Propre

Épopée sud-américaine intense, captivante
De
Alia Trabucco Zeran
Pavillons Robert Laffont
Traduit de l’espagnol (Chili) par Anne Plantagenet
Parution le 22 août 2024
271 pages
20,90 euros
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

Cet ouvrage commence par la fin : notre héroïne Estela est emprisonnée dans un cachot sans jamais voir ses bourreaux. Elle est accusée d’avoir tué la petite fille dont elle s’occupait depuis sa naissance. Celle-ci s’est noyée alors qu’elle nageait comme un poisson. Comment en est-on arrivé là ? Estela nous explique qu’elle est venue à Santiago del Chile par nécessité. Il lui fallait du travail pour envoyer de l’argent à sa mère restée dans son petit village. Elle est engagée par une famille aisée comme femme de ménage et plus, si besoin est. Et apparemment, besoin est. Ce couple a une attitude pour le moins curieuse vis-à-vis d’elle. Dès la naissance de la petite fille, on la lui confie.  Maintenant, enfermée dans son cachot, elle relate à ses gardiens ce que fut sa vie depuis son arrivée sur place.

Points forts

  • L’écriture de ce livre est remarquable, souple, fluide, sans mots grandiloquents mais totalement explicites. Cette manière de raconter nous rend proche de cette femme qui a trente ans à son arrivée chez ses patrons et que l’on continue à voir, au bout de 10 ans, comme une gamine de vingt ans. Il est amusant de constater combien les femmes de ménage ont la cote en ce moment. C’est le troisième roman que je lis sur le sujet…
  • Estela se raconte sans rien cacher, narrant les faits et uniquement les faits, sans pathos mais sans grandes effusions de sentiments non plus. Sa mère n’était pas une grande sentimentale. Estela est simple, efficace et rapide, comprend ce qu’on lui demande et ne parle que lorsque c’est utile. C’est un personnage foncièrement attachant, même dans son silence.
  • Elle a de temps en temps des velléités de révolte vite étouffées. Chez elle, la norme est : pas de vagues.
  • Lorsqu’elle parle de la chambre qui lui a été allouée, elle parle de « la pièce du fond » qui se rapproche plus de la cellule monacale que d’une pimpante chambrette. En plus, on n’accède à ce local genre annexe -placard à balais uniquement par la cuisine. C’est dire comme son terrain personnel est balisé. Mais elle ne se plaint pas, elle constate. Elle décrit, elle ne commente pas.

Quelques réserves

Aucune réserve, ce roman est un page turner de haut vol.

Encore un mot...

Ce livre ne se lâche pas dès la première page. On accroche tout de suite avec cette jeune femme pleine de bonne volonté, de douceur, docile, dont personne ne s’occupe mais qui s’occupe de tout le monde, qui ne cherche pas d’histoires. Il y est décrit une étude de comportement ainsi qu’une quête de contrôle de la part des patrons. On reste cependant plein d’espoir sur l’issue qui sera donnée à sa requête de liberté.

Une phrase

« A ce stade, vous vous demandez certainement pourquoi je suis restée. C’est une bonne question, importante. Tu es triste. Tu es heureuse. Ce genre de choses. Ma réponse est la suivante : et vous, de l’autre côté de ce mur, pourquoi restez-vous dans vos boulots, dans vos bureaux minuscules, dans les usines, les magasins ? J’ai toujours cru que je quitterais cette maison mais la routine est perfide. La répétition des mêmes rituels, chaque acte est une tentative pour apprivoiser le temps. Un mois, une semaine, la longueur et la largeur d’une vie. » P.68

L'auteur

Alia Trabucco Zeran (1983) est née au Chili et vit à Santiago. Dès son premier roman La soustraction (Actes Sud, 2021) elle fait partie de la liste des 10 meilleurs premiers romans et elle est sélectionnée par l’International Booker Prize en 2019. Son livre Las Homicidas a remporté le British Academy Book Prize en 2022. Propre (Limpia en espagnol) a été publié en 2022 en espagnol et est en cours de traduction dans plus de dix pays.

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