Douze Hommes en colère
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Thème
Aux Etats-Unis, douze jurés doivent décider du sort d’un jeune voyou accusé d’avoir poignardé à mort son père au cours d’une dispute. Selon la règle, le vote se fait à l’unanimité : coupable – et c’est la chaise électrique – ou non-coupable.
L’affaire semble entendue – la chaise – quand le juré numéro 8 (aucun personnage n’est nommément désigné) vote contre les onze autres, évoquant un “doute légitime” sur plusieurs points de l’accusation. A lui de convaincre les onze, ou de céder à leur pression…
On ne vous dira rien d’autre de l’intrigue, bien qu’il y ait peu de doute que vous n’ayez vu soit la même pièce en 2009 (avec Michel Leeb en numéro 8, dans une mise en scène de Stephan Meldegg), soit une de ses nombreuses adaptations à la scène et à l’écran depuis soixante ans, ou plus sûrement le film remarquable qu’en tira Sidney Lumet en 1957, avec un Henry Fonda ébouriffant dans le rôle principal.
Points forts
Quel huis-clos, mes amis ! Doublement étouffant car la canicule accable les jurés enfermés dans leur salle de délibération et met les nerfs à vif, tandis que la diversité des origines sociales et des caractères favorise les chocs frontaux.
Francis Lombrail a fait ici un bon travail d’adaptation pour le public français du scénario original de l’Américain Reginald Rose (1920-2002). Il est aussi très convaincant dans le rôle du juré numéro 3, véhément contradicteur du numéro 8 (interprété par l’excellent Bruno Wolkovitch), pour des raisons qu’on finira par découvrir au coup de théâtre final.
Quelques réserves
Bien sûr, le théâtre n’a pas les moyens du cinéma : ceux qui ont été cloués à leur siège par l’intensité dramatique du film de Sidney Lumet vont forcément faire la comparaison. Dans sa mise en scène, Charles Tordjman a dû résoudre un problème que n’avait pas Lumet : comment faire tenir et se mouvoir dans un décor ad hoc douze acteurs agités dans l’espace forcément limité de la scène du Théâtre Hébertot ? Solution, réduire le décor à presque rien : deux niveaux séparés par une longue banquette ou s’assoient les jurés pour voter, avec au fond une baie vitrée par où l’on peut juger de la progression de l’orage. C’est minimaliste, gris, dérangeant, mais au moins les personnages peuvent-ils évoluer aisément, s’interpeller et se prendre au col dans le feu du débat sans se marcher sur les pieds. Et c’est tant mieux car Tordjman sait diriger ses acteur avec une belle efficacité.
Encore un mot...
L'idéal: pouvoir emmener des ados voir ce Douze Hommes en colère. D’abord parce que c’est du bon théâtre ; ensuite parce que ça leur donnera l’occasion de réfléchir sur la justice et la démocratie, deux notions quelque peu galvaudées de nos jours. La tirade du juré numéro 11 sur le redoutable honneur donné à un groupe d’hommes de rendre la justice au nom du peuple que, très concrètement, ils représentent à cet instant, est un morceau d’anthologie. Elle n’a pas pris une ride.
Une phrase
« Pourquoi vous avez changé d’avis ?– Un doute ! »
L'auteur
Reginald Rose est plus un scénariste de cinéma et de télévision qu’un auteur de théâtre. Il écrivitDouze Hommes en colère – après avoir lui-même été juré – pour un téléfilm de la chaine CBS, diffusé en 1954, avant de l’adapter à la scène l’année suivante. C’est le film de Sidney Lumet, dont il signa évidemment le scénario, qui le fit accéder à la célébrité, aux oscars et aux Emmy Awards. Gageons cependant que peu de spectateurs français auront retenu son nom, alors que la plupart ont le titre de la pièce en mémoire.
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