Numéro deux
Parution le 6 janvier 2022
238 pages
19,50 euros
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Thème
Martin, un jeune garçon qui ne demandait rien à personne, est pressenti pour interpréter le rôle de Harry Potter à qui il ressemble à s'y méprendre. Les essais sont excellents. Il sait qu'un autre jeune garçon, déjà acteur, est également envisagé pour ce rôle. Et, après le dernier essai cependant fort réussi, on l'informe tout à trac que l'autre garçon, Daniel Radcliffe, est sélectionné. Comment Martin va-t-il gérer cet échec et vivre avec le rappel permanent de son fiasco ?
Points forts
- Le crescendo dans l'excitation à l'idée d'interpréter le rôle d'Harry Potter est très bien rendu. On sent monter l'adrénaline chez ce jeune au fur et à mesure que s'approche le tournage. Le rêve est en train de devenir réalité. Les essais sont fructueux. Les affres de l'attente de la décision sont bien transcrites ici. Et plus dure est la chute, totalement inattendue pour Martin. Le choc de la sentence est violent.
- Une expression terrible, en parlant de Radcliffe, engagé “ parce qu'il avait ce petit quelque chose en plus". Ce détail, indéfinissable, fait basculer le verdict. Un rien minuscule peut changer votre destin en un éclair. "Un tout petit rien qui fait la différence" (p. 87), et c'est ce petit rien qui va transformer l'existence de Martin en cauchemar.
- L'auteur fait preuve d'une immense empathie envers Martin dont on observe le caractère changer radicalement. Son isolement progressif prend une ampleur considérable. Il ne communique plus, s'enferme dans sa bulle de tristesse et d'incompréhension. Il se déconnecte totalement de la réalité.
- Il est intéressant de constater combien l'avenir de Martin et celui de David Radcliffe sont inversement proportionnels ; autant l'ascension et la gloire de l'un sont retentissantes, autant la Bérézina et la déchéance de l'autre sont impitoyables et dures à supporter.
- Une fois de plus, l'auteur nous gâte avec son style décontracté, ses termes choisis, son humour fin, tout ce qui nous rend la lecture tellement agréable.
Encore un mot...
Ce roman nous montre combien le succès de l'un peut rendre la vie impossible à un autre. Le bonheur de David est insupportable à Martin. Il a le sentiment qu'on lui a volé sa vie. Pour un tout petit rien. Tout ce qui a trait à Harry Potter lui devient odieux et son quotidien se transforme en enfer. Nous souffrons avec cet enfant devenu adulte et qui n'arrive pas à se dépatouiller de cette situation, dans un monde qu'il juge hostile. L'auteur fustige au passage la tyrannie des réseaux sociaux où on étale ses états d'âmes en permanence et où la réussite est portée au pinacle. Mais il nous explique également les bienfaits d'un échec dans la construction d'un avenir. Et heureusement, la chute du livre, quasi miraculeuse, nous offre une initiative qui va remettre les choses en place et la vie de Martin va repartir sur les rails. L'optimisme de la fin était plus que nécessaire !
Une phrase
- Une jolie expression lorsque sa fiancée russe décide de rompre et par écrit : "les russes ont, c'est bien connu, le drame littéraire".(p.89)
- Après la confession de Karim qui a refusé un rôle proposé par Audiard : "Ce qui est violent dans l'échec, c'est d'avoir perdu la maîtrise de son destin. C'est la soumission à la décision de l'autre. En agissant ainsi, Karim n'avait rien réparé, mais il avait éprouvé comme la sensation de reprendre la main. C'est lui qui avait décidé de son propre sort, et cet acte de bravoure avait bouleversé Martin. Par son attitude, Karim avait vengé l'honneur de tous les seconds." (p.216)
L'auteur
David Foenkinos (1974 - Paris) possède la triple casquette de musicien, d'écrivain et de cinéaste. Il était peu passionné de lecture durant son enfance mais un long séjour de plusieurs mois à l'hôpital alors qu'il était âgé de 16 ans va voir naître son amour des livres et son envie d'écrire. Auteur d'un certain nombre d'ouvrages, édités chez Gallimard, il commence à se faire connaître en 2002 en obtenant le prix François Mauriac pour Inversion de l'idiotie : de l'influence de deux Polonais". Puis, en 2004, le prix Roger Nimier lui est décerné pour Le Potentiel érotique de ma femme.
En 2009, la parution de La Délicatesse est un succès. Enfin, en 2014, il atteint la consécration avec la parution de Charlotte, pour laquelle il obtient à la fois le prix Renaudot et celui du Goncourt des lycéens. Parallèlement à sa carrière d'écrivain, il entame une carrière au cinéma, avec son frère aîné Stéphane. Il co-réalisera et adaptera sous sa houlette plusieurs films, dont certains tirés de ses romans (La Délicatesse, Les Souvenirs...). Numéro deux est son dernier roman salué par les critiques.
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