Terminus Malaussène - Le cas Malaussène 2

Un roman “puzzle”, irrémédiablement fantaisiste et définitivement souriant !
De
Daniel Pennac
Gallimard
Janvier 2023
443 pages
23 €
Notre recommandation
4/5

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Thème

Les neveux et le fils de Benjamin Malaussène ont commis une grosse boulette. Alors qu'ils voulaient faire de l'enlèvement d'un industriel fortuné une sorte d'œuvre d'art (le précédent roman, Le cas Malaussène 1), ils se font kidnapper leur otage et son fils, par un gang de malfrats. Et ce gang est dirigé par le fameux "Pépère". Il règne sur une bande que rien n'effraie, sauf de manquer de courtoisie auprès des policiers. Comme cela ne s'est pas fait sans dégâts collatéraux, il y a de la vengeance dans l'air. Pour les sortir de là, il va falloir mobiliser toute la tribu, recomposer la tapisserie des personnages et de leurs talents hauts en couleurs, toute la dynastie de ceux qui animent cette saga romanesque de Daniel Pennac. Situations improbables, fusillades, livre à scandale, planques, traques, flics, juges, agents véreux, voyous, suspens, innombrables rebondissement, et Julius "le chien qui pue". Voici les pièces de ce roman "puzzle", qui, bien que d'une fantaisie exemplaire, peut être qualifié de "policier" !

Points forts

Le plus simple serait de dire : Pennac, "il n'y en a pas deux". 

On pourrait dire aussi, à la Malaussène, "là, t'as tout dit, mais t'as rien dit". 

Ou encore, comme Maracuja (un peu celle qui est la cause de toute cette histoire…) - "alors là, c't'histoire, mec, c'est du ouf". 

Bref, une écriture et un scénario jubilatoires, qui godillent entre Audiard, Lautner, Frédéric Dart, Céline… ou personne, car Pennac, c'est Pennac !

Histoire compliquée par ses entrelacs, qui vous font un peu oublier la dichotomie des bons et des méchants, rappeler que la vie est cruelle, que les ogres sortent des contes pour enfants, qu'il y a parfois des fées qui passent (celle-la serait plutôt l'austère Verdun et non une fameuse "carabine"), et que les aventures de la tribu Malaussène sont vraiment abracadabrantesques. 

Ce roman est aussi drôle qu'échevelé - entendez par là qu'il semble partir dans tous les sens - alors que sa construction est tout simplement originale, fourmille d'inattendus et vous invite à rassembler les pièces du puzzle qui composent la saga entière (8 romans, dont ce dernier). Un arbre généalogique et un lexique des personnages, très utiles, dans l'esprit taquin d'un "Malaussène pour les Nuls" vous aideront dans cet exercice.

Notez qu'il y a ici une limite à en disséquer les points forts : ce serait un peu dévoiler l'intrigue. Et de cela, il ne peut en être question dans ces lignes, car la découvrir au fil des pages est un des points forts de ce Terminus… qui n'est peut-être pas ce que sa lecture pourrait vous laisser croire !

Quelques réserves

Aucune quand on aime le mélange de la satire sociale et de la fantaisie romanesque.

Peut-on le lire sans avoir lu le précédent ? Oui ; si nécessaire, le lexique vous aidera dans le décodage des personnages - vous obligeant, certes, à quelques aller et retour vers les dix pages du répertoire.

Encore un mot...

On pourrait en retenir vraiment deux : divine fantaisie ! Oui, Terminus Malaussène se déroule comme un vrai et bon roman policier. Ses innombrables rebondissements et croisements avec les roman précédents, sa mise en abîme de l'histoire racontée par le personnage de Benjamin qui lui-même s'appuie sur un roman qui raconte une partie de l'histoire, pourraient paraître tout à fait improbables ; ils ne le sont pas, soulignant s’il était besoin les talents de l'auteur. Car Pennac n'a ni peur des mots, ni des situations inimaginables. Sa lecture et sa construction restent "un délice" pour les amateurs du genre. Vous fermerez la dernière page en vous disant probablement "non mais Pennac, quel culot dans l'improbable, quel talent dans l'écriture !". Grand moment de détente en perspective. Et vous reposerez Terminus Malaussène avec le sourire aux lèvres - et une question en suspens, à laquelle la réponse fera débat !

Une phrase

  • "Assister à une lecture de C'est Un Ange, c'est s'offrir un billet d'entrée dans la tête de l'auteur. On y voit l'émotion se muer en intention, l'intention s'élaborer en pensée, la pensée fleurir en phrases, les phrases s'égrener en mots, dont certains, mais pas n'importe lesquels, s'offrent des floraisons spectaculaires." P 75
  • "Le bon vieux temps…. Quelle représentation Maracuja Malaussène -pure condensation d'avenir- pouvait-elle se faire du bon vieux temps ? Personnellement, je ne voyais pas ce qu'il avait de si "bon" le temps où le magasin explosait autour de moi, où on jetait Julie dans la Seine, où on massacrait l'amoureux de Clara, où le chirurgien Berthold distribuait mes organes aux uns et aux autres, où on foutait le feu à Thérèse, où on menaçait de zigouiller Mosma dans le ventre de sa mère, où Julius le chien multipliait les crises d'épilepsie. Non, sincèrement à égrener les décennies je ne trouvais pas une seule année qui pût concourir au prix du bon vieux temps." P 418-419

L'auteur

Daniel Pennac est un écrivain français dont la renommée doit beaucoup à l'inventivité des aventures de Benjamin Malaussène, personnage central et culte de la saga qu'il publie de 1985 à 2023 avec ce nouvel épisode.

Notre chroniqueuse Marine Baron, à l'occasion de la chronique du précédent "chapitre" de l'histoire paru en 2017,  Le Cas Malaussène / 1. Ils m’ont menti, https://www.culture-tops.fr/critique-evenement/romans/le-cas-malaussene, résumait ainsi sa carrière.

Lauréat du Prix Renaudot en 2007, son roman autobiographique, Chagrin d'École, décrit les malheurs d’un enfant en échec scolaire et ses progrès réalisés sur le tard grâce à l’intervention d’un professeur de mathématiques. 

Il publie en 1995 une fiction détonante, Au Bonheur des ogres, la première d’une saga présentant les Malaussène. Sur un mode saugrenu et décalé, celle-ci raconte l’histoire d’une famille, dont on peut suivre les aventures roman après roman, notamment dans La Fée Carabine  (1987) ou encore La Petite Marchande de prose (1990). 

Daniel Pennac est aussi l'auteur de nombreux autres romans, dont des romans pour enfants, essais, les scénarios de deux aventures de Lucky Luke, de films et de téléfilms. Il a reçu de nombreux prix littéraires et en 2014, un Annie Awards (prix du cinéma américain) du meilleur scénario pour le long métrage d'animation  Ernest et Célestine.

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