Contes et légendes
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Thème
Des adolescent-e-s se croisent, se jaugent, dialoguent, se séduisent, se quittent, se trahissent, s’aiment, s’affrontent, affrontent des parents défaillants, absents (les hommes surtout ainsi de ce père qui clame : « je suis dans l’incapacité de tenir une maison correctement. C’est pas ma partie ») ou sur protecteurs, bref grandissent et murissent, parfois trop vite. Les quinze tableaux plus ou moins liés les uns aux autres ont en commun de mettre en scène un robot, auxiliaire futuriste et candide d’une jeunesse souvent solitaire, empêtrée dans ses incertitudes et ses désirs, soumise à d’impossibles d'injonctions contradictoires.
Points forts
Tout est beau et convaincant dans ce spectacle.
D’emblée les scènes sont denses, tenues et d’une éloquence sans tapage.
Les dialogues sont âpres, économes et justes, élégants même jusque dans l’ordure de l’insulte et sans doute moins « réalistes » que ne le pense l’auteur, mais pour cela même foncièrement dramatiques.
Les comédiennes sont époustouflantes. Habitant avec grâce des corps de 14 ans elles incarnent la plus pertinente des réponses adressée aux thèses masculinistes qui prétendent que l’époque actuelle « glorifie la confusion entre le masculin et le féminin ».
Les déplacements sur le plateau, dans un décor quasi nu (des fauteuils, un canapé gris atemporels) dessinent le décor à la fois familier et inquiétant d’un quotidien à peine décalé.
Quelques réserves
Il y en a sans doute, mais on n’est pas obligés de les voir…
Encore un mot...
Pommerat esquisse le panorama des interrogations contemporaines à travers la question des identités. En faisant dialoguer humains et non humains, garçon et filles, dialogues dans lesquels le faux n’est pas toujours où on l’attend, il livre un théâtre de l’intime qui jamais ne s’embourbe dans de fades approches psychologisantes. Magnifiquement et intelligemment dynamisée par la perspective futuriste ouverte par la présence courtoise et signifiante des humains artificiels cette exploration se révèle drôle et profonde.
Une phrase
Steven le robot
- Je suis imparfait mais je fais des efforts. J’essaye d’améliorer mon caractère.
- Tu as mauvais caractère ?
- Je n’ai pas compris ta question.
L'auteur
On connait le Ca ira (1) Fin de Louis de Joël Pommerat qui demeure un moment inégalé du théâtre contemporain et une des plus fortes lectures historiques et politiques de la révolution française. On aimera Contes et légendes pour les mêmes raisons (une mise en espace virtuose des groupes humains, une utilisation des lumières qui semble l’évidence) et d’autres raisons non moins pertinentes tant Pommerat continue avec brio son exploration des conflits intimes des êtres.
Le succès est tel que pour cette saison le spectacle est complet, hélas !
Commentaires
Je suis allé voir la pièce de Pommerat avec une troupe de théâtre amateur d'adolescents . Certains avaient joué Cendrillon et connaissaient l'univers et la scénographie singulière de l'auteur . On a tous adoré , les actrices d'abord d'une justesse peu commune. Le sujet offre aussi une porte d'entrée à de nombreuses thématiques contemporaines : l'adolescence dans sa construction identitaire, sexuelle , les rapports hommes femmes ou le rôle des robots sociaux dans un avenir imminent , Des expérimentations existent déjà dans des EPHAD et les nounous androides sont loin d'appartenir au mythe auquel renvoie le titre de la pièce. Notre humanité ou du moins ce qu'il en reste est questionnée .Et c'est sans concession, cru et finalement pessimiste . Ces êtres artificiels programmés pour être bienveillants en toutes circonstances ne font que révéler notre monstruosité . Superbe spectacle qui interroge sur notre monde en devenir .
Contrairement aux nombreux avis dithyrambiques glanés sur la toile, nous avons espéré pendant 1h50 interminable revoir se jouer (ou interpréter nous mêmes) le truculent « Yannick » de Quentin Dupieux tant cette pièce est affligeante. Cendrillon nous avait beaucoup plu pourtant. Il est difficile de défendre une pièce dont le propos a déjà été surexploité de manière hautement plu profonde par la SF ( Real Humans!) ou ce regard sur l’adolescence rempli de stéréotypes épuisés . On attend franchement mieux du théâtre contemporain.
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