Récits de certains faits

Des tranches de vies débitées à la chaîne, et hop, elle passe vite la justice dite ordinaire en correctionnelle. Mais que cherche-t-elle au juste? Sa vérité. Et qu' importe tous ces insectes qui bourdonnent dans les prétoires, avocats pressés, public avide, prévenus englués dans leurs crapuleries, leurs histoires sont si longues, si compliquées, mais pourtant il faudra bien les mettre dans une case, les incriminer...

A la barre, par bonheur, on croise aussi des gens célèbres : Nicolas Sarkozy,  Tariq Ramadan, Jean-Marc Morandini. Et l'œil de Yasmina Reza voit tout, cueille un détail, saisit un geste, enfin elle déclenche son rayon laser. Prenez cet animateur, Morandini, mis en cause pour des échanges scabreux avec des garçons mineurs. Il joue son rôle de bel indifférent - comment ose t-on le poursuivre pour des peccadilles - puis, à la demande de ses avocats, car ça sent le roussi, il se transforme en repenti. Trait de feu de Yasmina Reza qui le transperce : " Le visage est trop raide. Trop abattu les traits. Il frôle le comique mais il s' applique. 

Peut-être même qu'il cherche en lui une zone d' authenticité. "

Plus grave, la tragédie classique des grands procès d'assises. Ici la justice prend son temps, cherche à comprendre, mais selon l'auteure, elle passe toujours à côté. A côté des choses, de la vie qui boîte, des êtres qui trébuchent. Crimes horribles, châtiment impossible. 

Alors pour échapper à la noirceur des prétoires, Yasmina Reza fend l'armure et nous livre quelques morceaux de son quotidien. Amis croisés puis perdus, entre Paris et Venise, tiens voici Bruno Ganz, la figure de l'ange dans Les ailes du désir, le film de Wim Wenders, ou la petite fille de l'auteure qui minaude avant de s' endormir.