Au pied du mur sans porte
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Thème
Libellule est un garçon un peu simplet, qui traverse la vie sans réfléchir, parfois aidé par son ami imaginaire. Un ami pas si innocent; cet autre est son frère, mort–né dans le ventre de sa mère. Chez Lazare tout est double, pas si simple, avec des ombres portées, des mélodies sous-jacentes, des mots-doubles. Libellule doit aller dans une école spécialisée pour les enfants comme lui. Mais les professeurs y sont très, très particuliers eux aussi, capables d’orgasmes linguistiques sur des mots tels que « communication » ou « difficulté »…
Lazare dénonce le système, qui prend, qui recrache, qui abandonne. La mère de Libellule finit par le laisser; il erre dans la rue, s’acoquine avec des dealers, et tombe dans la drogue. Les fantômes de la ville et de l’Algérie viendront le hanter…
Points forts
- Cette pièce relève du conte, de l'exercice de style linguistique, et mélange acrobaties, danse, slam, chant folklorique, rock, chansonnettes, poésie, jeux d'ombres chinoises... Ces formes différentes dispersent en apparence l’intrigue, éclatent la dramaturgie mais c’est pour mieux accéder à l’histoire apparemment banale d’un jeune homme inadapté qui dérive au sein d’un système vicié. Tout est dit, en chanson, en hystérie, en trop, en drôle, alors tout passe et pourtant nous assistons à une véritable tragédie.
L'ombre revient donc sans cesse, révélant des silhouettes, projetant des personnages malgré eux. Les uns et les autres agitent les lumières sur scène afin d’éclairer ce qui les arrange, créant encore plus d’ombres derrière. Cette pièce peut paraître foutraque, fofolle, excessive, mais sa puissance réside dans ses contrastes, dans quelques phrases lâchées rapidement de manière apparemment anodine et dont le sens résonne encore longuement.
Tout est dit donc, et le système dénoncé de manière apparemment loufoque et drôle. Pourtant c'est bien triste de voir ce gamin chuter dans la drogue et abandonné par sa mère, avant si dévouée...
- Bravo aux acteurs qui donnent tout pendant 2 heures, aux musiciens dont les partitions offrent de très beaux moments pour respirer et rêver, aux calembours et acrobaties corporelles tant que linguistiques.
Quelques réserves
On peut être dérouté par une mise-en-scène éclatée, qui peut paraître dispersée. Ca hurle, ca chante, danse et, pourtant, comme un palimpseste l’intrigue s’épaissit, nourrie par toutes ces formes.
Encore un mot...
Lazare est un metteur en scène à suivre, dont l’œuvre est vouée à prendre plus d’ampleur sur la scène contemporaine. Il témoigne de son passé et des luttes urbaines avec poésie, entre clown, spectacle pour enfants (très avertis) et conte philosophique…Tout cela pensé avec une liberté insolente…
Une phrase
« J’ai l’impression que le monde s’est tourné vers le dedans et que le temps a fermé le verrou ».
L'auteur
Lazare a franchi un jour les portes du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis. Depuis, il n’a plus quitté les salles et les plateaux, écrivant ses premières pièces et multipliant les rencontres avec des metteurs en scène tels François Tanguy, Claude Régy ou Stanislas Nordey, qui l’invite à rejoindre l’École du Théâtre National de Bretagne. Auteur dès son adolescence, improvisateur dans les lieux publics, il devient acteur et metteur en scène avant de créer, en 2006, sa compagnie, Vita Nova, dont le nom est une référence à Dante. Il est associé au Théâtre de Strasbourg, et prépare deux prochaines pièces au théâtre de la Ville et au 104.
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