Nous serons des héros

Exil, immigration, déracinement: avec lucidité et sans pathos
De
Brigitte Giraud
Editions Stock
Notre recommandation
4/5

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Lu
par Culture-Tops

Thème

Au tout début des années 70, Olivio, âgé de 8 ans, fuit avec sa mère le Portugal sous la dictature de Salazar. Ils sont accueillis par des compatriotes dans la banlieue de Lyon, puis emménagent assez vite chez Max, rapatrié d'Algérie en 1962, et dont la mère tombe amoureuse. Chacun espère un nouveau départ mais Max n'en a que pour son fils  et accepte mal Olivio, inséparable de son chat Oceano et de son ami Ahmed, jeune immigré algérien avec lequel il partage tendresse et complicité.

Points forts

1/ Avec une écriture simple et fluide, Brigitte Giraud se place dans la tête d'Olivaie  qui est le narrateur. Nous suivons son exil forcé avec sa mère après la mort d'un père qu'il a peu connu et dont on lui dissimule la mort en prison. On vit avec lui son incompréhension, sa perte de repères, ses espoirs d'une nouvelle vie en France, mais aussi son ennui, sa nostalgie et sa déception lorsqu'il retourne au Portugal  à la recherche des traces de son père.

2/ C'est toute la difficulté d'Olivio à trouver sa place qui est décrite avec sobriété et délicatesse : c'est la quête d'identité d'un adolescent déraciné, bon élève, frêle et sensible dans un monde d'adultes rugueux qui accepte mal sa différence et le tient à l'écart.

3/ Il y a toute la dignité, la discrétion, le courage et la volonté d'intégration de la mère qui ne flanche pas malgré  l'emprise de Max, arrogant et dominateur.

4/ La question de l'exil, du déracinement et de l'immigration est très justement traitée, sans concessions, sans pathos, avec lucidité et finesse.

Quelques réserves

Le personnage d'Ahmed est assez énigmatique et, s'il apporte espoir et réconfort à Olivio par son tempérament vif et audacieux, on ne saisit pas toujours bien l'attrait et la fascination qu'il exerce sur son ami, si ce n'est qu'ils sont tous les deux perdus hors de chez eux.

La fin est décevante avec une "chute" étrange et mal aboutie qui laisse perplexe.

Encore un mot...

C'est un roman intimiste, pudique avec une tension sourde mais palpable qui fait qu'on le lit quasiment d'une traite en suivant pas à pas Olivio, pour lequel on a beaucoup d'empathie et qui nous touche.

Mais on reste malgré tout un peu sur sa faim une fois le livre fermé; on aurait aimé voir Olivio trouver sa place ou au moins une forme d'apaisement....

Une phrase

Qui seront deux :

 - "L'exil était confortable, il me tenait à distance et évitait que je sois pleinement le fils de mon père. J'avais changé de langue à temps, avant que je ploie sous un passé trop encombrant et que ma vie se transforme en un devoir de mémoire."

 - "Nous ne parlions pas beaucoup mais nous étions l'un avec l'autre moins seuls.".

L'auteur

Brigitte GIRAUD est née en Algérie et vit à Lyon. Elle a publié huit livres dont "l'amour est très surestimé", prix Goncourt de la Nouvelle en 2007.

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