Rugby au cœur: Les Braqueboys

Un excellent roman, pas seulement réservé aux mordus de rugby.
De
Serge Collinet
Ed. Passiflore, 2020 -
331pages -
22€
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

Jeune professeur d’éducation physique, Simon vient d’être nommé en plein 13° arrondissement de Paris au collège George Braque. Coincé entre le Parc Montsouris, la Cité Universitaire, l’ancienne maison de Coluche rue Gazan et les cités de la Brillat-Savarin et de l’Amiral Mouchez, l’établissement abrite « une population très hétérogène ». Parcouru de tensions sociales et raciales, rongé par un malaise larvé au sein de l’équipe enseignante, le collège oscille entre le « bien-vivre ensemble » et le « vivre à côté ».

Ancien rugbyman doté de solides convictions humanistes, Simon propose rapidement à la cheffe d’établissement un projet éducatif reposant sur la création d’une équipe de rugby scolaire. Il est convaincu, en effet, que ce sport permettra aux élèves de faire l’apprentissage de la diversité, du respect de l’autre, du dépassement de soi - individuel et collectif. Problème, le collège ne dispose d’aucune culture ni d’aucune infrastructure rugbystique…

Paul, Jimmy, Gilibert, Willy, Kosta, Samuel, Jojo, Mousse, Jérôme, Tristan, Max, Léo, Taka, Wesley, Quentin, Michel, Jules, Stephen, Jacquot, Tim sont élèves de troisième. Ils viennent d’horizons différents, portent un regard variable sur l’école, mais partagent tous une énergie difficile à canaliser. Si certains d’entre eux jouent déjà au rugby, notamment à Gennevilliers « Gegenne », la majorité n’a jamais touché un ballon. Ils répondent pourtant à l’invitation de Simon de chausser les crampons et se fixent un objectif un peu fou : devenir Champions de France de rugby scolaire.

Points forts

Tout y est ! On y est à nouveau. Comme si c’était hier. Les entraînements sur des terrains improbables, les négociations sans fin avec les gardiens de stade pour accéder à un bout de vestiaire, l’arrivée au stade juste avant le coup d’envoi car le chauffeur de bus s’est perdu, le bruit des crampons sur le sol en béton du vestiaire, la boule au ventre qui précède le coup d’envoi, les heures passées à refaire le match, les minutes pendant lesquelles l’équipe se resserre avant le début du match, les interminables et douloureuses séances de préparation physique, l’intensité du match, le plaisir du dépassement de soi et du combat collectif, les consignes parfois absconses de l’entraîneur, les heures passées à répéter ses gammes pour atteindre son rêve de champion, la fébrilité qui accompagne l’annonce de la composition de l’équipe, la sensation unique ressentie après un match, mélange de fatigue extrême et de plénitude inégalable, les discours d’avant-match qui font monter les larmes aux yeux, le chambrage permanent au sein de l’équipe, le mélange des caractères et des origines…

Rugby au cœur est également un ouvrage pédagogique. Tel un manuel d’entraînement, il explique de façon simple et claire les principes et les règles du jeu de rugby. Il permet également de suivre les différentes étapes d’apprentissage technique et physique par lesquelles l’entraîneur fait passer son groupe de lycéens pour en faire une véritable équipe.

Son plus gros point fort réside dans la dimension éducative sur laquelle Simon fait reposer son projet, avant toute considération de talent ou de compétence rugbystique : permettre à ses élèves d’apprendre à vivre ensemble.

Quelques réserves

Comment trouver un point faible à ce roman ? On pourrait lui reprocher d’être avant tout réservé aux mordus de rugby. Mais ce serait lui refuser d’entrée toute possibilité de convertir de nouveaux adeptes au ballon ovale. On pourrait considérer que la structure du récit, qui alterne les points de vue de Simon l’entraîneur et de Jérôme le capitaine, est un peu répétitive. Mais ce serait oublier de souligner qu’elle permet de vivre l’aventure à la fois du côté de l’entraîneur et de celui des joueurs.

Encore un mot...

Tous ceux qui ont joué seront transportés non sans émotion sur les terrains de leur jeunesse tant ce roman à la capacité de réveiller ce que Vincent Moscato appelle joliment « la nostalgie de nos 20 ans ».  Ceux qui n’ont jamais joué ou ne connaissent pas le rugby ouvriront une porte sur cet univers où la force du collectif est supérieure à la somme du talent des individus.

Une phrase

« C’était bien le rugby. Simplement, franchement et profondément bien. […] Malgré nos différences, et peut-être grâce à elles, nous avons vécu une aventure extraordinaire. […] On ne s’est pas dit grand-chose, avec Jimmy et Jules, mais la flamme était toujours là. On savait que resteraient gravés en nous pour toujours, au-delà des aléas de la vie, une devise : « l’esprit d’équipe », et le souvenir d’une fabuleuse épopée, celle des Braqueboys. »

L'auteur

Serge Collinet est professeur agrégé d’EPS. Rugbyman depuis la signature de sa première licence à l’âge de neuf ans, il fit les beaux jours de clubs de première division tels que le PUC ou l’ASPTT avec le numéro 14 dans le dos.

Fondateur de la section rugby du collège George Braque, il a formé des générations de rugbyman dont les internationaux Wesley Fofana et Vincent Rattez. Il a aussi entraîné des équipes universitaires (Sciences-Po, 1998-2001) et des clubs de Fédérale 2 (Gennevilliers, 2000-2005) avant de devenir Directeur Sportif chargé de la formation, du recrutement et du management des staffs d'équipe au Stade Français.

Passionné de pédagogie et de transmission, cet ancien ailier a écrit de nombreux ouvrages sur le rugby, l’entraînement et le coaching parmi lesquels : Rugby, découvrir et pratiquer, éd. Borneman, 1991 ; Le rugby, éd. Ulisse, 1996 ; Rugby, les fondamentaux Tome 1 & 2, Amphora, 2005-2006 ; Rugby, techniques et skills, Tome 1 & 2, éd. Amphora, 2012-2013.

Serge Collinet est également l’auteur de citations et concepts immortels tels que : « Quel est le couillon qui a tué le mouvement ? », « Un joueur est en forme quand il ne trouve pas le terrain trop grand. », « La Z.P.E.B. : Zone Possible d'Échange du Ballon. »

Je lui serai surtout éternellement reconnaissant d’avoir été l'entraîneur qui m’a appris à jouer au rugby.

Le clin d'œil d'un libraire

Librairie livres anciens LE FEU FOLLET, à Paris

Directeur fondateur : Pascal Antoine

« Le Feu Follet », petite flamme éternelle du livre rare, dotée de pouvoirs magiques, illumine depuis plus de 20 ans le Boul’Mich à deux pas du Luco (le Jardin du Luxembourg… et du Sénat !). Sis au 31 rue Henri Barbusse  et au 121 du Boulevard Saint-Michel, les deux établissements de la librairie éponyme distillent leurs bienfaits aux amoureux du livre ancien, des lettres autographes exceptionnelles, d’incunables ou même d’estampes rares, en provenance des musées, collections privées et fonds culturels du monde entier. Dans ce palais de la culture médiévale et de la culture tout court, officie un personnage passionné et passionnant, Pascal Antoine, qui a roulé sa bosse dans les mines de malachite, pierre semi-précieuse du Haut Katanga (le fameux Shaba de Mobutu), pierre verte de la persuasion très utilisée en litho thérapie, avant qu'il ne retombe, en 1998,  dans le creuset de ses amours de jeunesse, le livre.

Ici, présentés par huit libraires (record national pour ce type de librairie) 30 000 livres précieux, depuis le XVe siècle jusqu’à nos jours, attendent patiemment leurs futurs et heureux propriétaires. Qui dit livres précieux ne veut pas dire forcément livres chers : « Nous proposons des livres rares et des éditions originales de 20 € à 17 000 € (rare en effet !) couvrant 500 ans de l’histoire des idées, de l’impression de la pérennisation de la mémoire écrite » confie Pascal Antoine. Une véritable épopée de la littérature en somme « accessible à tous types de bibliophiles ». Fixons les idées, par curiosité : un grand auteur «moderne» sinon le plus grand ? « Je dirai un Marcel Proust version originale édition limitée, dédicacée à un de ses contemporains : entre 5 000 et 20 000 € (!) en fonction de la dédicace » précise Pascal Antoine. Cela étant dit : « Non, le livre ancien n’est pas un produit de placement, je ne le vois pas comme cela » ajoute-il un peu choqué...et prudent.

On l’aura compris Le Feu Follet est un trésor. Une dernière question : pourquoi ce nom d’enseigne un brin ésotérique : « Un clin d’œil à Drieu la Rochelle ...et à Louis Malle bien sûr ». Mais c’est aussi la reprise d’un thème qui ne doit rien au hasard ! Oui, Antoine prénommé Pascal, entrepreneur dans l’âme a la littérature dans le sang. Comme il le dit joliment : « Je suis toujours à la mine, à la mine des livres » (l’école du même nom, Ecole des Mines, est à deux pas).

Librairie Le Feu Follet, 31 rue Henri Barbusse et 121 bd Saint Michel, Paris 75005. Tel. 01 56 08 08 85

Texte et interview réalisés par Rodolphe de Saint-Hilaire pour Culture-Tops

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