Porca miseria
Parution le 6 janvier 2022
200 pages
17 €
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Thème
En 1954, la famille Benacquista quitte l'Italie pour la France, nouvel eldorado. Ils se retrouvent dans une banlieue parisienne étriquée, tendance rouge bon teint, parqués dans la zone réservée aux italiens. Le petit dernier nous narre les boires et déboires, si bien nommés, de cette famille nombreuse, de l'enfance à l'âge adulte.
Points forts
- Le titre Porca miseria est déjà un cri de révolte. Le seul d'ailleurs proféré par ce père silencieux, à la fois très présent et complètement absent du paysage familial. Il ne transmettra aucun repère, aucune directive et au fond, aucune éducation à cette fratrie qui s'est élevée toute seule. On réalise combien la force de caractère et de bonnes dispositions d'esprit suffisent à forger ce personnage hors du commun de Tonino.
- Il est remarquable de constater que l'auteur, dont les parents étaient analphabètes, est devenu le chantre de la langue française. Il déploie un vocabulaire d'une grande richesse. Il possède un style d'écriture bien particulier, très agréable à lire.
- Toute la jeunesse de l'écrivain tourne autour de ses racines italiennes et de sa place en pays français. En fait, ce récit d'enfance permet à l'auteur de nous faire part de nombreuses réflexions philosophiques de haute tenue, à partir d'évènements survenus dans sa famille.
- Dans ce récit, les rôles sont inversés : le fils tient la main de sa mère pour éviter qu'elle ne se perde et les enfants veillent sur leur père.
- Les commentaires de Tonino sur sa lecture d'Une vie de Maupassant valent le détour. Les descriptions et les comportements sont disséqués au scalpel. Non seulement rien ne lui échappe mais l'auteur fait preuve de beaucoup d'humour. Ses explications de textes sont savoureuses.
- Enfin, ce roman nous offre la preuve que, lorsque l'on veut, l'on peut. Dès que Tonino a décidé d'écrire, rien ne l'a rebuté. Et il a diantrement bien fait de persévérer !
Quelques réserves
Nous aurions bien repris cent petites pages de plus !
Encore un mot...
L'auteur, tout au long de ce roman, nous fait part de sa grande tendresse envers les Italiens, ceux que Cocteau appelaient "les Français de bonne humeur". A aucun moment, il ne reniera son pays d'origine et ne se permet jamais le moindre jugement de valeur ou dénigrement d'un personnage et encore moins dans sa famille. Ce récit n'a pas une once de misérabilisme. Il essaie plutôt d'arrondir les angles. Ce père inexistant prend beaucoup de place ici. Et sa mère neurasthénique qui "opte pour la peur comme meneuse", se lève le matin, s'habille, noue son fichu sous le menton comme si elle allait sortir, mais va s'installer sur le canapé d'où elle ne bougera le soir que pour aller se coucher. Porca miseria !
L'écriture de ce livre tranche avec les récits traditionnels d'enfance grâce aux aphorismes plein de sagesse et d'humour de l'auteur.
Une phrase
L'ouvrage est émaillé de jolies formules :
- "Dans le musée imaginaire qu'est la mémoire..."(p.14)
- "Je suis bien certain d'avoir laissé derrière moi les souvenirs encombrants de l'enfance. Bientôt, ils tomberont en ruine dans un recoin poussiéreux de ma mémoire." (p.172)
Enfin, sa définition de l'Italie, p. 120 :
- "L'Italie c'est celle des autres..... L'Italie appartient à ceux qui la vivent, la rêvent ou l'oublient, et je ne suis pas de ceux-là."
L'auteur
Tonino Benacquista (né en 1961 à Choisy-le -Roi), issu d'une famille d'émigrés italiens, s'est fait connaître du grand public par La Commedia des ratés (Gallimard,1991), suivi par Les Morsures de l'aube (Rivages,1992). Sort en 2004 Malavita (Gallimard) qui fait grand bruit. Avec Nos Gloires secrètes (Gallimard, 2013), il rafle le Prix de la nouvelle de l’Académie française et le Grand Prix de la Société des Gens de Lettres. Parallèlement à l'écriture, il s'intéresse au cinéma et participe avec succès à nombre de films en tant que co-scénariste.
Commentaires
J’ai découvert Tonino Benacquista il y a un an, par hasard j’ai lu Homo Erectus qui m’a donné envie de poursuivre. J’ai lu alors Quelqu’un d’autre que j’ai beaucoup aimé aussi. Et là je viens de finir Porca Miseria et je suis totalement conquise ! Il y a longtemps qu’un livre ne m’a pas fait autant vibrer! Je suis passée par toutes les émotions, et surtout j’ai ri! A tel point que les gens se retournaient, étonnés de me voir rire toute seule! Mais non je n’étais pas seule, j’étais avec toute la famille Benacquista qui m’a rappelée la mienne et c’est la première fois que je vis cela avec autant de similitudes ! J’ai prévu d’enchaîner avec La commedia des ratés, puis Malavita, puis Saga... bref que de bons moments en perspective ! Je n’ai pas lu tout Zola mais je lirai tout Benacquista!😉
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