DEPENDANCES
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Thème
• Voici Henri, et puis tout de suite Tobias, deux hommes dans la force de l'âge ; ils entrent en scène silencieusement dans ce qui pourrait être un appartement bourgeois, familial, vaste, triste mais vide, totalement vide.
• Les deux frères y ont rendez vous, apparemment pour parler d'un partage, d'un héritage. C'est l'appartement de leur enfance revisité, suite à un deuil. Il faut faire un état des lieux, expédier les affaires courantes, décider... Henri et Tobias semblent équilibrés, normaux, surtout Henri, plutôt distingué, un rien introverti ; Tobias, c'est le contraire : gouailleur et grande gueule, l'arrogance de celui qui a réussi.
• Ils ne se sont pas vu depuis deux ans. En fait, tout les sépare, surtout leur troisième frère, Carl. Il devrait être là celui là, et c'est insupportable, c'est toujours la même chose avec lui, toujours en retard… Dès lors, l'atmosphère se tend, les deux frères s'observent puis s'énervent, les mots explosent, ils en viennent aux mains (mais ne se blessent pas), les questions reviennent lancinantes - et sans réponses. Et Carl qui n'arrive toujours pas. Le mystère s'épaissit...
• Ce portrait de famille brisé, ce duel fratricide, ce huis clos mystérieux et oppressant mettent à contribution la réflexion et l'instinct du spectateur. À chaque étape, l’on progresse dans la compréhension du passé comme dans la perception du futur, et l’on chemine à l'intérieur d'un authentique thriller psychologique.
Dépendances se veut une déclaration d'amour, oui d'amour, faite "à la figure du frère"(dixit l'auteur). " Frères ennemis" ou "Mes biens chers frères" ? La vérité est entre les deux.
Points forts
• Une double interprétation, un double-jeu tout à fait exceptionnels. Thibault de Montalembert, que l'on adore en dandy dans la série 10%, mais aussi Francis Lombrail, exceptionnel en juré haineux dans 12 hommes en colère, sont les fines lames de ce duel à fleurets mouchetés.
• Montalembert notamment recèle une force intérieure qui en fait un personnage solide comme un roc... même quand il craque ; et il en faut du cran face à ce monstre d'insolence et de confiance incarné par Lombrail. Courez les voir, vous en sortirez en état de double dépendance !
Quelques réserves
Fallait-il jouer le dénuement (de l'appartement ) à ce point ? La question mérite d’être posée. Peut-être faut-il voir dans ce “faux point faible“ un parti pris nécessaire pour traduire cette incommunicabilité paradoxale qui règne souvent entre les êtres les plus proches.
Encore un mot...
Deux raisons essentielles pour aller voir et entendre Dépendances :
• Chacun d'entre nous sera concerné, pour peu qu'il (elle) appartienne à une fratrie. Malgré les vicissitudes de l'existence, des parcours divergents, malgré les heurts et malheurs des uns et des autres, les “liens du sang“ ne peuvent être rompus. Ici les rapports humains sont poussés au paroxysme, à la limite du meilleur et du pire. Un gouffre sépare ces “deux frères + un“, et en même temps on ne pourrait pas glisser une feuille de papier entre eux...
• Le talent des deux comédiens sur scène, leur pouvoir d'identification avec le spectateur , la force d'évocation du frère absent... et enfin le suspense digne des meilleurs thrillers psychologiques.
Une phrase
Premiers dialogues, entrée en scène :
TOBIAS: “Quelle heure ?
HENRI : L'heure. TOBIAS : Deux heures ?
HENRI : Dix... Deux heures dix.
TOBIAS (désabusé) : Et allez...
HENRI (rassurant): Il va arriver.
TOBIAS : Les embouteillages ?
HENRI : Peut être.
TOBIAS : Sa femme ?
HENRI : Je ne sais pas.
TOBIAS : Qui lui aura cassé les couilles juste avant que...
HENRI : Je ne sais pas... on ne sait pas.”
L'auteur
• Né en 1981, Charif Ghattaz est un jeune auteur metteur en scène, scénariste et comédien franco-libanais. Il monte sa compagnie de théâtre dès l'âge de 20 ans, avec quatre élèves du cours Florent.
• En dix ans, Ch. Ghattaz a signé une dizaine de pièces, comme "Rotterdam la nuit", "Holiday Inn", "Les Bêtes", "Marcus et les siens", ces deux dernières pièces ayant été montées cette année au théâtre de la Reine Blanche et au festival d'Avignon. En 2015, il a mis en scène aux Bouffes du Nord un spectacle concert du musicien franco- libanais Bachar Mar Khalifé intitulé "Le Paradis de Helki".
• Ch. Ghattaz est un comédien en vue, qui a notamment travaillé avec le réalisateur franco-mexicain Sosa Soria ("Sous nos empreintes", "Après les cendres"), le coréen Park Chan-Wook (deux fois primés à Cannes, pour "Old Boy" et "Mademoiselle") et Terrence Malick ("Une vie cachée").
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