On ne parle plus d'amour
Parution le 19 août 2021
250 pages
18,90 euros
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Thème
Nous sommes en Bretagne. Olivier Lemarié a décidé arbitrairement que sa fille Louise allait épouser un personnage falot, Armand-Pierre, dont le porte-monnaie formidablement garni va lui permettre d'éponger ses dettes abyssales. Louise, assez dolente, portée par le vent, n'y trouve rien à redire. Revient au pays un jeune voisin aristocrate et fortuné qui va complètement changer la donne. Et va faire parler d'amour dans un microcosme où ce sentiment n'a pas sa place.
Points forts
- Le personnage du père de Louise est odieux. C'est un imbuvable histrion pour qui seul le paraître compte avec son lot de fausses relations utiles. Arriver en trois pages seulement à nous faire détester un des personnages majeurs du roman est un exploit. Cette outre de vantardise est décrite avec une minutie d'entomologiste. D'ailleurs, aucun des protagonistes-clés de ce livre n'est épargné par l'auteur qui a un sens aigü de la critique vacharde bourrée d'humour. Mieux vaut être dans son camp qu'en face !
- Le jeune aristocrate venu soigner un chagrin d'amour dans son fief et qui s'éprend de Louise est très sympathique dans son absence totale de conformisme et a une attitude qui dénote une sincérité confondante dans ce milieu hypocrite en diable.
- Cet ouvrage est, en fait, une étude de mœurs, notamment celle des notables provinciaux qui affublent leurs enfants de prénoms doubles improbables pour faire genre. Les parisiens en goguette en Bretagne, avec leurs clichés snobinards et bling-bling, valent leur pesant d'or.
- Il est amusant de constater que dans ce roman intitulé "On ne parle plus d'amour", on en traite à chaque chapître et que cette "préoccupation de petits-bourgeois" interpellent les personnages en permanence.
- Un instant de pur bonheur : la discussion d'Olivier Lemarié avec son comptable qui le remet à sa place de bambocheur ruiné avec des phrases assassines et formidablement pertinentes.
- L'écriture et le style enlevé de l'auteur sont, comme d'habitude, remarquables et permettent une lecture fluide et très agréable de l'ouvrage.
Quelques réserves
- Une réserve qui n'en n'est pas une, en fait : le rythme de la vie en province est lent et le début du livre a adapté ce mouvement avant de reprendre vite une allure plus rapide facilitant la lecture.
Encore un mot...
Stéphane Hoffmann est un habitué de la critique humoristique ainsi pratiquée dans ses chroniques hebdomadaires du Figaro Magazine. Ici, la vie de province est étudiée sous toutes les coutures. Et en prend pour son grade. Même si les critiques sont mordantes, on sent tout de même chez l'auteur une certaine tendresse pour cette vie étriquée qui a toutefois des bons côtés, dont la vie au grand air. Tout n'est pas à jeter. Ce récit est truffé de bons mots d'auteur. Cet homme a le sens de la formule incisive et sans appel. C'est une vraie gourmandise.
Une phrase
Ce paltoquet de futur mari, Louis-Armand (déjà un prénom tordu !), tient à préparer Louise au mariage, qu'il qualifie d'équipage :
"D'abord, intellectuellement, Louise doit lire Crétineau-Joly et Jean-François Chiappe, sans oublier Chateaubriand ni Châteaubriand. Elle doit porter le deuil le 21 janvier et le 16 octobre, écumer plusieurs fois par saison le Puy-du-Fou..... et faire le pèlerinage de Sainte Anne d'Auray - "Un jour, nous irons à Chartres mon amour, je te le promets, blatère-t-il. Et même à Compostelle. Sursum corda" conclut-il en transe." (p.57 et 58)
Que voilà un programme enthousiasmant pour une future mariée de 20 ans à peine ! Ne manquent plus que quelques processions sous le crachin breton…
L'auteur
Stéphane Hoffmann (1958 - Saint-Nazaire) est un auteur bardé de prix. En 1991, la parution de Château Bougon est couronnée du prix Jean Nimier. En 2008, le prix Bretagne lui est accordé pour Des filles qui dansent. En 2016, il remporte le prix Jean Freustié pour Un enfant plein d'angoisse et très sage. Enfin, avec Les belles ambitieuses paru en 2018, il est gratifié à la fois du prix des Hussards et du grand prix Michel-Déon (2019). Tous les livres ci-dessus sont édités chez Albin-Michel. En 2000, il obtient le prix Louis-Barthou pour Le journal d'un crétin aux Editions du Rocher.
Il est l'auteur d'une vingtaine d'ouvrages.
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