Paradis Perdu, tome 1 de la série La traversée des temps

A suivre !
De
Eric-Emmanuel Schmitt
Albin Michel, février 2021 -
576 pages -
22,9 €
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

Noam se réveille à Beyrouth ; c'était il y a quelques jours, quelques semaines. Il prend plaisir à se fondre dans cette ville cosmopolite, grouillante de vies et de cultures. Rapidement il prend conscience de la beauté et de la fragilité de ce monde, comme la métaphore d'une planète en feu, sous la domination des idéologies, des technologies, de la consommation. Et il se souvient. Il raconte. Il a vécu sur une terre vierge de "civilisation", il y a 8.000 ans. C'était dans cette période que les historiens appellent le néolithique, à la croisée des temps où l'homme va privilégier la sédentarisation au nomadisme. Noam raconte sa vie, ses joies, ses peines, son rapport à la nature, sa femme, son père - le chef Pannoam - fort et sombre, la rencontre avec une femme fascinante, Noura. Au bord de ce lac où la vie s'épanouit en communion avec les êtres du ciel et de la terre, un drame se dessine, la montée des eaux… Il va vivre un cataclysme majeur, mais son intuition va le conduire à tenter de s'en protéger. Et échapper - peut -être - à la mort, au prix de devenir immortel. Et Noam entreprend de raconter son histoire, l'histoire de l'humanité.

Points forts

-  Une histoire originale et étayée d'observations précises sur la vie au néolithique, sans que cela se traduise dans un discours scientifique ou de vulgarisation ennuyeuse. Car vous l'avez intuitivement compris, entre Noam et Noé, il n'y a qu'un  fil de romance, de la nature panthéonisée à la naissance des monothéismes, il n'y a qu'un cheveu - ou une goutte si vous préférez - celle qui fit déborder le Bosphore !

-  C'est simple, et c'est tout simplement très bien écrit, facile à lire, et pour peu que l'on se prenne au jeu du reportage inclusif au sein de la tribu, et de la métaphore biblique, c'est même addictif. Ces 576 pages se dévorent assez bien !

- Des exergues qui étayent les propos de Noam, cueillies aux bonnes sources des connaissances scientifiques actuelles, pour un minimum de lecture intelligente.

Quelques réserves

-  Le principal point faible de ce roman peut être son point fort : un immersion romanesque dans la vie d'un clan de pasteurs et d'agriculteurs, fricotant amours et craintes avec les chasseurs-cueilleurs, dans un nature apparemment bienveillante, jusqu'au … grand débordement. Passionnés d'histoire, vous serez peut être gênés comme moi par Noam qui raconte père, oncle, frères, sœurs, demi frères dans un langage "soutenu", appelle sa mère Maman, navigue dans des structures familiales sommes toute très modernes, avec des sentiments qui ne le sont pas moins - amour et passion, trahisons, manipulations, infidélités, enfants cachés…

- Les exergues qui émaillent le récit sont intéressants. Mais - trop ou pas assez - elles ont laissé le lecteur que je suis sur sa faim quant au bagage historique de cette romance, que j'aurais aimé plus "conséquent". Dit autrement, ce roman (hormis les exergues précités) n'offre pas (ou peu), de manière connexe, de découvertes culturelles.

Encore un mot...

On doit s'engager avec enthousiasme dans un nouveau roman d'Eric Emmanuel Schmitt. On peut s'engager avec méfiance dans un roman qui raconte l'histoire d'une tribu au néolithique. Certains s'y sont essayés - Jean-Jacques Annaud avec La Guerre du feu, d'autres, chaînes de télévision ou romanciers… résultats pas toujours heureux. Eric Emmanuel Schmitt prend, avec son talent de conteur, le parti d'une immersion quasi touristique au bord de ce lac devenu Mer Noire, il y a environ 8.000 ans. Sa force est sans doute dans la trajectoire, celle de La traversée des temps, cette aventure littéraire qu'il dit avoir mûri pendant 40 ans, et dans laquelle il se lance avec ce premier tome. Encore 7 volumes à suivre, pour traverser l'anthropocène et recevoir, au gré de chaque volume, un enseignement plein de sagesse sur la nécessité - du moins je le perçois ainsi - de retrouver - ou de ne pas perdre définitivement, le Paradis perdu de Noam. A suivre donc !

Une phrase

"Maman leva le front vers moi.
- Comment va Mina ?
- Bien
- Elle réussira cette fois ?
- Je l'espère.
- J'ai prié les Esprits pour elle.
-Merci.
- Je sais ce que tu ressens, mon fils. Je sais que Tibor t'a manipulé, qu'il t'a attaché à sa fille et, au dernier moment, l'a unie au chef plutôt qu'au futur chef. Le mal est fait. La jalousie empoisonne ton cœur comme le mien, mais je t'admire parce que tu luttes ! Tu respectes tes engagements, tu respectes ton épouse, tu respectes ton père." P 146


"Tibor tendit le bras vers la colline. Derrière nous, déferlant des cavernes, des nuées de chauves-souris infestaient l'azur, le mâchurant de leurs zigzags incohérents, elles qui d'ordinaire chassent la nuit et dorment le jour.

Un serpent glissa dans l'herbe, vif, pressé. Puis un autre. Cinq. Dix. De partout, orvets, aspics, couleuvres, vipères jaillissaient de leur cache et s'élançaient à l'assaut de la pente. Des rats, ces campagnols, des mulots succédèrent aux reptiles, suggérant un renversement total : les proies poursuivaient les prédateurs…". P 416

L'auteur

Eric-Emmanuel Schmitt est un enfant prodige de la littérature et du théâtre. Etabli aujourd'hui en Belgique, élu en 2016 à l'Académie Goncourt, récompensé (pour ne citer que la France) par plusieurs Molière et le grand prix du théâtre de  l'Académie française pour ses pièces, il est l'auteur d'une trentaine de livres et essais, d'autant de pièces et d'adaptations, de spectacles musicaux… Bref, "EES" est un superlatif à lui tout seul : un des auteurs, réalisateurs et  comédiens francophones le plus représenté dans le monde, traduit en 46 langues.

On peut le voir sur les planches et au cinéma, acteur et/ou interprète notamment des œuvres qu'il a écrites. Quelques-uns de ses livres et essais ont été réalisés en livre audio, qu'il interprète lui-même ou confie la lecture à des acteurs comme Pierre Arditi ou Marie Christine Barreau.

Culture Tops rend compte dans ses pages, de ses créations récentes. Parmi d'autres :

- Journal d'un amour perdu

- La nuit de feu

- Oscar et la dame en rose

- 24 heures de la vie d'une femme

Le clin d'œil d'un libraire

LIBRAIRIE « NOUVELLES IMPRESSIONS » A DINARD. UN BIJOU TRES PRECIEUX SUR LA CÔTE D’EMERAUDE

Quel plaisir !! La première « impression » fut vraiment la bonne. Quel bel accueil nous a réservé le propriétaire de cet espace culturel convivial situé au cœur de cette ravissante station balnéaire, à deux pas de la plage… et du casino. Thierry de la Fournière, n’en déplaise à sa modestie naturelle, est une figure locale. Ancien adjoint au maire en charge de la culture, il fonda à Dinard le festival du film britannique, qui prospère aujourd’hui en ayant anglicisé son nom ; depuis 1900 tout résonne british ici, ou presque. Nom de rues et d’hôtels, vitrines, éternel tea-time,  greens d’un golf sublime à la porte de Saint Briac, jusqu’à l’humour de notre interlocuteur, fou de politique locale qui avoue que la liste du nouveau maire, sur laquelle il figurait est passée avec «un pan de chemise dans la porte ». Thierry de la Fournière, maîtrise d’histoire, 15 ans de professorat est aujourd’hui un libraire heureux, un métier qui lui garantit l’indépendance et lui procure «les nourritures intellectuelles» indispensables à la vie. D’ailleurs, si vous ne le saviez pas, nous vous présentons l’ex Président du «Prix des libraires». Avec ses 15 000 références et ses 7 libraires-conseils, les «Nouvelles Impressions» brillent à Dinard. «A bas bruit», comme le confie à Culture-Tops son animateur, et sans site internet. Impressionnant.

Librairie Nouvelles Impressions – 42 rue Levavasseur – 35800 Dinard – Tel. 02 99 46 15 95

Texte et interview réalisés par Rodolphe de Saint-Hilaire pour la rédaction de Culture-Tops.

Commentaires

Dominik
jeu 17/02/2022 - 14:58

Les promesses de la quatrième de couverture sont totalement à coté du livre. PES raconte une jolie histoire mais en rien ne fait "défiler les siècles, embrasser les âges". Il accumule les erreurs historiques (ex : le bois disparaît avec les âges d'où pas de traces de ces civilisations : archi faux !) . Des broutilles concernant les connaissances de nos ancêtres : si vous avez lu la saga "AÏLA l'enfant de la terre" c'est insultant pour le romand de PES! Bref très très décevant et ultra survenu , plus une vision totalement à coté de la plaque coté ethnographie. Dommage j'aime bien d'habitude PES mais là c'est vraiment loupé.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Ils viennent de sortir

Romans
Tata
De
Valérie Perrin