Bigre
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Thème
Guillois installe trois chambres de bonnes, recyclées en appartements : de minuscules cages à lapin sous les toits, dont les propriétaires vont se croiser, s’emmêler, s’engueuler, s‘aimer, s’échapper et se retrouver … tout cela sans un dialogue, à la façon des films muets ou du spectacle-clown.
Points forts
- Les acteurs sont absolument formidables dans une histoire qui peine à se développer:
Olivier Martin-Salvan vit dans un espace ultra moderne tout laqué de blanc. Maniaque, avec son mini aspirateur il nettoie ses semelles de chaussures chaque fois qu’il rentre, et les toilettes, encastrés, pivotent du dessous du lit au moindre claquement de mains (on peut s’attendre aux gags qui en découlent). Il incarne parfaitement ces êtres, que nous sommes parfois, qui peuvent devenir si dépendants des services, de l’assistanat par la technologie, et de la déco contemporaine à l’épuré absolu…
Évidemment c’est encore plus drôle lorsque ce grand gaillard est confronté à son inverse. Pierre Guillois est son voisin, il vit dans l'accumulation et le désordre, son lit hamac pend au-dessus de sa cuisine sale, ses cheveux sont gras et ses vêtements guenilles…
Les deux hommes ne cessent d’éprouver leur altérité, séparés uniquement par une feuille de placo, prétexte à de nombreux gags…
Une femme (Agathe L’Huillier) débarque alors. Elle est vulgaire, pulpeuse, blonde, elle a un paillasson avec un chien-chien, et enchaîne le DIY, utilisant ses deux voisins conciliants comme cobayes…Le gros, hygiéniste, le maigre, bordélique, tentent donc de gagner son cœur… après maintes péripéties qui s’enchaînent difficilement, l’un et l’autre laissent filer la douce. Ils restent entre voisins qui doivent apprendre à composer avec leurs différences…
- Les acteurs ont tous réjouissants. Particulièrement Olivier Martin-Salvan en chanteur de karaoké qui interprète les tubes uniquement en japonais…
- Mention particulière pour le travail des effets spéciaux sur le plateau. Les « trucs » sont visibles, fils de nylon, soufflerie, gags très Keaton-esques. Lorsque faits artisanalement, c’est toujours un plaisir de se laisser surprendre comme des gamins.
Quelques réserves
La dramaturgie est paresseuse, on ne dépasse pas l’enchaînement de gags qui se succèdent de manière trop artificielle. On s’attend très vite à la chute des sketchs, et le rire se fait alors de plus en plus rare (je parle ici vraiment pour moi, car la salle semblait assez conquise…).
Encore un mot...
Pierre Guillois a fait une belle tentative pour renouer avec le burlesque, le théâtre de poche et de bric et de broc.
Impossible de citer Tati en référence (même si l’on y pense) car malgré une très juste et drôle interprétation, on s’ennuie assez vite tandis que le scato et les blagues vulgaires finissent par éclipser le reste.
Une phrase
- « Me and you and you and me
No matter how they toss the dice, it has to be
The only one for me is you, and you for me
So happy together » (chanson des Turtles qui souligne l’absurdité à tenter de faire vivre ensemble trois êtres si antagonistes).
L'auteur
Pierre Guillois a été artiste associé au Quartz, Scène nationale de Brest, de 2011 à 2014. Avant cela il a été directeur du Théâtre du Peuple de Bussang, de 2005 à 2011; et artiste associé au Centre dramatique de Colmar, de 2001 à 2004. Il écrit et met en scène Le Gros, la Vache et le Mainate ; Les Affreuses ; Les caissières sont moches. Avec la chanteuse Annie Ebrel, il crée Le Chant des soupirs. Il écrit et met en scène Loin du soleil dans le cadre d’un atelier spectacle à l’ENSATT.
Il a été l’assistant d’Anne Théron, Jean-Michel Ribes et Matthew Jocelyn.
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