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FOURMIS - de et mis en scène par Florian Pâque
Avec : Florian Pâque, Nicolas Schmitt
THEATRE DU TRAIN BLEU – 10H
Sur le toit de la Grande Tour, Antoine regarde les horizons qui s’ouvrent devant lui. Il rêve de s’envoler vers Patong, en Thaïlande, loin de sa ville où tous les citadins, vus du ciel, semblent des fourmis à l’ouvrage. Pour Antoine, l’échappatoire serait de devenir chauffeur à son compte et de travailler avec “La Plateforme”, une application électronique dont les publicités inondent les réseaux sociaux. Mais la Plateforme tiendra-t-elle toutes ses promesses ? Jusqu’où Antoine sera-t-il prêt à aller pour échapper à sa condition ?
« Faut pas rêver trop grand quand on est chez les petits ». Et si vous aviez un rêve dans la vie et que vous décidiez d’y consacrer toute votre énergie, votre vitalité pour échapper à votre condition ? C’est tout l’itinéraire d’Antoine, petite fourmi perdue au milieu de cette immense société déshumanisée qui ne vous laisse pas toujours votre chance de vous réaliser. Alors quand les réseaux sociaux s’en mêlent et vous promettent monts et merveilles pourquoi ne pas tenter d’y croire ? Une plate-forme de chauffeurs s’offre à lui comme l’horizon facile pour accéder au rêve. Une fable réaliste, touchante qui dénonce les miroirs aux alouettes qui vous asservissent plus qu’ils ne vous épanouissent. Le droit au bonheur passe-t-il par le sacrifice de l’amitié, de la famille ? Jusqu’où peut-on aller ? Jusqu’au faut-il aller ?
Florian Pâque et Nicolas Schmitt incarnent ce courageux idéaliste entouré d’un père aimant un peu dépassé, d’une machine déshumanisée qui sous prétexte de liberté d’entreprise vous exploite, jusqu’à « l’esclavagisme consenti » et toute une galerie de personnages, écueils et embûches à franchir.
Un spectacle généreux, optimiste, malgré tout, qui nous dit qu’on ne remplacera jamais l’humain et que sans « l’autre », l’ami, celui qui parle à votre cœur, nous risquons de n’être que des fourmis.
Un gros coup de cœur pour cette comédie moderne, sociale au dispositif scénique simple efficace, empreint de poésie. Un spectacle à la pointe du cœur.
Recommandation : 5 cœurs
LE SECRET DES CONTEUSES – de et mise en scène par Martine Amsili
Avec : Delphine Zentout, Julia de Gasquet, Katia Tchenko, Séverine Cojannot, Maria Pitarresi
À la faveur d’un secret, chaque galante déploie sa verve en toute liberté, dévoile un amour clandestin, fait revivre une nuit d’alcôve, et enfin révèle une passion cachée dans laquelle elle
se serait éperdument jetée et dont le nom de l’homme ne saurait être porté à la connaissance avant que toutes n’aient parlé. Ce jour ne ressemble à aucun autre et réunit uniquement ce qu’il y a de plus féminin, de plus lettré, et de plus célébré en ce monde. Ninon de Lenclos a choisi la grande éloquence de quelques grandes Dames pour un petit jeu de sa composition intitulé : Le Secret des conteuses.
Dans un décor tout empreint du raffinement du 17ème siècle, Martine Amsili compose une ode aux grandes femmes de son temps en brodant une fable élégante autour de ces mystérieuses amours qu’elles vont évoquer les unes après les autres et dont le dénominateur commun saura vous surprendre. Dans un style respectueux du temps, on notera toute la recherche d’une langue écrite au plus près de la plume du Grand Siècle.
Recommandation : 2 cœurs
L’ILE DES ESCLAVES – de Marivaux
Mise en scène Christophe Lidon
Valérie Alane, Thomas Cousseau, Armand Eloi, Morgane Lombard, Vincent Lorimy
THEATRE DE LA CONDITION DES SOIES - 19H30
Accoutumé au jeu de l’inversion des rôles, Marivaux invente une utopie réjouissante : Voici une république où les maîtres sont corrigés de leurs défauts et les valets reconnus comme des humains à part entière ! Le siècle des Lumières s’amourache d’une belle illusion … l’égalité. La valeur d’un homme ne doit-elle pas se mesurer à la noblesse de son cœur ? Qu’en est-il dans les coulisses, quand les acteurs sont confrontés aux mêmes injustices ? Dans cette troupe, les loges sont, elles aussi, une île de comédie, mais qui sont les “esclaves” ? Et les “maîtres” ? Luttes de pouvoir, d’ego, et éclats de rire … La raison peut-elle s’imposer ? Comme le dit Arlequin : “Je ne te ressemble pas, mais moi, je n’aurais point le courage d’être heureux à tes dépens.”
C’est une version tout à fait particulière que nous propose ici Christophe Lidon avec une idée originale de mise en abîme de la pièce en présentant le plateau avec son envers et son endroit. Le texte de Marivaux et ses enjeux viennent se confronter au drame plus ordinaire qui se joue hors scène dans la troupe. Avec finesse et intelligence les jeux de pouvoir, les perspectives de domination et de soumission dus au rang social chez Marivaux, viennent faire écho à nos principes contemporains avec l’injustice des sexes et les principes de hiérarchie. Raison et pardon font-ils bon ménage ?
Avec habileté et brio la troupe merveilleusement dirigée passe d’un répertoire de langage à l’autre pour notre plus grand plaisir. De la belle ouvrage dont il ne faut pas vous priver.
Recommandation : 4 cœurs
TRUFFAUT-CORRESPONDANCE – de François Truffaut
Mise en scène de Judith d’Aleazzo et David Nathanson
Avec : David Nathanson
THEATRE TRANSVERSAL - 14H40
Sous nos yeux, un pianiste à sa table et un homme concentré, assis dans un fauteuil. Il ressasse les pensées qui le traversent. La musique baigne le plateau et … il parle … ou plus exactement , il écrit. C’est François Truffaut. C’est sa correspondance qui s’égrène au fil de la plume, au bord des lèvres et du cœur. Il interpelle les interlocuteurs de sa vie. Cette vie qu’on découvre de celui pour qui le cinéma fut le remède miracle de sa vie.
Dans cet objet théâtral singulier qui nous est proposé, on est surpris par la forme minimaliste, réduite à sa plus simple expression. François Truffaut ne nomme pas ses interlocuteurs. « Monsieur », « Madame » sont les destinataires de ces lettres, que parfois on reconnaît au fil du temps mais que bien souvent on découvre. Au besoin le merveilleux pianiste qui l’accompagne lève le voile de l’identité jamais révélée par les mélodies jouées. C’est un duo symbiotique que ces deux êtres là au plateau n’en faisant plus qu’un. Alors, une fois la forme acceptée, on plonge dans les méandres de la vie accidentée de cet être qu’on croit connaître à travers ses films. On est immergé dans ce parcours multi-accidenté de la vie et on découvre un autre Truffaut. On rencontre François. Un François blessé, révolté, animé d’une force de vie, d’une conviction, d’une revendication, d’une véhémence parfois… C’est un François virulent, pétri d’une humanité heurtée qui fut sauvé par le cinéma à l’âge de 18 ans avec une rencontre déterminante. On pourrait croire ce spectacle destiné à un public cinéphile averti, il n’en est rien. C’est une déclaration d’amour de l’interprète à un homme qu’il admire. Il s’est abandonné aux mains de sa metteure en scène qui l’a dirigé finement avec justesse et précision. Il ne joue jamais François Truffaut, il incarne une force de vie étonnante, la force d’une résilience longue et patiente. On ne parle jamais de Truffaut mais on découvre François.
Recommandation : 4 cœurs
OPERETTE A RAVENSBRUCK - de Germaine Tillion
Mise en scène : Claudine Van Beneden
Avec : Solène Angeloni, Angeline Bouille, Isabelle Desmeros, Barbara Galtier, Claudine Van Beneden, Raphaël Fernandez - Musicien : Grégoire Beranger
THEATRE DU CHIEN QUI FUME - 10H30
Germaine Tillion, déportée à Ravensbruck , écrit une opérette-revue qui met en scène un conférencier qui expose ses théories sur les « Verfügbar » - l’espèce des déportées… Face à lui un groupe de prisonnières chantent et dansent pour contester, dénoncer.
Dénoncer l’horreur des camps en contournant le sujet pour résister au désespoir et raconter le sort des femmes du camp de Ravensbruck. Revêtir le costume de l’opérette et de la légèreté, c’est l’entreprise folle et courageuse, héroïque de Germaine Tillion, grand témoin de l’époque. Un spectacle inachevé et quasiment oublié dans la mémoire de l’Histoire et qui vient nous percuter en plein coeur de ce festival 2022.
Non, ce n’est pas un énième spectacle sur les camps mais un témoignage direct sans fard de celles qui ont été marquées dans leur chair. Le principe-prétexte de la conférence ethnologico-scientifique en fait une œuvre originale qui mêle adroitement la légèreté de la musique et l’écriture cinglante du livret. Une pièce plus que nécessaire pour faire connaître aux jeunes générations ce que fut cette époque et une bonne piqûre de rappel pour des consciences qui ont tendance à s’endormir. « Le ventre est encore chaud d’où est sortie la bête immonde ». Ne passez pas à côté de ce spectacle majeur.
Recommandation : 4 cœurs
BRACONNIERS – d’Eric Bouvron et Benjamin Pennamaria
Mise en scène Eric Bouvron
Avec : Yannis Baraban, Jean-Erns Marie-Louise, Francis Bolela, Mexianu Medenou, Aurélia Poirier, Marie-Anne Favreau, Raphaël Maillet, Christophe Charrier
THEATRE DES HALLES - 21H
Lorsque le rhinocéros de Paul Wright est abattu par des braconniers au sein de sa réserve, il en fait une affaire personnelle. Au même moment, James Ngobo cherche des réponses après le meurtre de son fils . Deux pères, deux cultures, deux destins s’entremêlent sur fond d’apartheid. Un road movie théâtral dans la brousse africaine.
6 casiers à bouteille, 2 bouteilles de bière, voilà ce avec quoi Eric Bouvron nous entraîne dans la savane sud-africaine de façon saisissante. Ce magicien du plateau, dans une mise en scène épurée imagine cette tragédie humaine violente et déchirante magnifiquement interprétée par une équipe de comédiens puissants. Dans le cadre du jardin du Théâtre des Halles, en plein air nous voilà transportés dans les méandres des passions humaines et dans la beauté de paysages dont nous avons seuls la charge. On est en peine de donner raison à tel ou tel des protagonistes et on reste saisi à chaque minute par la charge émotionnelle du spectacle.
Précipitez-vous dans ce jardin qui vous fera voyager au-delà des frontières du cœur et vous offrira un dépaysement bouleversant.
Recommandation : 5 cœurs
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