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Thème
Au soir du deuxième tour de l'élection présidentielle, Launay sait qu'il va gagner contre le candidat de l'extrême droite ; il ne doit sa position de favori qu' à la volonté des électeurs de punir le sortant. Il a promis à Lubiak, son futur ministre des finances, de ne faire qu'un seul mandat, pour laisser la place à ce rival qu'il déteste ; mais, une fois Président, il ne pense qu'à revenir sur cet engagement, en organisant un référendum pour changer la constitution et rétablir le septennat. Une lutte impitoyable s'engage entre les deux hommes, que tout oppose, chacun comptant sur ses appuis au sein des services secrets ou au sommet des grands groupes industriels, qui semblent détenir le pouvoir. Il s'agit aussi pour le nouveau Président de s'affranchir de l'emprise exercée par les américains sur la France et de composer avec les ambitions des nouveaux investisseurs emirati ou chinois.
Points forts
• Les portraits contrastés de Launay et de Lubiak, un homme du passé face à un homme de l'avenir, l'un adore le pouvoir, alors que l'autre n'en apprécie que les avantages, l'un qui n'aime pas l'argent, l'autre qui veut en gagner le plus possible, le plus vite possible, l'un déprimé après une victoire, ne se révélant que dans le combat, l'autre toujours énergique et dynamique ...
• Les portraits tout aussi savoureux des personnages secondaires, comme Volone, président d'un grand groupe industriel, "le pape du financement occulte", Corti, directeur du renseignement intérieur, un corse retors, au service de lui-même, Lorraine, l'espionne, qui en sait trop, Absalon, le journaliste méthodique et pugnace dans sa quête de vérité, et également les collaborateurs de Lubiak, fonctionnaires interchangeables, "formatés à penser vite et conforme", l'un pour le droit, l'autre pour le tordu ! Enfin, les hommes de main, choisis pour leur servilité, pour leur jouissance du crime, qui se complaisent dans les basses œuvres.
• Une connaissance aigüe de la classe politique, de son arrogance, de son affairisme, de ses alliances douteuses, de son incroyable sentiment d'impunité, de son souci de pérenniser le système et les privilèges auxquels elle s'accroche.
• Une plongée fascinante dans les services secrets et leurs rivalités; les agents travaillent pour le parti au pouvoir et exercent leur métier en loups solitaires, prêts à tout.
• Une plume acérée, un style vif, dépouillé, des formules lapidaires, dans ce récit animé de nombreux dialogues.
Quelques réserves
• Une version très noire de la politique. Comme il le fait dire à l'un de ses personnages, Dugain semble avoir "une vision paranoïaque des choses, en voyant le mal et la conspiration partout".
• Aucun personnage ne trouve grâce à ses yeux, sauf le journaliste modeste et honnête.
• Comme dans "L'Emprise", il manque tout de même un peu d'humour, même si on sourit de temps en temps dans ce roman à clés.
Encore un mot...
Un roman très contemporain, inscrit dans un contexte politique et économique plus que réaliste, construit sur l'alternance de cinq ou six personnages, dont les liens, les antagonismes, les tractations tiennent le lecteur en haleine. Le pouvoir et l'argent, voilà les vrais enjeux de l'intrigue!
Dans ce tableau cruel d'un monde corrompu, les politiques sont présentés comme des prédateurs, des arrivistes calculateurs et intéressés, des menteurs impénitents, des conspirateurs, des médiocres, des lâches ! Ils affichent avec cynisme leur immoralité, parfois expliquée par la relation au père, déterminante pour un homme. L'analyse des ressorts psychologiques, qui les poussent à agir, comme, par exemple, la détestation d'eux-mêmes, m'a passionnée. Marc Dugain réussit à plonger dans l'intimité de chacun, en soulignant le vide sidéral de leur vie familiale ou affective.
Une phrase
Sur ces fameuses élites politiques: "qui ajoutent à une attitude constante de suffisance un goût pour l'argent qui va jusqu'à la prévarication sur des montants considérables avec un sentiment d'impunité rare." p.22
L'auteur
Marc Dugain, né en 1957, est un romancier habitué au succès: depuis LaChambre des officiers (1998) jusqu'à Une exécution ordinaire (2007), en passant par La malédiction d'Edgar (2005). Il s'est lancé dans une trilogie, commencée par L'Emprise, Prix du Roman-News 2014; Quinquennat, en étant le deuxième volet.
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Encore plus sombre qu'Houellebecq...
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