Nous nous verrons en août
Traduit de l’espagnol (Colombie) par Gabriel Iaculli
Parution le 13 mars 2024
138 pages
16.90 €
Infos & réservation
Thème
Ana Magdalena Bach a pour habitude de se rendre chaque été sur la tombe de sa mère enterrée depuis huit ans dans une île des Caraïbes.
Tous les 16 août, elle va déposer une gerbe de glaïeuls dans le petit cimetière indigent et passe la nuit dans une pension assez miteuse avant de reprendre le bac pour rentrer chez elle. L’année de ses quarante-six ans, elle croise un inconnu dans le hall de l’hôtel et prend une initiative : On monte ? Traitée comme une professionnelle, elle ne sera plus jamais la même.
Points forts
L’adultère devenu annuel entraîne Ana Magdalena à changer de regard sur les êtres et les choses : si le fait de tromper son mari une fois l’an n’entraîne chez elle aucun sentiment de culpabilité, il l’amène curieusement à douter de la fidélité de son époux (j’ai pu le faire, pourquoi pas lui ?).
D’une année sur l’autre, elle éprouve un besoin d’élégance que n’exigeait pas la fidélité : elle soigne sa tenue, renonce à son taxi-guimbarde et veille désormais au standing de son hôtel.Une belle idée : les amants d’un soir, tous différents, dont le seul impératif est qu’ils soient de parfaits inconnus, sont associés chaque fois à un livre, un classique du fantastique ou de la science-fiction, comme les Chroniques Martiennes de Ray Bradbury ou le Dracula de Bram Stocker.
Quelques bonheurs d’expression qui marquent le grand écrivain. Il est question de « visage de mère automnale », de « sénateur grandiloquent », d’« imprécision infaillible » ; de même, certains portraits cocasses comme celui de la fille de la maison qui « aimait d’un amour allègre un trompettiste de jazz mais voulait entrer dans l’ordre des carmélites déchaussées. »
Quelques réserves
Le renouvellement d’un adultère annuel avec un amant chaque fois différent est plus littéraire que crédible, trop artificiel venant d’une épouse amoureuse n’ayant jamais connu la tentation.
Certaines phrases, particulièrement tarabiscotées, sont presque illisibles : « Elle perd les illusions que lui donne l’île d’un homme constant parmi ceux, volatils, auxquels elle avait goûté ». Problèmes de traduction ou manque de maîtrise d’un auteur vieillissant ?
Encore un mot...
Ce livre publié dix ans après la mort de Garcia Marquez fut écrit alors que l’auteur commençait à perdre la mémoire, il devait être le premier de cinq courts romans mettant en scène des personnes d’un certain âge. Mais il fut la « dernière course entre le perfectionnisme de l’artiste et ses facultés mentales qui s’estompaient ». Malgré ses quelques faiblesses, les deux fils de « Gabo » ont décidé d’offrir aux lecteurs ce dernier texte inédit de leur père.
Une phrase
« Ana Magdalena réalisa seulement à ce moment-là qu’elle ne savait rien de lui, même pas son nom, et que tout ce qui lui restait de sa folle nuit était une triste odeur de lavande dans l’air purifié par la bourrasque. Ce fut en prenant le livre sur la table de chevet pour le ranger dans sa mallette qu’elle s’en aperçut : il avait laissé entre deux pages d’épouvante un billet de vingt dollars. » Page 28
L'auteur
Gabriel Garcia Marquez, mort en 2014 à l’âge de 87 ans, est un écrivain colombien que l’on peut considérer comme l’un des très grands du XXe siècle.
Romancier, nouvelliste, mais également journaliste et militant politique, il reçoit le Prix Nobel de littérature en 1982.
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