Mon autopsie
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Thème
Jean-Louis Fournier est mort. Il a donné son corps à la science et attend avec d’autres cadavres d’être choisi par un élève pour être disséqué au long de l’année universitaire. C’est une étudiante qui l’ « adopte ». Commence alors un long face à face silencieux, rythmé par le cliquetis des instruments chirurgicaux. Il décide d’ailleurs de nommer la jeune fille « Egoïne » ! Chaque organe qu’elle prélève est l’occasion pour l’auteur- narrateur d’évoquer un moment fort de sa vie passée. Un monologue intérieur teintée d’ironie mordante et de bons mots, mais le fond reste poignant.
Points forts
- Une écriture ciselée au scalpel, c'est le cas de le dire.
- De courts chapîtres percutants. L’auteur excelle dans l’art de la chute.
- Un humour corrosif et décapant, mélange de cynisme et d’auto-dérision. C’est grinçant, mais souvent émouvant aussi…
Quelques réserves
- D’abord un conseil aux lecteurs : âmes sensibles s’abstenir ! Ici les expressions « la main dans le sac », « elle a ouvert ma cage », ou « elle me rentre dans le lard » sont prises au sens premier. Les détails de la dissection forment la trame du récit.
- On peut être agacé par la mise en scène très égocentrée. Mais Jean-Louis Fournier sait rire de ses travers. Il cite Picabia: « Ce qui m’intéresse le plus chez les autres, c’est moi ». Avant d’ajouter : « cette phrase me va comme un gant ». (P.147).
Encore un mot...
Ses enfants handicapés, son veuvage…on savait que Jean-Louis Fournier, comme son ami Pierre Desproges, pouvait rire de tout. Là, il franchit encore un cap , pour notre plus grand plaisir. Cette autopsie est une autobiographie d’un genre nouveau, fragmentée, pour ainsi dire dépecée, dont chaque morceau est révélé par la lumière crue du scialytique et une langue incisive . Sa carrière, ses amours, ses enfants, ses belles voitures, mais aussi sa vie intellectuelle et artistique…on retrouve les thèmes qui lui sont chers, mais aussi cette impertinence plus que jamais bien vivante !
Une phrase
« J’ai compris que j’allais être adopté.
La main est douce, elle doit appartenir à une étudiante, je l’imagine fine et gracieuse.
Nous allons passer une année ensemble.
Peut-être une histoire d’amour entre une jeune fille et un vieux mort ?
Je voudrais être son cadavre exquis.
Elle va me découvrir dans les moindres recoins de ma peau, elle va fouiller à l’intérieur.
Moi qui ai passé ma vie à raconter des blagues, à faire des pirouettes, à me déguiser en clown , moi qui gardais tout à l’intérieur, cette fois je ne vais rien pouvoir cacher. Une autopsie c’est pire qu’un strip-tease ».
L'auteur
Humoriste et réalisateur de télévision, Jean-Louis Fournier a conçu, avec son complice Pierre Desproges, « La minute nécessaire de M.Cyclopède ». Il a écrit aussi, entre autres, « La Grammaire française et impertinente «, en 1992; « La Noiraude «, en 1999; et « Antivol, l’oiseau qui a le vertige », en 2003.
Il est surtout connu pour s'être livré sur sa vie et celle de ses proches . En 1999 il raconte son père alcoolique dans "Il a jamais tué personne mon papa". En 2008, il obtient le prix Femina pour "Où on va, papa ? ", où il parle de ses deux fils handicapés physiques et mentaux. Il évoque sa femme décédée dans"Veuf", en 2011; et sa fille appelée par Dieu dans "La servante du Seigneur", en 2013 (celle-ci exigera un droit de réponse). Il rend aussi hommage à « la femme de sa vie », dans un roman paru en 2015 : « Ma mère du Nord ».
Commentaires
C'est sublissime! On retrouve Desproges. Il y a tellement d'humour et d'amour, sans vulgarité. De l'anti-Bigard, en somme.
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