Chroniques festivalières d'Avignon - 7 juillet

Notre recommandation
4/5

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VIRGINIE ET PAUL - de Jacques Mougenot
Mise en scène Hervé Devolder

ESSAION THEATRE - 10H

Avec : Carole Deffit, Jacques Mougenot, Fabian Richard, Patrick Villanueva, Benoît Dunoyer de Segonzac, François Chambert

Paul et Virginie invitent leurs amis Paul et Virginie à dîner. Paul, le mari de Virginie est amoureux de l’autre Virginie et sa femme, Virginie est courtisée par l’autre Paul. Les deux Paul sont joués par le même acteur (qui s’appelle Paul) et les deux Virginie par la même actrice (qui s’appelle Virginie). Pendant qu’ils répètent la pièce, Virginie et Paul (les conjoints respectifs de Paul et Virginie) ont une aventure. Tout cela serait plus clair si tout le monde n’avait pas le même nom, mais ça ne serait plus une comédie.

De bonne heure et de bonne humeur, c’est ainsi que peut commencer votre séjour à Avignon. Quel délice que  cette comédie élégamment troussée avec verve par Jacques Mougenot dans une mise en scène d’Hervé Devolder débridée à souhait. Le rire s’accroche à vous dès le début et ne vous quitte pas pendant une heure vingt de chansons, de quiproquos, de situations plus rocambolesques les unes que les autres. Carole Deffit et Fabian Richard y excellent dans des compositions remarquables, véritables performances.

Jacques Mougenot joue tous les autres personnages avec son flegme et son petit air de ne pas y toucher qui le rend irrésistible. Sautez de votre lit et courez vous régaler avec Paul et Virginie ou Virginie et Paul … enfin avec eux !

 

LA PAGAILLE – de Marianne Pick Prince, d’après la main coupée de Blaise Cendrars
Mise en scène d’Ariane Pick

THEATRE DES LUCIOLES - 13H45

Avec : Pierre Pfauwadel, François Pick, Jacob Porraz, Gilles Vajou

C’est l’éloge de la désobéissance, c’est une parole qui ne plie pas, c’est sourire quand tout tourne à la tragédie.

Ce sont les affres de la guerre vécues au travers du prisme de Blaise Cendrars qui nous narre l’histoire de ces pauvres bougres qu’on a envoyés sans conviction se faire tuer au front mais qui, du simple soldat à l’officier, ont fait leur possible pour échapper à l’horreur d’une boucherie programmée. Une ode à la désobéissance et à la résistance passive. Petits soldats, petits hommes baignant dans une fraternité de circonstance. On pense à au vers de Villon : « Frères humainsqui après nous vivez, N'ayez les cœurs contre nous endurcis, Car, si pitié de nous pauvres avez, Dieu en aura plus tôt de vous mercis » Après tout il faut vivre et m… aux idéaux qui nous échappent ! L’histoire ne les retiendra pas et pourtant ils auront été de celle-là qu’on appelle la Grande Histoire.

 

EL DORADO - d’Alexis Moncorgé
Mise en scène de Caroline Darnay

THEATRE DU ROI RENE – 16H20

Avec : Alexis Moncorgé

Au printemps 1528, Alvar Nuñez Cabeza de Vaca est un conquistador parmi d’autres qui s’apprête à débarquer en Floride, pour y trouver la mythique cité d’Eldorado. L’expédition est un fiasco et se termine par un naufrage. Huit ans plus tard, Alvar réapparaît de l’autre côté du continent, au Mexique. Presque nu, à la tête d’une escorte de près de mille indiens, il est méconnaissable.

Quel texte magnifique et quel spectacle éblouissant que celui que nous offrent la plume et le talent de comédien d’Alexis Moncorgé ! Il y a dans son écriture tout à la fois de l’épique et une profonde humanité. Un style et un choix des mots qui nous touchent. L’histoire d’un homme qui préfère aimer plutôt que d’asservir. L’histoire d’une aventure comme aimaient nous les raconter Werner Herzog ou Ridley Scott au cinéma et que Caroline Darnay a su transposer en scène avec un univers lumineux et sonore de grande qualité et de précision. Un petit bijou de spectacle qui nous transporte au-delà des mers à travers l’histoire bouleversante de ce conquistador qui conforte sa foi grâce à ses talents de guérisseur et accepte le sacrifice d’un amour inconditionnel et familial à l’idéal d’un peuple. En dire plus sera déflorer cette expédition en terre inconnue que je vous encourage vivement à découvrir. Mon premier gros coup de cœur.

 

DANTON, les derniers jours du liond’Etienne Menard
Mise en scène : P. Boucard

Théâtre des Corps saints – 18H35

Avec: B. Castin, Y-P. Denielou, J-B. Germain, S. Giuranna, E. Menard, M-L. Windisch

Novembre 1793. Danton revient à Paris pour infléchir la politique de terreur menée par Robespierre et le comité de salut public. Mais les amitiés et les alliances de 1789 ont changé, les enjeux aussi....

Cette jeune compagnie nous offre un spectacle historique précis, d’une grande honnêteté en évitant les caricatures souvent véhiculées. On entre avec eux dans l’intimité des relations de ces compagnons d’armes que l’ambition, la folie et l’emballement des événements ont séparés malgré une admiration réciproque. On redécouvre l’amitié indéfectible du grand lion sensible, pétri de l’idéal premier de la révolution, avec le sensible et fougueux et raisonné Camille Desmoulins. Aucun des personnages n’est traité à charge et chacun se fera sa propre opinion des ces personnalités emportées par le flot de la Révolution, de ses excès , de ses injustices qui conduiront notre société à porter ces trois plus beaux principes : LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE. Les comédiens sont justes, engagés et transpirent d’humanité. Ne manquez pas cette plongée dans l’Histoire signée à la pointe du cœur par Etienne Ménard.

 

MARCUS – de Stéphane Guérin
Mise en scène Olivier Macé

THEATRE DE L’ORIFLAMME  - 21H45

Avec : Jean-Baptiste Marcenac

Un homme assez banal, “dans la moyenne” comme il aime à se présenter, se perd dans sa vie de vendeur de prêt-à-porter et dans sa vie de couple, jusqu’au jour où
il rencontre Dylan, un génie de 16 ans qui va transformer son existence, et propulser Marcus des rayons de chez H&M au sommet de la Haute Couture.
Marcus revisite avec talent le mythe de Faust, en abordant des thèmes
aussi profonds que la paternité, l’adoption et les drames de la vie urbaine.

Un spectacle bouleversant qui entre dans le bonheur par le mensonge et la duplicité. Peut-on mentir pour être heureux ? Est-ce un crime d’honorer une mémoire en commettant une imposture. Quel prix vaut le bonheur ? C’est tout cela qui percute Marcus – magnifiquement interprété par Jean-Baptiste Marcenac. Ce magnifique comédien donne à son personnage par une économie de moyens, tout à la fois : sincérité, lâcheté pudique, sentiments bouleversés et humanité brisée. On traverse avec lui des méandres du cœur amoureux, de la paternité rêvée, et le principe du « courage, fuyons ». Olivier Macé dirige merveilleusement son comédien et lui fabrique un cocon d’une économie scénographique délicate.

On sort de ce spectacle balancé entre le pardon aux lèvres pour son héros et une petite voix qui nous dit « et toi, tu aurais fait quoi ? ». Allez tenter l’aventure de Marcus. Un très joli texte de Stéphane Guérin.

 

DIEGO de Barthélémy Fortier, Hugo Randrianatoavina, Alexandre Cordier
Mise en scène : Barthélémy Fortier
Écriture : Alexandre Cordier

THEATRE AVIGNON REINE BLANCHE - 16H45

Avec : Hugo Randrianatoavina

Né en 98, le jour où la France est championne du monde, son destin se lie à jamais à l’histoire du football.

Un père fervent supporter, un passage obligé par les stades et les entraînements, tout le pousse pourtant vers le banc de touche.

Est-il condamné à devenir spectateur professionnel ? Nous suivons la vie de Diego sur qui plane le spectre du football, de son milieu social, de son enfance, de son père, et de Diego Maradona.

Ce spectacle est la rencontre étonnante d’un jeune auteur Alexandre Cordier et d’un jeune metteur en scène Barthélémy Fortier. Une expérience théâtrale unique où le théâtre exalte le sport et le sport magnifie le théâtre. 

Sur un sujet inattendu et original, la prestation tout à la fois artistique et performative de Hugo Randrianatoavina est puissante, émouvante. Le parcours de ce jeune homme questionne, bouleverse, encourage. La forme originale de la narration balance entre le conte, la fable et l’épopée et atteint tous les publics. On est touché par l’esthétique développée par Barthélémy Fortier. Sa simplicité, son sens de l’essentiel impriment à la scénographie des images et conduisent le spectateur à créer lui-même ses propres images, grâce à un subtil et créatif jeu de lumières. Nous sommes en immersion constante avec Diego. La dramaturgie permet à chacun de s’identifier au héros à travers tout ce que notre société véhicule de fantasmes, d’espoirs, d’illusions avec l’univers du football. Un défi pour la vie, un défi pour l’honneur que l’aventure de ce jeune homme qui est né sous l’étoile emblématique de Diego Maradona qui va décider de son propre destin à force de volonté.

Une écriture forte qui rend hommage au pouvoir des mots qui donnent du sens à la vie. Une mise en scène émouvante et inventive qui fait la part belle à son interprète. La jeune création est exaltante quand elle se conjugue avec tous ces ingrédients.  

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