Trois jours avec Norman Jail
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Thème
La narratrice, une étudiante en lettres, rencontre au début de l’an 2000 à Aunis, Norman Jail, un vieil écrivain mystérieux, qui n’a publié qu’un seul roman, à vingt ans, juste avant la guerre. Depuis il entasse ses innombrables manuscrits, pour construire « un monument aux mots », auquel il a tout sacrifié ! Il passe sa vie à écrire, à la recherche du chef d’œuvre inaccessible dont il rêve, sans parvenir le plus souvent à dépasser le premier chapitre. Il se lance dans une sorte de monologue sur son travail d’écrivain, combat douloureux, inlassable, pour combler « un trou, un gouffre ». La jeune fille se passionne pour les confidences de « ce vieux lutteur des mots », qui mêle habilement vérités et mensonges.
Points forts
• Pour Norman Jail, l’écriture est à la fois un instinct, une sensation, une émotion, un élan, un tour de magie, une perpétuelle naissance, un feu sacré, une révolte …
• Le travail de l’écrivain est comparé à celui du laboureur, du sculpteur, du musicien ; il joue avec les mots, il les coupe, il les frotte comme des silex. Ce sont des remparts : « sans écrire, je meurs. »( jail, mot anglais, qui signifie prison )
• Il considère que l’inspiration est une apparition, née du silence, du jeûne !
• Il rapproche « écrire » de « crier », il dit qu’il écrit avec son cœur, dans une démarche égoïste et généreuse, car parler de soi, c’est parler des autres.
• Pour lui, l’écriture vient du désastre, de l’effondrement, du manque, pour remplir un vide, une blessure de l’enfance jamais cicatrisée, l’ignorance de ses origines.
• Ce drôle d’écrivain, qui se cache derrière de nombreux pseudonymes, nous livre une réflexion subtile sur vérité ou fiction, dans cet univers romanesque de miroirs, d’illusions.
Quelques réserves
Le lecteur pourra être effrayé par ce torrent de mots, par toutes ces questions littéraires, par les contradictions du personnage, par les jeux complexes entre le faux et le vrai, dans une mise en abyme labyrinthique.
Encore un mot...
Un roman puissant, brillant, virtuose, sur les affres de l’écriture, quand elle est vécue comme une passion dévorante. Eric Fottorino se dévoile sans doute à travers ce monologue, dans lequel il expose et analyse le travail du romancier, de la conception de l’œuvre jusqu’à sa naissance, en passant par les attentes jamais satisfaites. Il insiste sur l’obsession, la rage, la frénésie, qui s’emparent de lui, pour se révéler, se cacher ou se noyer dans ces milliers de mots. Un style fiévreux, parfois sophistiqué, à l’image de sa quête éperdue!
Une phrase
« Je n’ai jamais connu mon père … Je suis infirme de mon identité … Ne pas savoir qui on est, c’est une douleur inoffensive de l’enfance … Un gouffre a fini par se creuser … Je me suis équilibré avec des mots … En écrivant le faux j’ai compris le vrai. » p.91-92
L'auteur
Né en 1960, Eric Fottorino mène plusieurs vies : journaliste pendant vingt-cinq ans au Monde , qu’il a dirigé de 2007 à 2011, chroniqueur du Tour de France, créateur de l’hebdomadaire Le 1 (2014), il a publié trente-quatre livres, des essais et des romans, dont Rochelle (1991), Korsakov (Prix des Libraires 2005), Baisers de cinéma (Prix Femina 2007), L’Homme qui m’aimait tout bas (Prix des lectrices de Elle 2010), Chevrotine (2014).
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