Et personne ne sait
Décembre 2024
128 pages
17 €
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Thème
Un narrateur nous raconte l'histoire d'un jeune peintre désargenté qui erre un soir d'hiver, peut-être celui de Noël, dans un parc new yorkais recouvert de neige. Au détour d'une allée, il rencontre une étrange petite fille seule qui joue à la marelle. A partir de là, la vie de ce peintre va changer.
D'où vient cette petite fille ? Peu importe. Quelle relation se noue entre eux ? Nous n'en saurons rien. Seule une irrépressible envie de peindre le portrait de l'enfant saisit l'artiste qui s'y essaiera pendant de nombreuses années au cours de leurs différentes rencontres. Il en sort un portrait à la fois précis et flou : les traits sont tout aussi bien ceux d'une enfant, d'une jeune-fille que d'une jeune-femme. Une seule chose est sûre, le portrait de la jeune-fille à la robe noire va enfin lui ouvrir la voie du succès.
Points forts
Une mise en abîme : ce roman est construit comme ces poupées russes qui cachent une plus petite, semblable à la première mais toujours différente. Ainsi, le lecteur lit le livre de Philippe Forest, auteur qui devient le narrateur d’un roman qu’il a lu ; ce roman évoque la rencontre d’un peintre et d’une mystérieuse petite fille qui le renvoie aux œuvres picturales américaines du début du 20ème siècle exposées au Met museum. Le tour de force de l'auteur est d'utiliser ce même procédé, en jeu de miroir : les tableaux accrochés dans le musée présentent des portraits d'enfants énigmatiques qui font penser à l'étrange fillette qui va devenir la muse du peintre et dont le portrait évoque au narrateur-auteur sa fille morte à l'âge de 4 ans - une prise de conscience terrible du deuil passé ou à venir dans la vie de tout un chacun.
Un conte philosophique : Philippe Forest insiste sur l'impermanence des êtres et des choses dont on ignore d'où ils ou elles viennent ni où ils ou elles vont. Le paradoxe de cette incertitude est de les fixer dans une réalité quasi immobile, à la fois identique et différente.
Un pacte faustien : ce roman contient une dimension fantastique. La fillette donne la clé du succès au peintre mais en échange de quoi elle restera à jamais une réalité fuyante empêchant celui-ci d'atteindre un bonheur réel. Ce n'est pas sans évoquer d'autres portraits célèbres de la littérature comme Le portrait de Dorian Gray.
Un roman psychologique : Philippe Forest utilise l'autofiction en évoquant la mort de sa fille, Pauline, à l'âge de 4 ans. On se demande si l'écriture du roman permet à l'auteur-narrateur de continuer à faire vivre d'une certaine façon cette enfant partie trop vite ou bien à en faire le deuil toutefois quasi impossible.
Quelques réserves
Tout au long du roman, l'auteur utilise un procédé qui consiste à écrire systématiquement le contraire de ce qu'il vient d'évoquer. Le style répétitif utilisé pour renforcer le propos risque de lasser le lecteur de par sa répétition.
Encore un mot...
Le roman fantastique évoqué par Philippe Forest existe réellement. Il s'agit du Portrait of Jennie, roman écrit en 1940 par Robert Nathan et dont une adaptation cinématographique a été réalisée en 1948 par William Dieterle.
Une phrase
« Il y a une règle. Si un livre raconte l'histoire de quelqu'un, il faut que cette histoire, d'une manière ou d'une autre, soit aussi celle de l'écrivain, de l'artiste qui la rapporte. Mais, inversement, si un livre relate la vie d'un artiste ou d'un écrivain, il faut aussi que ce livre parvienne à parler de la vie de chacun. Celle de tout le monde, celle de n'importe qui. Sinon, le roman tourne en rond et il ne sert à rien. » P.16
L'auteur
Philippe Forest, romancier et essayiste, a une importante bibliographie primée à de nombreuses reprises dont le prix Fémina du premier roman 1998 pour L'Enfant éternel et aussi le Goncourt de la biographie 2016 pour Aragon, entre autres livres. Il est l'un des principaux représentants et théoriciens de l'autofiction.
Ils viennent de sortir
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