre retrouvé et repris en main par Héléna, avec une famille restructurée et réconfortée, après tous ces drames.
Quelques réserves
Il est vrai que le vaste plateau ne permet pas les gros plans. Ils manquent un peu ici, surtout pour les visages des enfants, Fanny et Alexandre.
Encore un mot...
C’est un très beau spectacle, touffu, dense, prégnant, avec les angoisses de Bergman, éclaircies le plus souvent dans des farandoles et le rire du Théâtre. Est-ce réel ou bien sommes-nous en train de jouer ? C’est foisonnant, souvent très beau, avec des moments superbes, mais perçoit-on vraiment le propos de l'auteur ? Ce mystère est douloureux, mais plein de charme, dû pour l'essentiel à la qualité de la troupe des acteurs qu'il faudrait tous citer.
Une phrase
« Héléna : Eh oui Oscar, tu le vois, c'est comme ça. On est vieux et en même temps on est un enfant. Et on ne comprend pas où on a pu passer tout ce temps, ce temps qu'on considérait comme tellement important. »
L'auteur
Ingmar Bergman, né en 1918, aurait eu 100 ans en 2018. La Comédie-Française a décidé de célébrer ce créateur suédois, en le faisant ainsi entrer au répertoire ; toute sa vie, il mélangea les genres en étant à la fois auteur, directeur et metteur en scène de Théâtre, ainsi qu’un immense réalisateur cinématographique. Demeurent une centaine de pièces et une quarantaine de films, marqués par son univers si particulier.
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