ANDROMAQUE
COUP DE JEUNE POUR LES AMOUREUX DE RACINE
De
Jean Racine
Mise en scène
Jean-Yves Brignon
Avec
Joël Abadie, Sophie Neveu, Suzanne Legrand, Augustin Dewinter - en alternance avec Emma Debroise, Claire Delmas, Benoit Guibert.
Notre recommandation
3/5
Infos & réservation
Théâtre de l’Epée de Bois – Cartoucherie de Vincennes
Route du Champ de Manœuvre
75012
Paris
01 48 08 39 74
Du 11 au 28 janvier 2024. Du jeudi au samedi à 19h – Samedi et dimanche à 14h30
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Thème
- A la fin de la guerre qui a opposé Troie à Athènes, Pyrrhus 1er roi d’Epire a remporté la bataille décisive. Hector, roi des Troyens a été tué et sa veuve Andromaque est au désespoir. Elle est prisonnière de Pyrrhus avec son jeune fils Astyanax.
- Pyrrhus tombe amoureux d’Andromaque, bien qu’il se soit engagé auparavant auprès d’Hermione. Il soumet Andromaque à un chantage affreux mettant la vie d’Astyanax dans la balance, mais Andromaque ne lui cède pas, toute au souvenir de son époux défunt.
- Survient Oreste, missionné par les Grecs pour « écarter » sans états d’âme Andromaque afin d’éviter une mésalliance avec la race honnie.
- Les ressorts de la tragédie qui se noue sont en place. Place au déchainement des passions !
Points forts
- Un concentré du drame racinien au paroxysme de la passion amoureuse qui conduira les quatre personnages mythiques au terme de leur destin tragique : tour à tour, Andromaque, Hermione, Oreste et Pyrrhus s’affrontent tels des gladiateurs au centre d’une arène réduite à un cercle clôturé d’un cordage au sol (la « guinde » qui symbolise le théâtre).
- Ce faisant, ils libèrent une énergie considérable pour tenter de se libérer de la terrible fatalité impitoyable qui les lie - « Oreste aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque qui aime Hector qui est mort » - dans une chaine infernale au prix de la vie d’un enfant adoré.
- Deux comédiens, Hermione (Sophie Neveu) surtout et Oreste (Joël Abadie, endossent leurs rôle avec une émotion et une fougue très convaincantes au sein d’une mise en scène et de décors réduits à leur plus simple expression.
- La magnifique langue de Racine, restituée avec clarté et force, en est d’autant plus valorisée, et la limpidité de l’intrigue est mise en exergue dans cette adaptation allégée, mais fidèle. La poésie des alexandrins est soulignée, et contraste avec la beauté brutale du désir exprimée par les protagonistes.
- Il faut souligner la modernité et la rigueur théâtrale du plateau, avec les unités de lieu (et d’espace), de temps et d’action renforcées, puisque les rôles s’enchainent sur un seul et même tableau, les acteurs jouant plusieurs rôles avec une énergie débordante propre à la jeunesse (Racine avait 28 ans).
Quelques réserves
- Quelques libertés avec les costumes des interprètes nous interpellent : Oreste en débardeur et ceinturon de camionneur surprend, alors qu’à côté, Hermione en tutu nous transporte à l’Opéra tandis que Pyrrhus en officier de marine nous égare.
- Au-delà d’une parfaite didascalie, cette nouvelle Andromaque mériterait certainement un peu plus de spectacle dans la mise en scène.
- Pyrrhus (Augustin Dewinter) est séduisant mais, sauf un accès de rage un peu attendu, il ne manifeste guère d’émotion.
Encore un mot...
- En lever de rideau, le metteur en scène Jean-Yves Brignon saisit un prétexte pour introduire la pièce dans son originalité, le dépouillement de la mise en scène et l’énergie de ses jeunes interprètes.
- Ceux-ci, en réalité quatre jeunes gens désœuvrés voulant s’amuser, se livrent à un jeu en construisant un décor de théâtre avec des bouts de ficelle et, découvrant dans une malle de vieux costumes de cirque, ils se glissent avec fougue dans des personnages de Racine.
Une phrase
Pyrrhus à Andromaque :
« Je ne balance point, je vole à son secours,je défendrai sa vie au dépend de mes jours,
mais pour ces périls ou je courre pour vous plaire,
me refuserez-vous un regard moins sévère ?
Haï de tous les Grecs, pressé de tous côtés,
me faudra-t-il combattre encore vos cruautés ? »
(Acte 1 scène 2 - texte original)
L'auteur
- Jean Racine (1639-1699), après une solide éducation par les jansénistes de Port-Royal, se tourne très vite vers la littérature et le théâtre. Il rencontre son premier succès avec Alexandre Le Grand (1665), mais tout de suite après il écrit Andromaque (1667), considéré comme un chef d’œuvre, fait l’unanimité et lui vaut les faveurs du Roi Soleil.
- Dans son théâtre, Racine peint la passion amoureuse comme une force fatale qui détruit celui dont elle s’empare.
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